logo SOV

Eagulls

Interview publiée par Amandine le 2 mars 2014

Bookmark and Share
Salle de restaurant de l'Espace B, entre un poulet à la normande et une pinte de bière, les sales gosses de Leeds, Eagulls, se sont plongés avec nous dans les débuts de leur groupe, quelques anecdotes avec les forces de l'ordre et sont revenus sur leur quotidien, entre leur boulot dans de grands magasins, la tournée promo et les concerts.

Comment le groupe s'est-il formé et comment vous êtes-vous rencontrés ?

George : Nous étions à Barcelone, à un festival, j'ai rencontré Liam et Mark on s'est dit qu'on devrait monter un groupe ensemble. Après ça, ils ont commencé à écrire des morceaux et à répéter. Au bout de quelque temps, ils m'ont demandé de chanter dans leur groupe. C'est une histoire assez banale finalement !

Pendant quelques mois, il n'y avait pas de chanteur au sein du groupe...

Liam : En effet, nous répétions sans chanteur et nous nous étions dit que ça pourrait être sympa d'avoir un groupe qui jouerait de la musique instrumentale. Malheureusement, nous avons constaté que ce que nous composions paraissait fade sans chant. Nous avons contacté George pour lui proposer de faire quelques essais avec nous. Ça ne devait pas être évident car nous avions déjà des morceaux et nous lui avons demandé de poser des paroles là-dessus. Finalement, après quelques réglages, nous avons réussi.

Ce qui a été génial dans cette histoire, c'est qu'il a compris d'emblée notre musique, on était sur la même longueur d'ondes.

Vous avez eu la chance d'être signés très tôt sur Partisan Records, ce qui, je suppose, vous a pas mal aidés. Comment cela a-t-il été possible ?

Mark : Nous avons rencontré Tim, du label, et il était simple, pas prise de tête et nous avons rapidement constaté qu'il était bourré de talent. Ce qui a été génial dans cette histoire, c'est qu'il a compris d'emblée notre musique, on était sur la même longueur d'ondes. Il n'a pas essayé de nous forger selon une certaine image ; il aimait juste ce qu'on faisait. Il arrivait le matin avec une boîte de donuts et on bossait. Il nous donnait des conseils, nous disait ce qu'il aimait. C'était vraiment cool de travailler avec un mec comme lui. On lui faisait écouter les chansons déjà prêtes pour l'album...

Vous aviez donc déjà le matériel pour l'album quand vous l'avez rencontré ?

Mark : Oui.
George : Oui, nous avions déjà les chansons quand on l'a rencontré au SXSW. Il n'a pas voulu changer ce qu'on lui a fait écouter, il ne nous a pas dit d'un air narquois « Ouais, je vais voir ce que je peux faire de ça ». Il croyait en nous, en notre musique.
Mark : On a bu quelques verres avec lui...
Henry : C'était un test qu'on lui a fait passer en fait. Et il s'en est bien sorti ! On a bu des verres, on était bourrés et là, on s'est dit « Ouais, c'est un mec bien ». (rires)

C'était donc important pour vous de travailler avec des personnes qui, humainement, vous plaisaient ?

Henry : Oui, complètement !
Mark : C'est même plus une histoire de confiance que d'aimer cette personne. On devait savoir que l'on pouvait travailler avec lui sans qu'il ne nous dise sans cesse ce que nous devrions faire. C'est ce qu'on a préféré avec Partisan, qu'ils nous fassent autant confiance alors qu'ils ne nous connaissaient finalement pas beaucoup.
George : Beaucoup de labels auraient envoyé quelqu'un d'administratif qui serait venu, serait reparti avec les démos en nous disant « Oui, je vais envoyer ça à mon patron pour savoir ce qu'il en pense ». Là, nous avons bossé comme une équipe et Tim est toujours venu lui-même.

Vous sentiez que ce n'était pas que pour les affaires...

Mark : Oui, c'est ça. Ce n'était pas que pour produire un nouveau petit groupe qui, potentiellement, pourrait leur rapporter de l'argent. On sent bien que chez Partisan, ils aiment ce que l'on fait, ce sont des passionnés, comme nous en fait ! C'est rare de nos jours qu'un mec d'une maison de disques vienne vous voir jouer et après le concert, vous dise « J'ai adoré votre live, je veux qu'on bosse ensemble et que vous sortiez des disques avec moi ».

Vous sentiez qu'il voulait collaborer avec vous parce qu'il était tombé sous le charme de votre son un peu rugueux ?

Mark : Oui, il avait l'air aussi passionné que nous. Passionné par le son, les détails, la façon dont nous nous comportons pendant nos concerts.
George : Nous avons vu des photos de lui pendant qu'il regardait nos premiers lives et il a l'air totalement absorbé, c'est génial pour nous.

Nous avons bien voulu jouer le jeu des singles mais il était hors de question que nous réarrangions nos chansons pour en faire des versions single, ça ne nous correspondait pas du tout.

Vous avez donc été totalement libres pour l'album, le choix des singles ?

Mark : L'album était déjà quasiment bouclé (écrit, je veux dire, il restait des arrangements à faire, bien évidemment) et nous avons su qu'il sortirait en mars 2014. Nous avons bien voulu jouer le jeu des singles mais il était hors de question que nous réarrangions nos chansons pour en faire des versions single, ça ne nous correspondait pas du tout. Nous avons pu tout choisir, de la pochette aux vidéos...

