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Infadels

Interview publiée par Valy le 9 février 2006

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Découverts à la suite de nombreuses excellentes prestations scéniques, les Infadels sortaient le mois dernier leur premier album studio chez Wall Of Sound/PIAS France. Une bonne excuse pour faire le point sur un début de carrière d'ores et déjà bien mouvementé !

Comment vous êtes vous rencontrés, qui êtes vous ?

Matt : Je suis Matt et j'ai rencontré Bnann il y a quelques lunes au sein d'une entreprise de media. J'étais à la photocopie, Bnann avait un job curieux qui consistait à réécouter ce qui passait à la radio... nous étions tous les deux au niveau le plus bas de l'échelle, bref, un jour Bnann ma tendu un papier à photocopier et voilà! (rires)

Avant de former les Infadels vous aviez un groupe nommé Balboa, qu'est-il arrive à ce groupe ?

Matt : Il a coulé comme le Titanic ! Plus que coulé même !
Bnann : nous avions tout faux. De là on a réalisé ce qu’il ne fallait plus faire et ce que nous avions besoin de faire, et on a formé les Infadels . Avec Balboa on essayait des choses sans savoir où on allait. Ca nous a appris les erreurs à ne plus faire.
Matt : Nous avions tort à 99% (rires)
Bnann : Musicalement, on essayé de faire de l'electro mais on ne savait pas vraiment comment s'y prendre et nous avons passé beaucoup trop de temps en studio et pas assez à jouer devant du monde, nous avions perdu le sens de ce que c'est d'être dans un groupe de rock n'roll, nous avions perdu tout l'esprit du rock n'roll !
Matt : nous pensions qu'en étant parfaits, les gens nous aimeraient. Et nous passions tout notre temps à essayer d'être parfaits. Avec les Infadels, nous avons réalisé que nous allions être nous-même, avec tous nos manques de perfection ou de talent. Nous avons laissé toutes les erreurs dans les Infadels, le bordel, les ratés à la batterie, dans notre jeu, les bruits parasites et nous avons juste été nous-même. Nous écoutions trop Daft Punk : « oh c'est tellement parfait : », mais ce n'est pas nous...
Bnann : c'était comme aller dans un magasin, essayer un vêtement et là vous vous dites « yeah, très bien je veux cette belle chemise ! », et puis vous rentrez chez vous, vous vous regardez dans un miroir et vous réalisez qu'elle ne vous va pas, vous ne l'aimez pas, il faut bien en acheter une autre...

D'où vient le nom « Infadels » ?

Matt : Ce n'est pas un vrai mot, nous l'avons mal orthographié, un peu comme pour les « Beatles » et nous sommes d'énormes énormes énormes fans de Bob Dylan, qui a fait un album appelé « Infidels », et ce n'est pas un de ses meilleurs... Si nous nous étions appelés « Blonde on Blonde », nous aurions eu beaucoup trop de pression, imaginez la tête des médias ! (rires).
Bnann : Et puis la définition exacte d' « infidèles » est « non-croyant dans la religion, la société » : c'est un peu ce que nous sommes, mais nous voulions l'orthographier différemment parce que ce n'était pas non plus tout à fait exact. En plus on trouve tellement de « infidels » quand on tape ce mot sur Internet, en changeant juste une lettre au moins nous étions tranquilles avec la loi ! Et le classique « A » des Beatles évidemment... Matt : Oui «les infidèles » on en parle pas mal en ce moment... enfin bon, nous n'avons rien à voir avec Al Qaïda, hein. Bon ok, on a bien failli s'appeler « The Al Qaïda Beats » mais... non je déconne, n'écrivez pas ça, attention aux keys words !

Vos influences ?

Matt : nous sommes à fond dans l'electronica française à la Daft Punk et puis les bons groupes de rock garage, de blues... les White Stripes et les choses dans ce genre. On voulait faire un bon disque d'electro avec quand même un bon esprit rock n'roll. On voulait réunir tout ce qu'on aime... le hip hop aussi...
Bnann : Nous prenons beaucoup d'influences ailleurs que dans la musique. Les livres par exemple. Le premier morceau de l'album est inspiré d'un roman anglais. La vie quotidienne aussi. On absorbe tout. On aime les bonnes histoires, comme celles qu'on peut lire dans les journaux. On est vraiment fascinés par ça, et par les paroles idiotes dans le rock parfois, comme les Stones. Ca paraît tellement idiot que ça en est brillant au bout du compte ! Tout est valide, avec les Infadels on ne se pose pas de limites, contrairement à Balboa ou il fallait que les choses soient « comme ça et pas autrement ».
Matt : Nous travaillons sur une philosophie qu'on trouve chez Blur : « toujours construire son avenir ». Il faut garder tout ce qui existe et avancer avec ça.
Bnann : Nous aimons les chansons avant tout. Peu importe la forme que ça peut prendre.

