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Dry The River

Interview publiée par Fab le 6 mars 2012

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Il y a près d'une année jour pour jour, Dry The River publiaient leur premier single officiel, New Ceremony. Aujourd'hui, alors que sort leur album Shallow Bed, les cinq anglais semblent en passe de partir à la conquête du monde. Rencontre avec une formation toute aussi attachante que brillante...

Le public français vous connaît peu mais vous êtes pourtant déjà des habitués des scènes parisiennes...

Peter : Je crois que nous avons déjà joué quatre fois à Paris. En première partie de Foster The People à la Flèche d'Or, à la Boule Noire avec Dog Is Dead pour le Festival des Inrockuptibles et aussi avec The Antlers au Nouveau Casino. Lors de notre première venue, nous avions donné un concert en acoustique dans un appartement ! Ce soir, c'est donc notre cinquième fois ici...
Scott : Jouer à Paris est presque devenu une habitude !

Pouvez-vous m'en dire plus sur l'histoire du groupe ?

Scott : Nous jouons ensemble depuis 2009, soit un peu moins de trois ans. Peter est à l'origine de la formation de Dry The River qui n'était au départ qu'un projet de studio pour lequel il cherchait différents musiciens.
Peter : C'était un nouveau projet à l'époque mais nous avions déjà tous joué dans d'autres groupes, principalement punk ou hardcore. Au fil du temps, il nous a semblé plutôt logique de nous produire en live et c'est ainsi que Dry The River est devenu un groupe à part entière. A trop vouloir jouer une musique différente de celles de nos anciens groupes, nous nous contraignions au départ à évoluer dans un style très calme et acoustique. Petit à petit, nous avons accepté notre passé et exploité l'héritage de nos anciennes formations.
Scott : Je pense que le regain d'énergie dans notre musique est progressivement apparu dès lors que nous avons joué devant un public. Depuis deux ans nous avons donné des dizaines de concerts au Royaume-Uni ou en Europe, c'est ainsi qu'est réellement né Dry The River selon moi.

Quelles ont été vos influences principales pour Dry The River ? Le folk et le punk sont deux genres souvent opposés...

Peter : Durant ma jeunesse, ma mère me faisait souvent écouter des chansons de Leonard Cohen, Paul Simon et d'autres artistes de la même époque. Lorsque l'idée de fonder Dry The River m'est venue, je suppose que j'avais envie d'explorer cet univers, cette nouvelle forme de songwriting qu'un groupe de punk ne m'aurait jamais permis d'approcher. Si notre rencontre s'est avérée aussi productive, c'est parce que nos goûts sont très différents. Nous écoutons toujours régulièrement du punk, du métal ou du rock progressif ou même de la country pour Matt !
Scott : Notre background musical nous a certainement rapprochés à un moment donné mais la variété de nos goûts nous a permis d'évoluer vers ce que nous sommes aujourd'hui.

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Peter, à quel moment as-tu réalisé que ta étais capable de chanter des chansons folk ?

Scott : Lorsqu'il faisait encore partie de son précédent groupe, il ne faisait que crier (rires) !
Peter : Il y a quelques années maintenant, durant ma jeunesse, il m'arrivait d'aller chanter à l'église, j'avais donc conscience depuis longtemps déjà que j'étais capable de m'adapter à ce nouveau style musical. J'ai développé cette capacité en écrivant des chansons pour Dry The River, le plus dur était de parvenir à trouver les bonnes harmonies. Dans un premier temps j'étais le seul à chanter puis Matt s'est lancé aux chœurs et Scott en a fait de même lorsqu'il nous a rejoints. Nous avons vite réalisé que la combinaison de nos voix fonctionnait au delà des espérances initiales.

Votre musique est souvent comparée à celle de Mumford And Sons ou Fleet Foxes, est-ce une bonne ou une mauvaise chose de votre point de vue ?