Vous ne vouliez inclure que des morceaux inédits pour cet album car on n'y trouve aucun morceau qui était déjà sorti auparavant ?

Liam : Il y a une chanson qui est finalement assez vieille mais qui figure sur l'album. Nous l'avions enregistrée très rapidement à l'époque, sans vraiment réfléchir à la direction qu'on aurait aimé qu'elle prenne. Nous l'avons donc réarrangée.
George : Nous pouvions nous permettre de le faire car elle n'était jamais sortie sur un label professionnel. On sentait qu'elle avait un potentiel qui n'avait pas été exploité dans la version que nous en avions faite à l'origine. Pour l'album, nous voulions vraiment quelque chose d'inédit et pas une compilation de ce que les gens connaissaient déjà.

Vous avez tourné avec Parquet Courts...

Liam : Oui, mais pas pour beaucoup de concerts. On devrait normalement tourner à nouveau avec eux en Angleterre.

Comment étaient ces deux premiers concerts avec eux ? Explosifs je suppose puisque vous êtes deux groupes qui partagez ce goût du noisy !

Liam : C'était super, vraiment très très bon. Ils sont vraiment très populaires et c'était génial d'avoir la chance de jouer devant un tel public. Nous avons beaucoup en commun, ce qui fait que le public a eu l'air d'apprécier notre musique, même s'il n'était pas venu pour nous. C'était génial.
George : Moi je t'avoue que je ne pourrais pas t'en dire grand-chose car ça n'a rien changé pour moi. Quand je suis sur scène et que je commence à chanter, je suis comme transcendé et je ne me rends pas du tout compte de ce qui peut se passer autour de moi.

Vous parliez de popularité : vous commencez à jouir d'une bonne presse, notamment grâce à votre formidable single, Nerve Endings ; ça change quelque chose dans votre quotidien ou vous avez toujours vos jobs alimentaires ?

George : Nous continuons à bosser, oui.

Ce n'est pas un peu compliqué de tout gérer ? Surtout avec l'album qui arrive et la promo à assurer...

Liam : Pour te donner un exemple : nous sommes aujourd'hui à Paris et demain en Allemagne et c'est tout. Nous n'avons pas pu nous permettre de partir plus de deux jours, c'est impossible. Nous aimerions nous dire que la musique compte plus que tout et tout envoyer en l'air mais honnêtement, c'est impossible, il faut bien que l'on paie nos factures ! Du coup, on doit jongler avec nos congés. Quand l'album sera sorti, on verra comment ça marche et si nous pouvons nous permettre de faire autrement mais là, on n'a pas d'autre choix que d'assumer une double vie.

L'album n'est pas encore sorti et aucun lien d'écoute n'a encore été disponible. Comment le qualifieriez-vous ?

George : C'est super difficile comme question, il faut qu'on réfléchisse à une réponse si ça revient dans une autre interview ! (rires) Je dirais que c'est une collection de chansons pour ados rebelles. Il y a un côté très brut et industriel, comme dans des branches du punk.

Justement, on pourrait qualifier votre musique de punk ou post-punk ?

Mark : Je crois que c'est ce qui se rapproche le plus de ce que nous faisons.
Liam : On devrait dire « after punk », mais je ne sais pas si ce terme existe...

Dans l'esprit, on rejoint beaucoup le punk et les mouvements s'y raccrochant.

Je pense que l'on peut tout inventer quand il s'agit de styles de musique...

George : On peut penser que tout ce qui a été fait après 77 est de l'after punk. Plus sérieusement, je ne sais pas ce que nous sommes mais dans l'esprit, on rejoint beaucoup le punk et les mouvements s'y raccrochant.

Les vidéos en disent finalement peut-être plus sur vous que les mots : vous avez réalisé le vidéo clip pour Nerve Endings, avec une cervelle de porc et apparemment, il vous est arrivé quelques péripéties !

Liam : On avait l'idée de filmer la détérioration de la cervelle de cochon, dans notre cave, chez nous. Un voisin a commencé à sentir de drôles d'odeurs et a appelé la police alors que nous n'étions pas à la maison. Des agents de police sont venus et ont dû se demander ce qu'on pouvait bien fabriquer avec ça. Je suis rentré du boulot et j'ai halluciné, je me suis demandé pourquoi il y avait la police chez moi.
Tom : Nous avions été absents pour quelques jours donc je suppose que la cervelle commençait à sérieusement se décomposer et que ça puait chez les voisins.

Quel message peut-on voir au travers de cette vidéo visuellement assez forte ?

George : C'est en rapport direct avec les paroles. Nerve Endings parle d'anxiété, du fait de réussir à passer outre ses angoisses. Mark et moi avons pensé qu'illustrer ça par la décomposition d'un cerveau reflétait le cercle vicieux dans lequel on est submergé quand on est débordé par l'anxiété.

Une dernière question : qu'avez-vous prévu pour ces prochains mois ?

Liam : Nous allons prendre un peu de vacances pour Noël ! Certains d'entre nous bossent dans des magasins et la période de fin d'année est très chargée dans le commerce donc nous allons beaucoup bosser. Je sais, ce n'est pas très glamour, ça n'a même rien à voir avec la musique, mais c'est notre quotidien pour le moment.
George : Nous avons aussi quelques concerts de prévus, notamment à Londres, ce qui nous permettra de bosser encore plus sur nos morceaux. Ensuite, il y aura l'album...