De plus en plus de groupes electro utilisent des riffs de rock et de plus en plus de groupes de rock se laissent infiltrer par un peu d'electro, que pensez-vous de tous ces groupes ?

Bnann : ce qui est hilarant, c'est que dans Balbao c'est ce qu'on essayait de faire. Mais à l'époque les gens étaient encore puristes à ce niveau, si on voulait jouer de la techno dans un club, il fallait que ce soit strictement techno. Quand nous avons commencé les Infadels, tous ces groupes sont sortis, et tous ces clubs qui nous avaient jetés avant se sont mis à nous inviter !La Fabric etc... le plus drôle c'est que la techno au départ c'était quelque chose de complètement punk dans l'esprit !
Matt : oui c'est devenu un truc de « haute société », classe...
Bnann : et puis c'est redevenu quelque chose de punk avec ces mecs qui enregistrent un bout de guitare sur un vieux sampler. C'est ça la classe, c'est ce qui est bon dans la musique. Dès qu'on se limite, tout se perd.

Vous êtes signés chez Wall of Sound, qui a plutôt l'habitude de signer de l'electro, justement, comment s'est passé la rencontre avec le label ?

Bnann : Ils nous ont entendu, nous on suivi de près dans nos sets et on a commencé à construire une relation étroite jusqu'à cette soirée de folie où on a signé après une date à la Fabric. Nous étions en contact avec d'autres maisons de disques mais eux ont su comprendre ce qu'on voulait. C'est eux qui sont vraiment venus nous chercher, aucune major n'aurait eu la démarche qu'ils ont eue, ils ont agi avec ingéniosité...
Matt : tout le monde pense que Wall of Sound est un label de dance, mais en fait ils ont surtout un esprit très indépendant et varié, ils aiment la musique énergique, qui vibre, que ce soit de la guitare acoustique au beat, tout ce qui résonne.

Jagger 67 est à propos de Mick Jagger vraiment?

Bnann : Là où nous habitions, beaucoup de gens vivaient et faisaient tout pour ressembler à Mick Jagger. Ca m'a donné l'idée que la meilleure chose qui pourrait arriver serait de pouvoir entrer dans un pièce, et quand on en sort de l'autre côté, on pourrait être Mick Jagger en 1967 !Au top de sa forme, de ses meilleurs moments.

Vous connaissez le film « Being John Malkowitch » ?

Bnann : Oui c'est plus ou moins inspire de ce film justement! Dans cette chanson, un gars est persuadé qu'il est Jagger en 67, et dans le night club toutes les filles sont Martianne Faithfull. On voulait un peu se moquer du fait que, quelque part, on voudrait tous un peu être « Mick Jagger ». Et puis maintenant il a pris un coup de vieux, il a perdu un peu de sa crédibilité, mais à l'époque, quand on lit les paroles qu'il écrivait, la vie qu'il vivait, les chansons qu'il composait ! C’était le mec le plus cool de la planète en 1967. Aujourd'hui il est riche... c'est un peu désuet. Enfin voilà, on aime écrire des petites histoires bizarres comme ça.

Les paroles sont très importantes pour vous ?

Matt : Oui. Certains ne les comprennent pas, d'autres oui...
Bnann : Oui !Nous aimons ce qui est profondément émotionnel, ce qui est profondément abstrait (Williams Burroughs), ce genre d'imagerie, et aussi ce qui est un peu « bête » dans le bon sens… « in the face ».

Pourquoi avoir appelé l'album étrangement We Are Not The Infadels ?

Matt : Plusieurs choses. Tout d'abord parce qu'on trouvait ça plutôt marrant. Ensuite, tous les groupes sortent leur album « éponyme » : Franz Ferdinand, Kasabian... des centaines de groupes font ça mais pas nous ! C'est aussi inspiré par la peinture de Magritte : « Ceci n'est pas une pipe ». C'est brillant ! Ca résonnait par rapport à notre travail. Parce que nous faisons les choses légèrement de travers.

