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The Irrepressibles

Interview publiée par Claire le 6 août 2010

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Il est bien difficile ces temps-ci d'obtenir une interview de Jamie Mc Dermott, flamboyant leader et directeur artistique de The Irrepressibles, tant le buzz autour de son groupe provoque un afflux surprenant de journalistes. C'est donc après la répétition générale, à la veille d'une résidence de trois jours au Palais Royal dans le cadre de Paris Quartiers d'Eté, que nous recevons la nouvelle tête de file de la pop orchestrale.

Je dois t'avouer que j'ai été très agréablement surprise par votre prestation de ce soir. Je ne savais vraiment pas à quoi m'attendre en arrivant et je dois bien reconnaître que ce spectacle est vraiment magnifique...

Merci beaucoup !

Quelle est la signification de tous ces miroirs sur scène et vos costumes (ndlr : L'ensemble des musiciennes de la troupe portant des « body porte-jarretelles » avec ailes dans le dos, Jamie étant maquillé en une sorte de Pierrot fou, lui aussi avec des ailes dans le dos) ?

Le symbole du miroir correspond vraiment à l'album et la plupart des titres parlent de réflexion, d'introspection, et en quelque sorte d'autocritique, d'auto-analyse, de catharsis. Le titre de l'album, Mirror Mirror correspondait tout à fait à ce miroir se réfléchissant dans un autre miroir, à cette réflexion, à ce narcissisme, à cette introspection, à cette recherche d'ego et à la réflexion sur le passé, tout ce qui m'est arrivé dans la vie et le poids des émotions. Avec ce spectacle que j'ai créé pour présenter l'album, j'ai essayé de rassembler une infinité de réflexions. La chorégraphie étant une manière de parachever la musique et le décor une manière de parachever la chorégraphie qui parachève la musique qui parachève le son. Voilà...

Quand as-tu réalisé que tu avais une telle voix ?

(rires) En réalité, j'ai toujours chanté très haut dans les aigus, depuis tout petit. Je me suis découvert une voix beaucoup plus puissante et rock à l'adolescence et j'ai continué en faisant de la musique. Un de mes professeurs nous faisait faire des gammes en cours quand j'apprenais le chant, et un jour elle m'a dit « wow » ! Elle s'était rendue compte que je continuais à chanter, et ce même quand elle montait dans les gammes plus aigües. Elle m'a aidé à comprendre comment présenter mon falsetto dans mon registre musical, comment se servir de mon visage pour en sortir cette voix et comment devenir une voix de tête. J'ai donc commencé à explorer ma voix. Cela rend très libre. Tu n'es plus restreint par les poumons, le torse et donc la voix va où elle veut. Cela m'a tout de suite plu car j'étais déjà assez androgyne... J'ai commencé à écrire ma propre musique et la musique elle-même m'a aidé à explorer ma voix. Ce n'était pas voulu au départ; ma voix allait là où elle voulait. Maintenant, j'écris pour l'orchestre de la même façon. Je chante les parties. Et c'est surprenant car la voix définit la nature de l'orchestre, ce que les musiciens jouent. La voix est un outil fantastique, c'est une vraie réflexion de l'esprit humain. Il y a encore tant de choses que je veux explorer avec...

Le groupe est composé de dix membres. Était-ce important pour toi de faire partie d'un projet impliquant autant de musiciens ?

Tout est venu au fur et à mesure. Les premiers Irrepressibles étaient un petit groupe. C'était en 2002 et nous faisions quelque chose de très dandy, dans un style beaucoup plus cabaret. Il y avait un piano, une basse, un violoncelle et un violon, c'était beaucoup moins orchestral. Puis le groupe s'est séparé après un concert mémorable en 2005, j'ai travaillé pour des chanteurs mais ils essayaient plus ou moins de me copier donc cela m'a mis en colère. J'ai décidé que j'allais donc écrire pour un orchestre et j'ai mis une annonce pour le monter... c'est comme ça que l'histoire a commencé.

Les gens adorent mettre les groupes dans des catégories. Comment définirais-tu donc le style de musique de The Irrepressibles ?

