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The Heavy

Interview publiée par Johan le 24 novembre 2007

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En mêlant influences blues, soul, hip-hop et punk sur un premier album des plus surprenants, Great Vangeance and Furious Fire, The Heavy constituent une des surprises les plus détonnantes de ces derniers mois. Rencontre avec Swaby, membre fondateur et vocaliste des anglais...

Vous venez de publier votre premier album mais on ne vous connaît que très peu, est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur les origines du groupe ?

J'ai rencontré Taylor durant la période où je travaillais dans la distribution. On s'est rapidement découverts de nombreux points communs, comme l'art ou la musique mais aussi notre manière de vivre. Cela fait maintenant près de dix ans... Big Daddy Spence et Little Hannah Collins ont été recrutés il y a environ quatre ans pour renforcer le groupe alors que Chris Ellul, notre batteur, n'est arrivé qu'il y a six mois. Notre passion commune pour la saleté nous a rassemblés !

Votre nom à une connotation plutôt violente, les personnes qui ne vous connaissent pas pourraient penser que vous jouez du heavy metal ou de la musique hardcore... pourquoi l'avoir choisi ?

Le nom a été choisi par Taylor et moi qui sommes tous les deux de grans fans des films d'horreur des 70s... The Fog, The Brood, The Shining, The Rabid. Ce sont des titres courts mais très abrupts et durs d'une certaine manière, un peu comme le sont les riffs, beats ou même les paroles de la plupart de nos chansons.

Après dix années passées ensemble, Swaby et Taylor sont-ils indéniablement le coeur du groupe ?

C'est de cette rencontre qu'est née l'idée du groupe, ainsi que notre premier album qui est une introduction à la musique qu'on joue depuis quelques années maintenant. Je pense que d'une certaine manière on constitue effectivement le coeur du groupe du point de vue de la composition mais les autres musiciens sont tout aussi impliqués que nous... il est important de rester à leur écoute car les idées qu'ils nous soumettent sont aussi bonnes que les notres. A force de collaborer et de partir en tournée tous ensemble je pense que les idées de tous se sont rapprochées jusqu'à faire de nous une sorte de collectif.

La plupart de vos "amis" sur Myspace sont des bluesmen confirmés. Doit-on y voir là une influence majeure pour vous ?

Absolument ! C'est grace à Howling Wolf et Lightning Hopkins que nous sommes devenus ce que nous sommes aujourd'hui, sans eux l'idée de faire de la musique ne nous serait jamais venue. Nous leur devons clairement l'importance des riffs dans notre musique.

L'envie d'enregistrer des reprises de ces artistes, comme Lightnin' Hopkins, Muddy Waters, Howlin' Wolf ou Screamin' Jay Hawkins, ne vous a jamais effleuré l'esprit ?

Je ne pense pas qu'on voudrait enregistrer un album complet de reprises car actuellement on apprécie vraiment beaucoup de travailler uniquement sur nos propres chansons. Mais il ne faut jamais dire jamais, peut-être qu'un jour...

Selon toi, quelles sont vos influences principales d'un point de vue musical ?

Il y en a tellement que je ne pense pas pouvoir toute les lister... Je te propose plutôt une liste de chansons qui m'ont beaucoup marquées avec quelques commentaires personnels sur pourquoi elles me touchent tellement :

1. Give The Drummer Some (Ultramagnetic MC's) : c'est une chanson qui représente le meilleur du hip hop des 80s. Prodigy ont samplé ce morceau pour Smack My Bitch Up, sans doute parce qu'il possède un beat très puissant et un son de cor très sale. C'est vraiment l'une des meilleures choses qu'ait créée Kool Keith.

2. Get Behind The Mule (Tom Waits) : un morceau de country déstructurée avec la voix inimitable de Tom Waits. La phrase "I know they'll come looking for me" me hante sans cesse...

3. Judge Dredd (Prince Buster) : une chanson qui a marqué mon enfance. Mon père l'écoutait beaucoup, presque de manière religieuse tous les jours mais je suis heureux qu'il n'ait jamais adopté les principes de Judge Dredd.

4. Keep it to myself (Buddy Guy) : que dire sur ce titre ? Cette chanson résume à elle seule la musique de The Heavy avec un beat puissant, un piano omniprésent et un phrasé très spécial.

5. The Witch (The Sonics) : du pur punk garage des 60s. Le phrasé est tellement bon qu'il donne envie de crier à son tour une fois la chanson terminée !

6. Simply Beautiful (The Reverend Al Gree) : tout est dans le titre. J'ai voulu la mettre dans cette liste car le Reverend m'a énormément influencé dans ma manière de chanter. Sa voix dégage beaucoup d'émotion et de passion.

7. The Heat Of The Morning (David Bowie) : David Bowie sur une musique funk-folk-psychédélique. Il faut écouter ce titre !

8. Pity The Fool (Ann Peebles) : le cor de Mephis est une merveille sur ce titre produit par Willie Mitchell. La performance de Ann Peebles est incroyable sur ce titre, c'est vraiment le genre de chose qu'on aimerait explorer dans la suite de notre carrière.

9. Kilo (Ghostface Killer) : une collaboration entre Raekwon et le meilleur MC du Wu Tang Clan. Les textes sont très durs tout en conservant une certaine touche de sensibilité... du pur génie.

