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Metronomy

Interview publiée par Olivier Kalousdian le 11 avril 2011

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Je rencontre Joseph Mount chez Because music, label français ayant supporté Metronomy depuis ses débuts ; belle inspiration de la maison de disques fondée par un ancien de Virgin qui a eu le flair, l’inspiration ou l’opportunisme de faire signer des artistes à son propre nom plutôt qu’au nom de ceux qui l’employaient ! Justice, Manu Chao ou Charlotte Gainsbourg sont au catalogue de Because Music, c’est dire l’importance que ce label a acquis en quelques années seulement.

Au fond d’une charmante cour du 18ème arrondissement, dans des locaux Haussmanniens bénéficiant d’une terrasse verdoyante en rez-de-chaussée, j’attends mon tour pour rencontrer Joseph Mount. Celui-ci a commencé sa carrière en remixant à tout va et notamment des artistes non-autorisés comme Britney Spears et son célèbre Toxic et même U2.
Fatigué et les yeux rougis par une journée de promotion intinterrompue, Joseph nous reçoit avec le sourire, une cigarette roulée au coin des lèvres, accoudé sur le balcon d’où l’on peut presque sentir les émanations de l’Elysée Montmartre en train de se consumer lentement...

The English Riviera est votre premier album depuis que le groupe a changé de line-up ; en quoi cela a-t-il modifié ta façon d’écrire ou de penser la musique de Metronomy ?

Dans les grandes lignes et même dans les petites, j’ai toujours voulu voir une évolution arriver dans la musique de Metronomy. Développer ma façon d’écrire ou de composer et devenir un vrai groupe de scène avec batterie, basse, guitare... me donne aujourd’hui ces opportunités. En écoutant ce nouvel album, on sent qu’il n’aurait pas pu se faire avec notre précédente configuration, Oscar, Gabriel et moi uniquement.

Es-tu d’accord avec le fait qu’on qualifie ce nouvel album de plus pop que le précédent du fait de ce changement de membres ? Metronomy est-il un vrai groupe live maintenant ?

Je comprends pourquoi certains ont pu penser et écrire cela. Mais avec Nights Out, le précédent album, j’essayais déjà de faire de la pop music à mon sens. C’était un résultat que je trouvais déjà très catchy et, en plaisantant, nous pensions alors avec Oscar que nous nous étions déjà rapprochés du style pop de Britney Spears (rires) ! C’est donc amusant d’entendre ou de lire que ce nouvel album est encore plus pop que le précédent. Dans un sens, il est sûrement plus simple d’accès car les instruments ne sont pas tous synthétiques et facilement reconnaissables.

Peut-être que le fait d’avoir à une époque rassemblé trois claviers à la manœuvre pour tout jouer et remplacer toutes les sonorités rendait votre style plus froid que pour ce nouvel opus, The Englih Riviera ?

Émotionnellement, je ne pense pas avoir changé. Mais quand on utilise des ordinateurs, des loops et des claviers, on peut s’éloigner du côté chaleur humaine que les instruments traditionnels apportent. The English Riviera est, de ce point de vue, presque une caresse donnée avec beaucoup d’empathie, plus qu’une gifle qui te fait danser...

 

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Jusqu’alors, Metronomy entrait dans la catégorie des groupes électro-pop voire électro minimaliste ; penses-tu que ce nouvel album boxe dans une catégorie différente du fait de cette nouvelle configuration instrumentale et de ces nouvelles sonorités ?

C’est toujours le Metronomy du départ mais qui aurait subi une évolution logique, en tout cas pour moi. Je sais que les journalistes aiment mettre les groupes dans des petites cases stylistiques, ce qui est logique pour décrire une musique par les mots, mais je n’ai pas vu ce changement de style ; plutôt une évolution dans l’écriture et les envies de compositions qui sont enfouies dans mon inconscient.