Scott : Nous apprécions leur musique mais nous n'avons jamais cherché à engendrer ces comparaisons. Nous n'avons pas attendu que certains journalistes nous rapprochent pour travailler les harmonies vocales ou la façon dont sonnent nos instruments. Pour prendre l'exemple de Mumford And Sons, nous ne possédons pas un univers folk aussi marqué que le leur, ce style musical ne faisait pas partie initialement de notre background. Ce n'est pas gênant d'être comparé à des groupes comme eux, c'est même plutôt flatteur et encourageant compte-tenu de leur réussite.
Peter : Avant que les gens ne viennent nous voir en concert, le violon, les mélodies et les harmonies vocales à trois font que la comparaison avec Fleet Foxes prend un certain sens. Sur scène, je pense que notre musique prend ses distances avec ces artistes. La guitare électrique, la puissance de la batterie et l'aspect rock de nos prestations font que nous avons des choses très différentes à offrir. Je comprends ces rapprochements, ils ne me dérangent pas, mais je crois qu'au final nos concerts font que nous sommes un groupe très différent.

Depuis plusieurs mois maintenant, la presse vous présente comme l'un des groupes à suivre à 2012. Avez-vous ressenti plus de pression à la suite de cela ?

Scott : D'une certaine manière, oui. Cela nous a fait nous poser des questions sur la manière dont notre album allait être perçu et accueilli lors de sa sortie. Le point positif dans tout cela est que notre album était déjà enregistré lorsque cet emballement médiatique est apparu, nous ne pouvons donc plus qu'attendre et voir comment les choses vont évoluer pour nous. Même si cela engendre une certaine inquiétude, il faut que nous profitions au maximum du moment présent et des tournées à venir. Il est préférable de laisser toute cette pression de coté et nous concentrer sur notre musique, c'est au final grâce à elle que nous pourrons nous en sortir.
Peter : Cette pression ne va rien changer à l'album au final. Je suis plutôt confiant car il contient majoritairement des chansons que nous jouons ensemble depuis quelques années, des chansons que nos fans connaissent et apprécient. Même si nous n'avons aucunes certitudes, je pense que cet album va plaire à ceux qui nous suivent depuis un certain temps. Nous n'avons pas procédé à des changements majeurs pour enregistrer l'album. Finalement, le fait que la presse s'intéresse à nous depuis quelques mois est plutôt encourageant, cela montre que nous sommes sur la bonne voie.

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Vous avez été beaucoup sollicités par des maisons de disques l'année passée avant de choisir RCA...

Scott : Nous avions dans un premier temps choisi de sortir New Ceremony, notre premier single, chez Transgressive Records puis de voir comment les choses allaient évoluer. Nous avons ensuite été contactés par différents labels, et même si l'aspect financier était évidemment important pour nous, notre choix s'est avant tout porté sur des personnes avec lesquelles nous nous sentions en phase. C'est ce qu'il s'est passé lorsque nous avons rencontré l'équipe de RCA. D'autres labels avaient formulé des offres financières plus importantes mais ce n'était pas le critère principal.
Peter : L'argent joue bien sûr un rôle important pour un groupe mais il y a certains aspects négatifs que nous avons voulu éviter. Si des personnes investissent des sommes importantes, il existe en retour un besoin de réussir commercialement parlant. De la pression tout simplement...
Scott : Avec RCA, nous conservons un contrôle total sur tous les aspects créatifs. Nous décidons avec quel producteur travailler, dans quel studio aller et nous choisissons nos artworks. Je ne pense pas que nous aurions pu avoir les mêmes libertés avec d'autres labels.

La plupart des chansons figurant sur l'album ont été écrites et jouées en live pendant des mois. Cela a-t-il rendu l'enregistrement plus facile ?

Scott : Lorsque nous sommes entrés en studio, nous avions déjà une idée très précise de ce à quoi l'album allait ressembler. A l'exception de deux chansons que nous avons composées à cette époque, le reste de l'album était pour ainsi dire prêt. Tout est allé très vite dès lors que l'enregistrement a débuté, il ne fallait souvent qu'une seule prise pour la plupart des instruments. Après avoir joué des centaines de fois certains titres, nous savions exactement ce qu'il nous restait à faire et comment le faire.

Etait-il évident pour vous de conserver vos anciens singles sur l'album plutôt que d'essayer d'écrire de nouvelles chansons ?

Peter : Nous en avons discuté, notamment par rapport au fait que nous disposions au final de plus de chansons qu'il n'en fallait pour l'album. La genèse du disque s'est écoulée sur près de huit mois avec des sessions en studio de temps à autres et quinze jours d'enregistrement à proprement parler. Nous prenions les compositions les unes après les autres et nous avons donc eu tout le temps nécessaire pour étudier la question. En y réfléchissant, il y aurait été dommage de laisser de coté nos premiers singles, notamment parce que beaucoup de personnes n'auraient jamais eu la possibilité de pouvoir les écouter sur un disque. Ces éditions limitées sont dures à trouver désormais et lors de nos concerts le public aurait sans doute été perturbé en découvrant des chansons absentes de l'album.