Comment décririez-vous votre musique ?

Bnann : du bon rock'n roll électronique, avec un peu de profondeur, un côté obscur...

L'album comprend d'anciennes chansons comme Can't Get Enough, ce sont de nouvelles versions ?

M : Oui, elles ont été produites par Jack Koonan qui a remixé Kasabian, The Kills... c'est la « magic touch » de notre album.
Bnann : Il est comme nous, il a compris ce que nous avions, a fait son boulot en nous comprenant, n'a rien enlevé, n'a presque rien ajouté, a travaillé dans propre studio. Il a sorti le son qu'on cherchait, voire meilleur.

Savez-vous combien de singles seront tirés de l'album ?

Matt : Oui, mais on ne le dira pas ! (rires)

Allez quoi, un scoop ?!

Matt : Ok, bon, « Cant Get Enough » pour commencer et après on verra bien... peut-être « Love Like Semtex » et « Girl That Speaks No Words » pour plus tard... c'est à voir.

Il y a une réelle différence entre votre musique sur album et vos lives, que préférez-vous ?

Matt : Les deux sont très importants de façon égale. Ce que nous chérissons et avons toujours voulu faire, c'est faire de bons disques, c'est crucial pour nous, quelque chose que tu peux mettre chez toi et sentir la magie... mais les deux sont égaux.
Bnann : Pour le live, c'est l'énergie, le visuel, l'expérience sonique, et pour le CD c'est une sorte de voyage émotionnel.

Vous avez déjà joué quelques fois en France à la Maroquinerie, au Furia Festival, aux Transmusicales de Rennes, à Lyon...

Bnann : Oui tous de très bon souvenirs...
Matt : Oui enfin sauf à Lyon, c'était une sorte d'amphithéâtre et quelqu'un est tombé du balcon, on ne savait plus quoi faire ! « on continue ? heeeeu ça vaaaa ? »

C'est punk !

Matt : oui ça a donné un petit côté trash mais pas de mort... on va faire ça à tous nos concerts tiens ! Mais sinon pour revenir au public français, on adore l'ouverture d'esprit ici. Les gens sont plus ouverts que chez nous, plus romantiques, la langue, les filles !
Bnann : Oui c'est un peu notre « maison spirituelle » ici parce qu'on a commencé avec la French electronica, alors pour nous jouer en France et être si bien reçu, c'est magnifique ! C'est le Graal ! Et on a pu constater que les festivals en France sont beaucoup plus variés que chez nous dans leur contenu.
Matt : Je suis un fan absolu de Jean-Pierre Jeunet : « Delicatessen », « les Enfants Perdus »... on aime les comédies noires de ce genre, les trucs un peu bizarres, comme dans notre « Jagger 67 ». Ca nous ressemble comme esprit. Et les bandes originales sont géniales !
Bnann : L'humour noir, l'imagination débordante me parait plus évidente ici qu'aux USA ou d'autres endroits d'Europe.
Matt : Pour la musique on adore Phoenix aussi comme groupe, Rhynocéroze aussi... nous avons plein de connections en France. Avant de rencontrer Wall of Sound nous étions en contact avec un label français : Discograph. Mais comme nous sommes anglais, il fallait qu'on soit sur un label anglais.
Bnann : Pour le rock on m'a dit que c'est difficile ici avec le problème de chanter en anglais ou en français...

Vous revenez nous voir bientôt ?

Bnann : Oui en France en mars ! On fait une tournée européenne. Et puis on est partis pour faire les festivals d’été.

Les Festival, c'est une approche différente du live ?

Bnann : Oui c'est effrayant, énorme. Tout à coup on s'est retrouvés au milieu de groupes professionnels et bien établis et c'est parti : « bon voilà à quoi pourrait ressembler notre vie ! Voyager, rencontrer du monde... », une expérience géniale ! En France on a même rencontré « Joe le Taxi », le vrai, un ami de Gainsbourg. CA, c'est rock n'roll.
Matt : avec tout ça, je me sens définitivement plus européen que jamais, à force de voyager, on comprend mieux, ça donne envie de tout apprendre, et ça inspire...