Metronomy a toujours été très coté en France et notamment via Radio Nova qui l’a fait connaître. Comment vois-tu ce succès et cette surface médiatique que vous offre la France ?

Regarde autour de toi ! Nous sommes chez Because Music et c’est notre maison de disque... Mais cela vient également du fait qu’en Angleterre les gens ont plus de mal avec tout ce qui est électro pop. En Allemagne aussi nous avons toujours eu un très bon accueil et une surface médiatique importante. Peut-être que la France a plus d’histoire avec la musique pop, électro ou disco et que les groupes Anglais ont toujours bien réussi en France. Peut-être aussi que la France et Because Music ont flairé un bon talent avant les autres (rires) ?

The English Riviera, est-ce un lieu qui existe vraiment en Angleterre ? N’était-ce pas également un clin d’œil voulu à la French Riviera ?

La Riviera anglaise existe ! C’est une baie très jolie proche de la Cornouaille où un micro climat permet de faire pousser des palmiers et d’aller à la plage. Je suis originaire du Devon, proche de cette baie mais, pour l’Angleterre, le Devon c’est la campagne ! J’ai réalisé, il y a peu, que je vivais proche de ces plages et de cette station balnéaire vraiment agréable. On stipule souvent dans mes interviews que je viens de Devon mais je pense que la moitié des Anglais ne connaît pas cet endroit et que 90% des Français n’ont même jamais entendu parler du Devon et de la Riviera anglaise !

On pourrait penser à la French Riviera car ce nouvel album collerait parfaitement avec une soirée d’été sur la plage, à Cannes...

Je suis content que tu me dises cela car c’est exactement ce qui a motivé l’écriture et la composition de The Englih Riviera. Imaginer jouer ce disque sur une plage de France l’été ou sur n’importe quelle plage de la planète où la température est douce est quelque chose qui me plait beaucoup.

Les deux premiers singles, She Wants et The Look, sont-ils, à ton avis, les titres les plus représentatifs de cet album ?

Dans un sens, The Look est probablement le titre qui contient l’idée essentielle de l’album. Quant à She Wants, c’est la piste qui contient l’atmosphère que je voulais mettre dans ce nouvel opus. Mais je crois que We Broke Free, le second titre, est pour moi le titre le plus représentatif de The English Riviera. Quand le premier single de l’album est sorti, notre public s’attendait à une continuation de Nights Out dans le plus pur style électronique et ces trois titres ont donné le ton de notre nouvelle vision, dans la continuité, de la musique de Metronomy mais avec plus d’aération et de sonorités classiques.

Il se dit que tu aurais été grandement influencé, ou du moins inspiré, par l’écoute de Fletwood Mac et Steely Dan pour l’enregistrement de The English Riviera. Est ce vraiment le genre de musique que tu écoutais quand tu étais plus jeune ?

Pas tout à fait... Bien sûr, j’ai du entendre ces groupes dans la voiture avec mes parents et même les supporter à la maison (rires) ! Pour être franc, j’ai toujours détesté cette musique jusqu’à il y a deux ou trois ans. Je ne voyais pas ce que l’on pouvait aimer dans ces groupes. Petit à petit, j’ai compris le sens et les subtilités de ces chansons. Tu te rends compte que ces titres tu les connais par cœur et qu’ils ne t’ont jamais quitté. Je pense qu’il faut atteindre une certaine maturité pour accepter ce style de musique et reconnaître que, finalement, Fletwood Mac est un groupe génial !

 

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J’ose une comparaison ; The English Riviera m’est apparu comme un petit bonbon rose, pas trop sucré mais si goûteux que tu ne peux t’empêcher d’y revenir comme une petite addiction.Plus on le goûte et plus on s’en souvient. En tant qu’auteur de cette sucrerie, que penses-tu de cette métaphore ?