Hum... je ne sais pas trop. Certains disent que c'est « baroque-choc » mais ça ne définit qu'un seul titre, d'autres ont dit que c'est de la « pop de chambre » mais ça ne définit que quelques sons. C'est tellement de choses différentes. Pour moi, la musique est la musique. C'est l'expression d'un moment avec des instruments. Je travaille avec ces instruments et ils définissent eux-mêmes la nature du son, de la musique. Je laisse aux journalistes le soin de définir ma musique.

Comment as-tu choisi le nom du groupe ?

C'était en lien avec ce que je voulais faire. Je voulais pouvoir m'exprimer librement, je voulais faire de la musique qui ne serait pas restreinte par l'industrie musicale. Elle est si réduite, particulièrement en Grande-Bretagne, et je voulais créer quelque chose de nouveau, de totalement unique dans la pop. La folk et la pop me tiennent vraiment à cœur et je voulais transmettre ça à un grand nombre de gens, je ne voulais pas faire quelque chose d'élitiste mais essayer d'exprimer et d'explorer tout ce qu'on peut faire avec ces styles.

Quelles qualités faut-il pour être un musicien « Irrepressible » ?

Oh, un musicien Irrepressible ? Ils sont tous tellement magnifiquement uniques. Ils sont tous très différents. Ils doivent être irrépressibles (rires) ! Très libres, intéressants. Pour les qualités, je ne sais pas... ouverts, puériles, libres.

Qui compose les chansons? Es-tu le chef d'orchestre qui régit tout, des cordes aux instruments à vent ?

Oui ! Je m'assois, je mets en marche mon magnétophone et je joue ou chante... ou je fais du piano et j'orchestre tout en chant, en me disant par exemple « ça, ce sera le cor ». J'allume le micro et « papalalala » ou je chante la partie aux musiciens. Ensuite, je vois ce qui me passe par la tête...

Que peux-tu nous dire sur ce lieu dans lequel vous donné trois concerts de rang ? C'est un peu inhabituel pour un groupe...

C'est magnifique, c'est un rêve qui devient réalité. C'est vraiment exceptionnel ! Je suis tellement émerveillé. On vient de jouer à Lyon dans l'amphithéâtre Romain et c'était juste incroyable. Ici, ce sont les étoiles, le ciel, la lune. L'étoile Polaire est juste au dessus de nous. C'est le genre de lieu qui nous plait, qui est inscrit en nous. Ce lieu est irrépressible. C'est cette intimité, cette communion avec le public. C'est un lieu vraiment merveilleux pour ça.

Y a-t-il un endroit particulier où tu rêverais de jouer ?

On jouera prochainement à Modène, à l'opéra. Ça va être fantastique. Je suis en pleine écriture d'un nouveau spectacle que l'on proposera là-bas. A part ça, je ne sais pas trop. Quelle que soit la salle où l'on a joué jusqu'ici en Europe, ç'a été fantastique. Il y a beaucoup de pression pour que l'on fasse quelque chose de vraiment fabuleux et je me sens... comment dire... j'ai un sentiment de responsabilité vis-à-vis de cette attente et de cette pression.

A ton avis, pourquoi une grande partie de la presse s'enthousiasme autant pour The Irrepressibles actuellement ? La plupart des journalistes semblent vraiment ravis après vos représentations...

Je ne m'attends jamais à recevoir un accueil exceptionnel. Quand on a joué à la Cigale, à Paris, en novembre dernier, l'accueil m'a vraiment surpris. J'ai... comment dire... chaque spectacle est un moment durant lequel on essaie de communiquer avec des gens, avec un public, et il est difficile de communiquer quelque chose qui, du point de vue de la création, sort du cadre normal de la pop. Je m'inquiète donc beaucoup de ce que les gens pensent mais je dois être vrai, je dois être moi-même, aussi flamboyant que possible. Si on m'aime, c'est une bonne chose, sinon, c'est dommage. Je travaille du mieux que je peux pour livrer un spectacle qui me corresponde et qui plaise à un maximum de gens.