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Bill Ryder-Jones

Interview publiée par Emmanuel Stranadica le 8 janvier 2024

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Rencontrer Bill Ryder-Jones est un moment particulier. Oui, particulier, je devrai même plutôt dire émouvant. L’Anglais, maintenant quarantenaire, sort un nouvel album, Iechyd Da, le 12 janvier, et celui-ci est probablement le meilleur de sa carrière à ce jour. Ce disque a visiblement été accouché dans la douleur, ce qui le rend encore plus touchant et fort. Ecorché, délicat, drôle et direct, Bill Ryder-Jones s’est livré sans tabou à Sound Of Violence sur la genèse de son disque, son rapport à la musique mais aussi sur sa collaboration sur le dernier album de The Coral.

A l'exception de Yawny Yawn la réinterprétation de Yawn au piano, ton dernier album remonte à cinq ans. Pourquoi cela a-t-il pris autant de temps ?

Déjà, il y a eu une putain de pandémie ! Mais bien sûr, ce n'est pas la seule raison. En fait, je produis des artistes maintenant et je dois payer mes factures. Pour être honnête, ces trois dernières années ont été difficiles. L'album lui-même n'a pris que deux ans. Mais je préfère penser que c'est mon sixième album et donc le cinquième en dix ans. Ce qui fait un disque tous les deux ans. J'ai juste été occupé par d'autres travaux et d'autres événements de la vie. Évidemment, la pandémie n'a pas aidé parce que, comme la plupart des gens, quand elle s'est terminée et que le monde a refonctionné, j'ai dû gagner de l'argent et, bien sûr, j'ai dû travailler autant que je le pouvais.

Tu ne pouvais pas pu partir en tournée ?

Je ne fais pas de tournées. Je suis producteur. Je fais un disque tous les deux ans et je ne gagne pas d'argent avec. Tu vois ce que je veux dire ? Ça ne peut pas être ma source principale de revenus. Je produis donc des disques pour d'autres personnes. Dès que le monde s'est à nouveau ouvert après le COVID-19, il y a eu une liste de personnes qui avaient réservé mon studio et pour lesquelles je devais travailler. Je suis reconnaissant qu'ils veuillent bosser avec moi parce que j'étais fauché. Encore plus fauché que je ne le suis aujourd'hui.

Ton premier avant-goût de l'album, This Can't Go On, est plein d'énergie et de puissance. Ça ressemble à une explosion intérieure. Est-ce que c'est ce que tu voulais exprimer dans ton chant, dans cette manière de revendiquer les choses ?

Aimes-tu l'album ?

Je l'aime vraiment beaucoup...

C'est une bonne chose, parce que personne ne m'a demandé ça de toute la journée. Tout l'album est axé sur le fait que je voulais me lancer des défis et faire des choses que je n'avais jamais faites auparavant. Au début je voulais essayer des nouvelles choses et juste les améliorer. This Can't Go On est une de ces chansons étranges dont je ne me souviens pas vraiment de l'avoir écrite. Je ne me souviens pas de l'avoir conceptualisée. Elle s'est faite en quelques jours, un peu à la va-vite. Et je n'avais jamais rien fait de tel auparavant. Je suis très honnête. Pour cette chanson, j'étais vraiment énervé. Quelqu'un m'avait dit que j'étais agoraphobe de longue date, que je devrais peut-être davantage sortir et prendre un peu le soleil. Ce fut trop pour moi ! Il est rare que j'écrive des chansons lorsque je suis de cette humeur. Il fallait donc que ce soit comme ça et je vais te dire d'où elle vient. Cette chanson est une référence terrible parce qu'elle parle de l'assassinat des droits civiques des Noirs. Elle est liée à I Can't Go To Sleep du Wu-Tang Clan. Je me souviens de la première fois que j'ai entendu dire qu'ils pleuraient dans cette chanson. C'était au moment où le hip-hop était devenu incroyablement ennuyeux pour moi. Et puis cette chanson est arrivée. Le sample du titre d'Isaac Hayes, Walk On By, l'énergie qui s'en dégage, c'est quelque chose que j'aime depuis des années, et de mémoire, je pense que c'est aussi simple que ça. L'émotion est géniale. Je voulais en faire ma version, avec quelque chose que je ressens aussi. Il s'agissait donc de puiser dans différentes choses et ne pas simplement faire comme si j'étais triste ou défoncé, ou énervé. En fait, je n'allais pas la mettre sur l'album ou plutôt je ne trouvais pas de place pour elle dessus. Je voulais que l'album soit un peu comme une mixtape, sans en être complètement une. Et ce n'est que lorsque Domino Records m'ont dit "Nous voulons que ce soit le premier extrait" que je me suis dit ok, si c'est le premier single, elle pourra figurer n'importe où sur le disque, parce que ce ne sera une surprise pour personne quand l'album sortira. Cela s'est donc fait de manière très organique et finalement très facilement.

