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Gruff Rhys

Interview publiée par Laetitia Mavrel le 18 mai 2021

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Le lunaire Gruff Rhys nous revient toujours en solo avec Seeking New Gods, album concept construit autour du mont Paektu, montagne asiatique emblématique de ces lointaines contrées nous livrant un disque situé entre douce fantaisie et réflexion introspective sur le temps qui passe. Une belle rencontre à distance qui nous fait voyager loin de nos salons, encore partiellement confinés.

Seeking New Gods sort ce 21 mai. Ce dernier a été mis en boîte en août 2019, à l'issue de la tournée américaine pour l'album Babelsberg. Comment as-tu vécu cette attente ? Ça n'a pas été trop frustrant ?

Oui, c'était un peu frustrant cette période, mais pour être honnête mes préoccupations cette dernière année étaient d'ordre familial, je me suis donc déconnecté du contenu de l'album durant ce temps.

Finalement, cette pause avant de dévoiler le disque t'a été bénéfique ?

En un sens oui, l'état d'esprit était ailleurs.

Peux-tu nous raconter l'histoire derrière Seeking New Gods, cet album construit autour du Mont Paektu que tu as réalisé en grande majorité lorsque tu étais en tournée sur les routes de Californie en 2019 ?

Je me suis intéressé au mont Paektu (ndlr : point culminant de toute la Corée, mont sacré pour les Coréens et les Mandchous) après avoir lu à son sujet par hasard. J'ai eu l'idée d'en écrire une biographie, quelque chose qui n'a jamais été fait jusqu'à présent. Les titres traitent de façon abstraite, et petit à petit de façon personnelle, de ce à quoi ressemble cette montagne. L'album est un recueil de sentiments plutôt qu'une leçon d'histoire.

C'est en effet plus personnel qu'académique ! L'environnement musical est très riche, avec beaucoup d'instruments divers et variés comme le synthétiseur Solina et tous les cuivres... D'où vient cette multiplicité de sons ? La musique t'a-t-elle été inspirée par l'imaginaire autour du mont Paektu ?

Oui, la musique m'est venue après l'idée de la montagne. Le problème quand on compose en studio c'est qu'on a tant de possibilités qu'on travaille chaque instrument à l'extrême, séparément. J'ai essayé de trouver un lien entre chaque son. Le groupe a créé l'unité, il a apporté notamment le Solina, le tout mis en valeur par les chœurs de Miren Haf Roberts du groupe Bach. Ça m'a pris cinq jours pour lier les instruments entre eux et trois mois pour mixer l'album. C'est un disque qui est fait pour être joué en live, c'est terrible que nous ne puissions pas le faire en ce moment.

C'est pour bientôt ! Tu as une petite tournée prévue pour cet automne au Royaume-Uni afin de présenter le disque. Tu penses que cela se fera dans des conditions « normales » ?

Je n'ai aucune idée si la tournée pourra avoir lieu. C'est tellement incertain... Il y a eu des assouplissements puis de nouvelles mesures de restrictions déjà. Si on ne peut pas jouer, ça sera forcément justifié mais on attendra. J'ai hâte !

S'agissant de l'atmosphère générale du disque, on retrouve ici encore une belle invitation au voyage, c'est poétique et bucolique à la fois. Tu nous avais déjà invité dans ton monde avec Pang!, c'est ta volonté de nous faire nous évader tout au long de ta discographie ?

Oui, mais je ne le fais pas vraiment exprès (rires) ! Je trouve ça bien plus intéressant de ne pas faire deux fois le même disque ou de me contenter d'écrire une chanson sur moi. C'est toujours une nouvelle aventure quand on commence un album. Parfois ça consiste à utiliser un instrument original comme avec Pang! pour lequel le principe était de créer un disque de pop expérimentale grâce à Muzi (ndlr : musicien sud-africain d'origine zulu qui a collaboré au précédent disque) . Réfléchir sur le Mont Peaktu, ça m'a réellement occupé.

Cet album aurait sonné différemment si tu l'avais conçu et réalisé chez toi au Pays de Galles ou ailleurs au Royaume-Uni ?

Je pense que ma principale source d'inspiration a été le fait que nous étions en train de tourner tous ensemble durant trois semaines, répétant et écoutant tous la même musique. On a commencé le travail en Californie et on l'a terminé à Bristol pour être exact, pas vraiment le même cadre !

Tu peux nous dire quels sont ces nouveaux dieux que les gens recherchent ?

Je ne sais pas, c'est une mauvaise blague ce titre. Les dieux vont et viennent, mais la montagne reste.

La montagne évoque selon certaines approches la stabilité, elle est imperturbable quelque soient les éléments autour et elle dégage une impression d'éternité. Ces notions sont-elles des mantras pour toi ?

Je suppose que le mantra qui se dégage à la fin du disque est qu'on est toujours à la recherche de quelque chose. Comme quand on escalade une montagne, qu'on pense avoir atteint le sommet mais qu'en fait il y encore un palier qui se dessine devant. Ça ne se termine jamais, c'est comme un grand cercle.

Ça n'est pas un message pour nous signifier que tu seras toujours dans le coin pour nous offrir de la bonne musique ?

(rires) Je ne prends jamais les choses pour acquises, on ne sait pas ce qui peut arriver, surtout vu les circonstances actuelles. Mais toujours rechercher l'album parfait... Tant que je n'y arrive pas, je continue !

Suite à la levée progressive des mesures de confinement au Royaume-Uni, quelle sera ta destination dès que tu pourras à nouveau voyager ?

J'ai surtout envie de retrouver de la famille que je n'ai pas vue depuis l'été dernier. La chose que j'apprécie le plus dans les voyages est de rencontrer des nouvelles personnes... Pour le moment c'est difficile mais ça reviendra.

Pour finir et évoquer le live qui nous manque tant, tu peux nous indiquer ton tout premier concert ?

Mon tout premier concert était Alan Stivell avec mes parents mais je me suis endormi avant la fin. Plus tard le premier concert de rock dont je me souvienne est Edward H. Dafies (ndlr : groupe de rock chantant en gallois entre 1973 et 1980). En 1976 !