logo SOV

Monarchy

Interview publiée par Olivier Kalousdian le 13 novembre 2010

Bookmark and Share
Il y a, au 39 avenue de Wagram à Paris, un nouvel hôtel au design discret et très coloré. L’hôtel Renaissance accueille le nouveau chouchou du label Mercury, le groupe Monarchy. Monarchy, Renaissance... nul doute, nous sommes à Paris pour une interview masquée puisque nos deux protagonistes, bien qu'installés à Londres, n’ont pas d’identités déclarées, seraient apatrides et se cachent en permanence derrière des loups de dentelle remontant bien au-dessus de leurs têtes, façon Daft Punk au carnaval de Venise !

J’arrive en avance à l’hôtel et découvre les Monarchy en train de déjeuner, sans masques ! Je remarque deux jeunes hommes aux traits fins, brun et châtain, portant le même costume, la même chemise et le même regard surpris et embarrassé quand ils apprennent que je viens pour les interviewer ! Je suis convié à les rejoindre dans leur chambre où ils ont pu revêtir leurs masques pour une entrevue laconique mais joyeuse, en toute intimité.

Beaucoup de mystère entoure votre formation et vos personnalités. J’ai lu que vous vous étiez rencontrés via Internet et plus précisément via Google. Comment cela s’est-il passé ?

J’ai entendu la voix de Râ – l’un d’eux se fait appeler ainsi- sur Internet et j’ai aimé la musique qu’il proposait. J’ai alors googlé son nom...

Vous vous appelez Monarchy, vous êtes descendus à l’hôtel Renaissance... l’avez vous choisi exprès ?

Non bien sûr, c’est notre maison de disque qui l’a choisi (rires) !

Le nom du groupe a-t-il quelque chose à dire ou à démontrer à propos de la monarchie ? Notamment en Angleterre ?

Les gens se plaignent souvent de la monarchie comme si elle pouvait avoir une quelconque influence sur l’Angleterre, mais nous pensons que c’est juste une attraction pour touristes !

Vous vous êtes faits connaître via Myspace avec une image et un titre unique ; Vous vous êtes rencontrés grâce à Internet et pourtant, vous dénoncez les dérives de Twitter, Facebook et autres réseaux sociaux mettant à nue la vie des gens. N’est-ce pas un peu paradoxal ?

Ce que nous dénonçons, et ce pourquoi nous sommes derrière ces masques, ce sont les abus d’intrusions et d’expositions que génèrent Twitter ou Facebook. Aujourd’hui, on expose sa vie minutes après minutes sur le réseau en racontant au monde ou à un groupe choisi des détails qui n’intéressent personne et qui peuvent même rendre ridicules. De même pour le marketing à outrance ou les vitrines que certains magazines offrent à certains pseudo-artistes, nous nous en méfions énormément et restons toujours en retrait. Si le public a accès à votre linge sale ou votre intimité sur Internet, tout s’écroule et il n’y a plus de mystère entourant les artistes.

Parlant d’Internet, que pensez-vous des messages criminalisant les personnes téléchargeant sans payer musiques et vidéos ? J’imagine qu’en tant qu’artistes découverts grâce à Internet, votre avis est un peu mitigé ?

C’est une question très délicate à analyser et à répondre ; spécialement pour nous. Bien sûr, nous vivons des ventes de notre travail mais que dire à des gens qui ont grandi avec un outil leur permettant de naviguer sur des contenus, gratuits jusqu’à maintenant ? Il aurait fallu que les maisons de disques mettent en place dès le départ, un système de plate-forme performante et payante pour la musique. Aujourd’hui cela semble normal aux internautes de tout avoir gratuitement donc il est un peut-être un peu tard pour revenir en arrière. Mais si les labels mettaient en place aujourd’hui une plateforme aisée d’accès, peu chère, avec une qualité de fichiers au-delà du mp3, il y aurait sûrement des clients. D’ailleurs, les attitudes sont en train d’évoluer. Si j’entends une musique que j’aime et que je veux apprécier sur ma chaîne hi-fi, je vais acheter une copie légale pour avoir une meilleure qualité. Je pense réellement que les fichiers échangés sur Internet, iTunes par exemple, sont de trop faible qualité et que les jeunes générations ne se rendent pas compte de la perte qu’il y a comparé à un CD, pour ne citer qu’eux.

Je ne peux qu'acquiescer, mais lorsque l'on veut découvrir des jeunes groupes comme vous parmi les dizaines qui naissent tous les ans, Internet est un média puissant et facile d’utilisation. Malheureusement on ne va plus dans chez les disquaires, aidé par un vendeur compétent qui prendra le temps de vous faire écouter toutes les nouveautés...

Tu as raison. Internet est un bon média pour découvrir tout ce qui se fait. Les blogs commencent aussi à prendre le pas sur les radios ou les magazines pour offrir des médias beaucoup plus thématiques. La distribution s’en trouve également chamboulée. Plus de pressages, plus de plastiques… On ne parle pas assez du côté environnemental d’Internet (rires) !

Vous entretenez bien le mystère puisqu’il est impossible de connaître vos noms ou même votre pays d’origine. Certaines parutions disent que vous pourriez être canadiens, anglais et même français ! À moi qui vous ai aperçu sans masque, me donneriez vous la véritable histoire de vos origines ?