L'album débute avec I Know That It's Like This (Baby). Elle donne un peu l'impression d'être dans un rêve à cause de la voix de Gal Costa qui semble très lointaine. Est-ce que c'est quelque chose que tu voulais vraiment faire ressentir, comme être dans ta tête en train de penser ou de rêver de quelqu'un ?

En gros, oui. En fin de compte, la première chose que je voulais faire ressentir dans celle-ci, c'est son ambiance et à quel point elle est fantomatique. Baby est la chanson que j'ai le plus écoutée lorsque j'ai écrit cette chanson. Ma petite amie de l'époque me l'avait faite découvrir, elle est brésilienne. Je l'ai tellement écoutée que mon monde a commencé à lui ressembler et j'ai commencé à écrire la chanson de ce point de vue. Encore une fois, j'ai essayé de me mettre au défi. J'ai commencé à écrire la chanson avec quelqu'un qui tombe amoureux de Gal Costa au travers de sa chanson. Et il essaie d'écrire à Gal en lui disant "Je sais que tu me parles à travers cette chanson". J'ai donc commencé avec cette idée en tête, comme lorsque je chante "baby, one kiss and I'm in heaven". Et puis j'ai rompu avec ma petite amie et j'ai mis la chanson de côté pendant un certain temps parce que je ne pouvais plus la supporter. La chanson ne contenait pas le sample au début. Ensuite, j'ai fait en sorte que la chanson parle de moi et que mon ancienne petite amie tombe amoureuse de cette chanson. Et puis je me suis souvenu qu'elle m'avait dit "It's like this". C'est d'ailleurs une traduction approximative de ce que Gal dit dans la chanson. Un peu comme dans Something On Your Mind de Karen Dalton. C'est une femme qui dit à son mari ou à son amant "Tu luttes et je ne sais pas quoi faire ». Il s'agit d'un niveau d'acceptation basique que l'on souhaite de la part de son partenaire, à cause de ce qu'on n'a pas obtenu d'elle ou de lui. Mais lorsque j'ai écrit la fin de la chanson, je n'avais pas du tout de référence à Gal Costa. Il se trouve qu'un jour, finalement, je l'entends de nouveau ce "baby, baby" et je réalise que ça colle à la chanson sans savoir d'où ça vient. C'était vraiment très spécial. Il s'est passé quelque chose car ce n'est pas moi qui ai écrit ça. Mais ce que j'ai écrit correspond à cela, et j'ai dû en quelque sorte couper une partie du morceau, égaliser la musique, et puis ajouter le fameux "baby". Lorsque j'ai tout accordé et que j'ai travaillé pour l'harmoniser, je me disais "oh, putain, c'est vraiment comme ça que je la voulais". C'était la première fois depuis des années que j'étais autant excité pour une chanson. Une fois que j'ai fait ça, je me suis dit que je tenais la première chanson de l'album, et qu'elle parlait en fait de Gal. Il fallait donc qu'y figure absolument ce sample au début. Ma maison de disques s'est s'adressée à l'équipe de Gal Costa pour obtenir l'autorisation de l'utiliser, mais une semaine après l'avoir contactée, Gal Costa est décédée. C'était une catastrophe car la chanson était parfaite pour moi avec le sample. Heureusement, ils sont revenus vers nous et ont dit "Nous serions heureux que vous l'utilisiez ». Au final, l'idée que Gal soit dans ta tête et que ta tête soit dans ma tête, c'est un peu ce que j'avais en tête au début.