Ce n'est qu'une simple liste de chansons et d'artistes que j'aime mais je pense que cela peut donner une bonne idée globale de nos influences.

Ta voix est un paramètre essentiel de vos chansons, à quel moment as-tu réalisé ton don ?

Je n'ai jamais cessé de chanter depuis que je suis petit ! Je reprenais les chansons de Al Green, The Coasters, Frankie Lymon, Howling Wolf ou Screamin Jay Hawkins pour n'en citer que quelques uns mais j'ai décidé que le jour où je chanterais les chansons de mon propre groupe je deviendrais en quelque sorte un caméléon vocal capable de s'adapter à différentes choses. Je ne voulais pas m'enfermer dans un style en particulier.

La diversité de vos chansons est très souvent mise en avant, de quelle manière parvenez-vous à conserver un certain équilibre ?

Avoir des influences aussi variées que les nôtres est un atout plus qu'un handicap. On visite différents domaines en essayant de garder en tête ce qui est bon ou ce qui ne l'est pas au sein d'une même chanson. Je crois que de ce point de vue Taylor et moi sommes similaires par rapport à notre vision du groupe mais aussi de la vie en général. Peu importe si les gens ne parviennent pas à nous ranger dans une catégorie tant que notre musique est bonne.

N'a-t-il jamais été difficile pour vous de trouver votre place au sein de l'industrie musicale à cause de cela ?

Le problème au Royaume-Uni est que tous les labels semblent travailler dans l'optique de trouver un nouveau groupe à la mode et de créer des hypes chaque semaine. Le contenant est devenu plus important que le contenu et je trouve dommage que la musique soit secondaire. Le pire étant que lorsqu'un groupe parvient à percer en se différenciant du lot, dans les semaines qui suivent il y aura à coup sûr une dizaine d'autres artistes qui auront suivi cette voie. Je suis fier de dire qu'on n'a jamais cherché à suivre la mode pour être bien vus, on se contente de composer la musique qui nous plait.

Pourquoi avoir choisi de faire confiance à Counter Records/Ninja Tune ?

Tout s'est déroulé en l'espace d'une soirée. On avait donné un concert vraiment très bon à Londres, une performance que personne n'aurait pu prévoir de la part d'un groupe de mecs comme nous, et heureusement pour nous Peter Quicke, le propriétaire du label, était dans la salle. Il a demandé à nous rencontrer par la suite et connaissant sa réputation et ce qu'il nous proposait, on n'avait vraiment aucune raison d'aller voir ailleurs.

Votre premier album est disponible depuis quelques semaines, quand et comment son enregistrement s'est-il déroulé ?

Tout a été très long car il y a eu de nombreuses étapes. On commence parfois une chanson à partir d'une mélodie à la guitare acoustique, d'autres fois à partir d'un cuivre ou d'un beat électronique... il arrive même que ce soit une idée qui vienne du coeur qui serve de base au titre. La façon dont une idée est née n'a aucune importance, c'est la manière dont on transforme un détail initial en la chanson la plus réussie possible !

Je suppose que cette sortie est une étape très importante dans votre carrière ?

Après avoir composé ce qu'on a longtemps considéré comme de la bouillie, avoir la chance de trouver une maison de disque pour sortir un album et avoir la possibilité de développer ses capacités est une chose formidable. Alors, oui, cet album est clairement une étape très importante dans notre carrière.

Tu as produit ce disque, pourquoi ne pas avoir choisi une personne extérieure ?

Ce disque a été produit par l'ensemble du groupe. Rien n'était décidé sans que tout le monde ne donne son accord. Dans un premier temps on a logiquement cherché à établir le groupe mais on veut maintenant aller dans une voie plus expérimentale sans fixer de barrières. On fonctionne très bien de manière autonome et on n'envisage vraiment pas qu'une personne extérieure au groupe puisse venir afin de produire notre musique.

Quelle est la signification du titre de ce disque, Great Vengeance and Furious Fire ?

Au fil des années on a rencontré de nombreuses personnes qui nous ont proposées leurs services... mais qui au final tentaient d'attirer le groupe dans une voie qui ne nous convenait pas pleinement. On a toujours refusé de faire des choses qui ne nous plaisaient pas, on a évité tous les pièges et les déconvenues, et ce titre est en quelque sorte le testament de la période où nous étions devenus trop suffisants pour progresser.

Vous avez récemment donné un premier concert en France au Batofar de Paris, quel souvenir en gardez-vous ?

Ce fut un concert incroyable. On a vraiment senti une très bonne vibe ce soir là et cela nous a poussé à mettre le feu à la salle. Je croisque le public l'a perçu de la même manière et depuis notre seule envie est de revenir dans votre capitale pour recommencer !

Vous jouerez le mois prochain aux Transmusicales de Rennes, à quand une vraie tournée en France ?

On est impatients de pouvoir revenir car l'attitude du public européen vis à vis de notre musique est très positive, on sent une vraie volonté de découvrir ce qu'on veut offrir à ceux qui viennent nous voir. C'est très excitant de permettre aux gens de prendre du plaisir durant une soirée, d'autant plus quand on peut mettre la salle sans dessus dessous et marquer les esprits.