Ok, nous sommes nés en Australie (rires) !

Avez-vous une loi comme Hadopi en Australie ?

Nous ne savons pas. Nous ne sommes pas allés en Australie... depuis quelques années !

Et en Angleterre ?

En Angleterre, c’est illégal... mais, franchement, c’est un peu comme être un pompier se tenant devant une maison déjà en train de brûler. Que faites-vous ? Vous-vous jetez dedans ou vous essayer de le réguler ? Nous découvrons de nombreux groupes grâce à Internet et notamment sur Spotify. C’est ce genre de plateforme qui pourrait résoudre les problèmes de téléchargement.

Votre musique est une invitation au voyage à travers l’espace et la mélancolie. Êtes-vous des personnes tristes vivant sur une triste planète ou cela vient-il plus généralement de vos influences comme les Depeche Mode, Eurythmics ou A Flock Of Seagulls ?

J’aime l’idée d’une planète triste... Il est évident que le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui ne confine pas à l’optimisme et, pour nous, la mélancolie, dans la vie ou nos titres, agit comme une vraie thérapie.

En parlant de l’espace et des étoiles, comment en êtes-vous arrivés à jouer à Cap Canaveral pour un set retransmis en direct dans l’espace ?

Nous voulions faire quelque chose de vraiment spécial pour notre premier concert. Nous avons dit à Mercury, notre maison de disque, que notre premier show devrait être remarquable et nous avons pensé à cette idée parmi un tas d’autres, moins évidentes à réaliser. Nous leur avons dit « projetons notre musique dans l’espace ! ». La retransmission du show, plutôt que d’être dirigée directement vers un récepteur ou un satellite, a été envoyée dans l’espace, et l’idée que notre musique puisse voyager indéfiniment dans le vide nous plait beaucoup.

Cela n’a pas posé de problèmes à la NASA ou à Mercury ?

Aucun. Ils ont quand même dit non à certaines de nos idées, comme jouer nos chansons sans gravité ! Nous voulions faire un concert avec une gravité zéro, comme les entraînements d’astronautes dans les airbus 0G en invitant plein de journalistes en apesanteur. Mais cela aurait coûté 4 ou 5000£ par passager ! Donc ils ont refusé... peut-être qu’après quelques albums vendus, ils accepteront !

Comme d’autres cette année, j’ai été très emballé par la performance et les chansons de Marina & The Diamonds. J’ai beaucoup aimé le remix que vous avez fait d’un de ses titres. Est-ce une idée à vous ou à elle ?

Je pense que c’était une idée à elle. Nous étions à New York chez le label Neon Gold et elle aussi. Et je crois que c’est le label qui a fait la connexion. Nous restons en contact avec elle et nous projetons de faire quelque chose ensemble dans un futur proche. C’est quelqu’un qui a beaucoup de caractère et une forte personnalité.

Concernant les masques que vous portez et du mystère entourant vos personnalités cachées, cela n'est pas sans rappeler un groupe comme Daft Punk mais, pour ma génération, votre attitude mystérieuse, notamment sur scène, nous ramène à des formations comme The Residents ou Devo, même s’ils jouaient dans un registre plus « extrême ». Vous en êtes-vous inspirés ?

Je ne connais les Residents que depuis peu et parce que j’ai vu sur Internet que, eux aussi, portaient des masques. Mais, effectivement, d'un point de vue musical, la comparaison est extrême ! Nous avons plutôt été influencés par les Art Of Noise qui portaient eux aussi des masques à leurs débuts. Et puis, musicalement, nous avons grandement été inspirés par eux étant jeunes car ils utilisaient à merveille des machines électroniques et les samples de première génération dans des morceaux qui nous ont toujours fascinés.

Comptez-vous garder ces masques toute votre carrière ?

Oui. Oui. Nous avons été déçus quand les Art of Noise ont ôté leurs masques et encore plus quand ils ont voulu les remettre à un moment de leur carrière !

Vous pensez donc qu'il est est possible de les garder tout au long de votre carrière ?

Oui, bien sûr, regarde Daft Punk justement !

Dans ce cas je me considère chanceux de vous avoir aperçu sans masques au restaurant de l’hôtel !

Il n'y a aucune preuve photographique (rires) ! Et ceux qui nous voient sans masques d’habitude nous disent : vous n’êtes pas si moches. Pourquoi porter un masque alors (rires) ?

Vous semblez beaucoup aimer tout ce qui touche aux étoiles et aux galaxies, présentes dans vos clips et vos chansons... croyez-vous à la vie sur Mars ?

Oui, mais pas sur Mars...

Je pensais surtout à la chanson de David Bowie, Life On Mars !

Oh, j’ai raté le coche là (rires) ! Pour répondre sérieusement, je serais très surpris si nous étions seuls dans l’univers. C’est impossible ; physiquement, si l’univers est quasiment infini, il est impossible que nous soyons seuls. Savez-vous combien de galaxies nous entourent ? C’est juste inimaginable ! Il y a dû y avoir nombre de civilisations autres que la nôtre, nées avant même l’avènement des dinosaures sur notre planète. Ce serait un terrible gâchis d’espace si nous étions seuls dans l’espace.

Pour finir, je crois que votre album est en préparation pour le début de l’année prochaine ?

Il devrait sortir au début de l’année 2011 mais nous ne savons pas encore exactement quand...