Sur le disque, il y a la troisième partie de A Bad Wind Blows In My Heart, dix ans plus tard. J'aimerais savoir si tu savais, après la sortie de ton second album, qu'il y aurait un jour une troisième partie à cette chanson ?

Oui, car j'avais déjà commencé la troisième partie il y a longtemps déjà. Ces chansons, c'est juste moi et mes chagrins d'amour. C'est vraiment ma manière de dire que j'ai le cœur brisé sans nommer la personne. J'ai fait la même chose avec The Lemon Trees. J'en ai écrit quatre mais je n'en ai publié qu'un seul. Mais je les ai écrits pour dire que je suis déprimé. C'est ainsi que je fais référence à ces deux choses. Il se trouve que cette rupture était suffisamment douloureuse pour que je termine A Bad Wind Blows In My Heart pt 3. J'avais besoin de faire ça et de l'insérer quelque part mais c'est juste de l'écriture. Je veux dire, c'est une belle chanson et j'aime les paroles, mais quelle est son identité ? Qu'est-ce qui fait qu'elle mérite d'être la deuxième chanson d'un album ? C'est simplement une référence à moi-même.

Je me suis rendu compte qu'il existe un promo CD-R publié en 2011 qui contient l'EP A Leave Taking ainsi que des inédits et raretés. Et l'un de ces inédits s'intitule If Tomorrow Starts Without Me. Est-ce la même base, la même chanson que tu as utilisée pour ton album ?

Je ne savais pas qu'ils avaient fait ça ! C'est donc sorti il y a longtemps, comme sur un sampler. Pour cette chanson, j'avais le texte depuis longtemps. Et parfois, c'est difficile de trouver une place. J'ai parlé dans une interview en Angleterre l'autre jour d'une vieille version de la chanson qui existait bien. Elle ressemble à du Nick Drake mais je ne l'ai jamais sortie, parce que je me disais "bon, ça ne me dérange pas de montrer mes influences, mais c'est juste moi en train d'imiter Nick Drake" (rires). Ce qui n'est pas particulièrement intéressant. Mais cette phrase, "If tomorrow starts without me", était dans ma tête depuis des années avant même que je n'écrive des chansons. C'est une manière très philosophique de dire quelque chose que tout le monde pense. C'est tellement plus intéressant que de dire qu'est ce qui se passera si je meurs. Pour moi, c'est l'essence même de la vie et je dis cela aux auteurs-compositeurs avec lesquels je travaille tout le temps. C'est un peu comme s'il n'y avait pas grand-chose d'universel à dire, mais qu'il y avait des millions de façons de le dire. C'est ce que font, à mon avis, les grands écrivains. Et c'est pour cela que je suis si heureux avec It's Today Again. Si quelqu'un d'autre écrivait ce titre, je me dirais "Espèce d'enfoiré !". C'est tellement intelligent, parce que, bien entendu, chaque putain de jour est aujourd'hui. Mais c'est une manière différente de penser. C'est comme si aujourd'hui était hier, et que demain serait aujourd'hui. Je ne suis pas incroyablement intelligent dans mon écriture, mais ce que j'aime faire, c'est prendre quelque chose et lui donner une tournure plus intéressante parce que mon utilisation des mots, mon vocabulaire n'est pas très étendu. Et je ne lis pas de poésie. Je ne lis pas beaucoup de romans. Je n'ai pas grand-chose à me mettre sous la dent. Tout ce que je peux faire, c'est me demander ce qui est plus intéressant plutôt que de dire que je suis triste.