L'enregistrement s'est déroulé dans le Connecticut avec Peter Katis, qu'a-t-il apporté à votre musique ?

Peter : Nous avons envisagé plusieurs noms mais nous l'avons contacté en raison du travail qu'il a produit pour Interpol ou The National. Lorsque nous sommes allés dans son studio situé au premier étage de sa maison dans le Connecticut, le cadre nous a semblé parfait pour enregistrer cet album. C'est un producteur capable de s'adapter au groupe avec lequel il collabore. A aucun moment il n'a cherché à nous faire changer notre façon de travailler, il nous apportait simplement son aide pour mener les chansons là où nous le souhaitions. Nous ne voulions pas rendre les chansons trop pop ou adoucir le disque, c'est un point qu'il avait parfaitement intégré. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais il est capable d'orienter les musiciens et de prodiguer les bons conseils. Il sait exploiter les outils à sa disposition pour faciliter la tâche du groupe. Lorsque le mastering du disque a débuté, l'ingénieur du son était surpris de la qualité des enregistrements, il ne restait plus qu'une poignée de retouches à effectuer pour que l'album soit achevé.

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Family Tree, un des titres de l'EP Weights & Measures, est présent à la fin de l'album sous la forme d'une piste cachée. Pourquoi ce choix ?

Scott : A cause de la durée de l'album... Sans ce titre, il dure déjà près de quarante-huit minutes, ce qui semblait plutôt long à notre label ou notre manager. Dans un premier temps nous avons donc décidé de supprimer une chanson, à savoir Family Tree, mais il nous est venu l'idée de la cacher à la fin du disque afin de satisfaire tout le monde.

Le disque s'achève donc officiellement sur Lion's Den, la chanson avec laquelle vous achevez vos concerts depuis longtemps déjà...

Peter : C'était une évidence. Nous la jouons en dernière position chaque soir et il aurait été vraiment étrange qu'elle n'achève pas également l'album. Aucune autre chanson n'aurait été plus adaptée pour finir le disque, d'autant plus que la nouvelle version enregistrée possède un final allongé. Il y a du violon, des cuivres et une montée en puissance qui se prêtaient complètement à ce choix.

Pourquoi avoir choisi le titre de Shallow Bed pour nommer l'album ?

Peter : Animal Skins était initialement intitulée Shallow Bed, c'est une expression tirée des paroles de la chanson. Ce titre est cohérent avec l'artwork de l'album qui représente un requin. Nous aimons beaucoup cet animal, et plus encore après avoir vu la peinture qu'un artiste avait créé pour nous afin d'en faire la pochette. Le choix du titre de l'album et de ce visuel est directement lié au groupe : si le titre possède une certaine connotation folk, le requin représente le coté plus dur que notre musique peut dégager. Cet alliage représente en quelque sorte l’ambiguïté entre ces deux univers. L'aspect plus sombre de notre musique.

Vous êtes récemment partis en tournée avec Bombay Bicycle Club ou The Antlers, qu'avez-vous retenu de ces expériences ?

Scott : Comment faire la fête (rires) !
Peter : Avec Bombay Bicycle Club, nous avons découvert ce qu'est la vie d'un groupe très populaire. Nous avons joué chaque soir devant des milliers de personnes avant de terminer la tournée dans la salle de la Brixton Academy à Londres. Nous n'avions jamais joué dans des lieux pareils ! Nous avons appris beaucoup de choses sur la vie d'un groupe en tournée, comment tout est organisé lorsque tu es très populaire. Nous n'étions pas habitués à vivre ce genre de choses. Actuellement, lorsque nous donnons un concert, nous installons nous-mêmes notre matériel pour jouer chaque soir, nous n'avons pas une dizaine de roadies à nos côtés pour s'occuper de tout à notre place. Je pense que d'une certaine manière cela nous a permis d'entrevoir ce que nous espérons vivre un jour nous aussi.
Scott : Avoir un plus grand bus par exemple (rires) !