(Rires appuyés) Je dirais que j’ai une relation très personnelle avec toutes mes compositions. Avec Nights Out par exemple, je me souviens de toutes les journées où j’ai composé tel ou tel titre et ce que je faisais à ce moment-là. Pour The English Riviera, je sors d’une période où j’ai sûrement trop écouté et trop vécu au travers de ce nouveau travail et j’ai besoin d’un peu de recul pour l’apprécier à ta façon je crois ! Mais ce genre de compliments m’incite à réécouter The Look ou She Wants dans un autre contexte pour les redécouvrir.

Sur scène, vous jouez maintenant tous les sons live avec de véritables instruments. Est ce plus facile de programmer des machines et des loops plutôt que faire jouer ensemble les musiciens et tous ces instruments sur scène ? Comment s’est passée cette transition ?

Intéressante question ! Quand nous étions encore trois, nous ne pouvions pas vraiment jouer live et nous sentions parfois que nous trichions un peu avec notre public. Même avec Gabriel, qui a depuis quitté le groupe, nous avions émis l’idée d’avoir un vrai batteur avec nous et de mettre de côté les ordinateurs. Et nous sommes finalement passés de ce Metronomy qui utilisait toute cette technologie de remplacement à un Metronomy qui voit toutes ses sonorités jouées avec de vrais instruments. Et nous avons alors réalisé que même les groupes que nous pensions être de vrais groupes live utilisaient également des backing vocals et autres loops comme les Killers ou Coldplay ! Je me suis alors dit « Merde, pourquoi n’avons-nous pas continué à utiliser ces facilités ! » (rires).

Tu as commencé par faire de nombreux remixes avant de créer Metronomy. C’est un point commun que tu partages notamment avec Mark Ronson et, tous les deux, vous avez repris le Toxic de Britney Spears. En quoi cette chanson en particulier ou cette artiste sont-ils si envoûtants pour être si souvent repris ou remixés selon toi ?

Je pense que ce titre en particulier, quand il est sorti, était le premier titre pop de la cote est américaine vraiment excitant depuis longtemps. Sa mélodie et tout le reste étaient très novateurs et vraiment originaux pour de la pop musique qui se voulait très populaire. C’est la première fois que je réalisais que la pop musique pouvait être excitante et même meilleure que beaucoup d’autres groupes plus « sérieux » de l’époque.

Et peut-être à cause des paroles également ?

Je n’avais jamais pensé à cela avant, mais sûrement (rires) !

Ce matin, la salle de Élysée Montmartre a été détruite par un incendie à quelques encablures d’ici. As-tu déjà été dans cette salle légendaire fréquentée par Toulouse Lautrec et d’autres artistes du Paris du 19ème siècle ?

Oui, j’ai vu ça ! C’est étrange que tu me poses cette question car ma copine habite à quelques mètres de l’Elysée Montmartre et ce matin nous avons été parmi les premiers à voir les flammes et la fumée s’échapper du toit de la salle. Ma copine était si triste... Nous avons eu quelques cas d’incendies dans des salles reconnues en Angleterre et, souvent, il se trouvait que l’incendie était criminel ! J’espère que personne n’a mis le feu à cette salle qui renferme tant d’histoire. C’est triste en tout cas.

Vous avez récemment joué à Brest aux Nuits Zébrées de Radio Nova. Comment s’est passé ce concert ?

C’était une expérience très amusante ! Les entrées sont gratuites aux Nuits Zébrées et, entre chaque groupe qui se succédait sur scène, les gens fumaient des tonnes d’herbe. L’air était si chargé que nous étions nous aussi presque défoncés ! Quand nous avons commencé notre set, toute la salle était enveloppée dans une atmosphère épaisse et très « happy » (rires) !

Quelles seront les prochaines échéances pour Metronomy en France ?

Nous rejouons ici en mai pour cinq ou six dates, notamment le 4 mai à la Cigale si je ne trompe pas. Je suis très excité car nous serons alors en tournée en Europe pour plus d’un mois ce qui est une première pour nous.