Il y a une chorale d'enfants qui chante avec toi sur l'album. D'où est venue l'envie de travailler avec eux ?

Comme la plupart des idées de ce disque, elles proviennent d'un autre disque que j'adore : un album de Smog, paru sur Domino Records et qui s'intitule Knock, Knock. Let's Move To The Country commence avec des enfants et c'est une chanson que j'ai toujours aimée. Leonard Cohen a fait ça également, J'ai toujours aimé ce son mais je n'ai jamais eu l'impression que c'était la bonne chose à faire. Mais lorsque le monde s'est de nouveau ouvert après le COVID-19, je marchais de ma maison à mon studio, ce qui représente environ dix ou quinze minutes de marche, et je suis passé devant une école primaire. Je me suis vite rendu compte que c'était un peu le point culminant de ma journée cette marche. Lorsque je passe devant à l'heure de la récréation et que j'entends le bruit des enfants, c'est juste magnifique. Les entendre s'amuser avant que toutes les névroses n'interviennent et avant que nos parents ne les bousillent. J'ai envoyé un SMS à mon manager pour lui demander de me trouver une chorale d'enfants. Et ça s'est fait ainsi.

Il y a quelque chose de vraiment nouveau sur Iechyd Da, c'est ce son plus harmonieux. On est très loin d'un son rugueux et électrique que tu as pu utiliser par le passé. Tu voulais faire un disque plus orchestré ? Y a-t-il des choses qui t'ont inspiré ?

Oui, il y a deux raisons à cela. La première est que j'ai détesté jouer Yawn sur scène. J'ai aimé faire le disque, mais quand il a fallu le jouer en concert, je me suis tout simplement dit que je n'aimais pas ça. C'est compliqué parce que faire semblant en donnant ces concerts aurait pu me faire passer pour un imposteur, comme si je n'avais pas apprécié ce que je faisais et que ça ne m'avait pas rendu heureux. La seconde raison c'est que je n'écoute pas beaucoup de musique. Pendant un an, je n'ai écouté que Red House Painters et Duster, et j'ai commencé à faire du slowcore. Mais ça ne me correspond pas, putain ! C'était juste moi en vacances. Pet Sounds, voilà ce que j'écoute, et Scott Walker. Je suis en train de faire un disque pour Michael Head et il m'a dit "Voilà les chansons, Bill. Fais-en ce que tu veux. Ajoute des cordes dessus". Ça me rend heureux et je me dis que c'est magnifique. Pourquoi est-ce que je ne ferai pas de la musique comme ça ? C'est aussi simple que ça. Parfois, ces importantes leçons de vie vous tombent dessus. Tous artistes aiment l'émotion et je suis convaincu que les gens aimeront cet album plus que n'importe quel autre.

Dans This Can't Go On tu chantes "I walked all night to the Killing Moon". C'est un clin d'œil à Ian McCulloch ?

Ce n'est pas un clin d'œil. C'est un hommage. Quand j'ai commencé cette chanson, ce fut un peu comme la première scène d'un film. La chanson parle des pensées d'une nuit où je suis sorti marcher après une dispute avec ma copine. J'ai écouté The Milling Moon, genre, quatre fois d'affilée. Pour une raison ou une autre, je me suis dit qu'il fallait que j'écoute beaucoup cette chanson, que ça avait son importance. J'ai marché toute la nuit. Et puis en rentrant de cette promenade, j'ai pris ma guitare car il fallait que je le fasse. Il est très rare que je termine une chanson en une seule fois de nos jours mais celle-ci a été réalisée en une heure environ. C'est quelque chose qui ne m'arrive plus. La dernière fois que c'est arrivé, c'était pour Lemon Trees où les paroles n'avaient pas besoin d'être modifiées. Et c'est quelque chose de spécial parce que c'est comme si j'avais éteint la partie de mon cerveau qui réfléchit. On se dit alors que c'est vraiment bon. Mais finalement cette histoire c'est un peu ce que j'ai fait dans tout l'album. J'utilise des références. Il y a, par exemple, I Wanna Be Your Dog. Il y a en tout huit références pour toutes les chansons de l'album. Je laisse les gens les trouver, mais ce serait terrible de voler de la musique à des gens et de ne pas vouloir le reconnaître. Je ne ferais pas ça, rassure-toi.

Tu as écrit une chanson pour le dernier album de The Coral, Sea Of Mirrors, qui a donné son titre à l'album. Comment cela s'est-il passé ?

Je ne sais pas. James Skelly et moi, nous ne nous sommes pas parlé pendant longtemps. Je ne pense pas qu'il y ait eu une réelle animosité entre nous, mais nous ne nous sommes pas parlé. C'était pendant le confinement, nous avions échangé quelques SMS et il a fait ce qu'il avait toujours fait, c'est-à-dire me demander si j'avais des accords pour lui. Je lui ai répondu que j'avais des accords à lui proposer. J'ai filmé ça et je lui ai envoyé. Et il se trouve que cette fois-ci, il m'a donné le crédit de la chanson. J'ai été stupéfait parce que j'ai écrit pas mal de chansons sur un coin de table et je n'ai jamais eu un putain de crédit. C'était donc incroyable, mais surtout très gentil de sa part. J'aime James. Je l'aime vraiment. Nous sommes plus proches maintenant en tant qu'adultes que nous ne l'avons jamais été il y a vingt ans. On se voit pour prendre un café, on parle, on s'envoie des liens Spotify, des vidéos, etc... C'est vraiment sympa. Ils veulent que je revienne dans le groupe mais ce n'est pas envisageable.

Tu as produit le fantastique album de By The Sea, Heaven Knows magnolia...

Oh, merci d'en avoir parlé. Je suis si heureux que tu aies dit ça, parce que c'est vraiment génial. Il a reçu très peu d'attention, c'est vrai. Il n'y a pas vraiment eu de chroniques du disque en Angleterre, dans la presse, et Liam, le chanteur, je ne sais pas si je devrais dire ça, mais il ne s'en est pas vraiment remis. Cela lui a fait beaucoup de mal. Liam est incroyable, c'est mon meilleur ami. Je l'aime beaucoup et j'aimerais que son groupe soit davantage reconnu, car il le mérite vraiment. C'est un très, très bon album.

Iechyd Da est un disque mélancolique, mais je pense qu'il contient également beaucoup d'espoir. Es-tu d'accord avec cela ?

Oui. L'espoir constitue une grande partie de ce que je suis. C'est la seule raison pour laquelle j'ai réussi à tenir pendant ces vingt dernières années, avec de si nombreux bouleversements. Et je ne veux pas être responsable du fait que les gens se sentent désespérés. Je veux être responsable de mon public et des gens qui aiment ma musique. Tout ce qu'il me fallait faire, c'était créer davantage de beauté. Il y en a tellement plus sur ce disque que dans tout ce que j'ai fait jusqu'à présent. Une beauté objective, tu vois ce que je veux dire ? Des moments musicaux magnifiques qui, à eux seuls, te rendent heureux. Une chose que j'ai apprise lorsqu'on sort un disque, c'est d'avoir un retour sur celui-ci. Et ce que j'ai reçu en retour de Yawn n'était pas agréable. Ce n'était vraiment pas terrible, et je n'avais pas besoin de cette putain de merde dans ma vie. C'est différent maintenant. Je peux repenser à certaines des pires expériences que j'ai vécues et savoir que j'ai réussi, d'une manière ou d'une autre, à les rendre plus belles.