logo SOV

The Lovegods

Interview publiée par Fab le 8 octobre 2004

Bookmark and Share
Révélés par un concours de nouveaux talents remporté en Angleterre, le plus français des groupes anglais était de passage à Paris la semaine dernière pour un concert à La Scène. Rencontre avec Art et Déah, leaders naturels de la formation.

Est-ce que vous pouvez me raconter votre rencontre à tous les deux ?

Art : Ca date d'il y a environ 7 ans maintenant à Saint-Germain-des Prés. J'étais au bar du marché en train de boire tranquillement un café et Déah est arrivée. Elle s'est assise à une autre table, a commandé à boire puis a sorti sa guitare pour jouer de la musique aux passants afin de gagner un peu d’argent. A ce moment j'ai entendu sa voix et j'ai été scotché, c'était incroyable. En partant je lui ai donné une pièce et je lui ai aussi laissé mon numéro en lui proposant de venir chez moi pour enregistrer quelques chansons dans mon studio. Elle est donc venue mais trois ou quatre jours plus tard elle devait partir pour Londres car elle venait d'Australie et elle venait de retrouver son passeport qu'Eurostar lui avait perdu quelques temps auparavant. Elle est donc venue me voir la veille de son départ et notre petit duo a tellement bien fonctionné qu’elle a décidé de rester à Paris. On a écrit beaucoup de chansons tous les deux pendant environ un an puis on a décidé de partir en Angleterre pour former un groupe.

Vous vous êtes donc installés à Brighton ?

Art : On a commencé par vivre à Londres et un an plus tard on a décidé de partir pour Brighton.

Comment avez-vous trouvé le reste du groupe ?

Art : On a rencontré notre batteur, Rob, il y a environ trois ans. Il vient de Londres, Hackney pour être précis, mais il a depuis déménagé à Brighton avec nous. On a également trouvé notre bassiste à Londres il y a quatre ou cinq mois mais il nous a aussi rejoint à Brighton depuis.

Pourquoi avoir choisi de vous appeler The Lovegods ?

Art : C'est une bonne question mais je pense que Déah répondrait mieux que moi. On a choisi ce nom parce que pour nous ça avait deux significations. Je ne sais pas s'il existe une bonne traduction en français, mais quand tu entends le mot Lovegods en anglais ça peut vouloir dire les playboys, les apollons... mais ça peut aussi être compris comme les adorateurs de Dieu, ceux qui sont là pour le glorifier, l'aimer, faire de la musique en son honneur. On aimait bien le fait que ce soit un jeu sur ces deux significations car dans les deux sens on obtient quelque chose qui répond à notre musique.
Déah : Art a bien expliqué, mieux que moi en français. En fait je préfère ne pas expliquer ce genre de choses si les gens ne comprennent pas par eux-même. C'est rare qu'ils voient le second sens de notre nom mais c'est le plus important pour moi.

Comment est-ce que vous travaillez pour composer vos chansons ?

Déah : Ca dépend des chansons. Parfois il y a des paroles qui nous viennent à l'esprit ou alors Art me joue une mélodie qui me plait et je trouve des paroles après. Dans la majorité des cas on trouve les paroles quand quelqu'un du groupe joue quelques notes mais il arrive aussi qu’on écrive chacun de notre coté.
Art : En fait les paroles nous viennent rarement avant la musique. On commence par chercher une mélodie et les paroles naissent ensuite naturellement de ça, elles viennent se greffer dessus. Il est très important pour nous qu'il existe un lien entre ces deux éléments, on ne peut pas les détacher.
Déah : La saveur de la chanson vient de la musique et ça suggère souvent...
Art : ...oui voilà, si une chanson est énergique, alors les paroles vont être adaptées au rythme.

Vous avez des inspirations particulières quand vous écrivez ?

Déah : Les paroles sont très particulières pour moi mais je n'aime pas trop expliquer de quoi elles parlent. J'ai besoin de voir comment les gens comprennent ce que j'écris, comment ils voient ça, mais si j'explique le thème tout de suite ça bloque les idées des gens.
Art : On a souvent des chansons avec différents niveaux d'interprétation mais beaucoup sont très variées. Certains morceaux vont juste raconter une histoire, par exemple celle d’une voiture ou quelque chose de plus léger, et d'autres vont être beaucoup plus forte et parler de sentiments, du fonctionnement du monde, des réactions des gens.
Déah : Très souvent il y a trois ou quatre significations à certaines choses pour moi, et parfois quand je chante une chanson j'en découvre de nouvelles. Je me souviens de ce à quoi je pensais quand j'ai écrit la chanson puis de la façon dont je la vois une fois sur scène.
Art : Plus tu joues une chanson plus tu en ressens l'essence, à chaque fois ça s'approfondit. Enfin pour moi nos thématiques sont très variées par rapport à d'autres groupes pour lesquels c'est très précis. On n'est pas politiques mais on fait beaucoup de chansons d'amour, qu'elles soient directement écrites pour une personne ou pas.

Lorsque vous êtes arrivés en Angleterre vous avez signé sur une major mais vous les avez rapidement quittés, qu'est-ce qu'il s'était passé ?

Art : On avait signé un contrat avec Island Records, même si on ne peut pas vraiment dire que les choses se sont mal passées. Au moment de notre signature nous n'étions pas encore prêts mais la maison de disque était en pleine réorganisation administrative et budgétaire...
Déah : ...ils voulaient aussi tout de suite quelque chose de très pop mais nous on avait des chansons qui exprimaient très bien ce que nous étions. Quand on a décidé de travailler avec eux nos morceaux n'étaient encore qu'acoustiques, et quand ils ont été plus développés ils voulaient certaines choses et nous d'autres... ça n'a pas marché.

Il y a quelques mois vous avez remporté le concours organisé par Radio 1 qui vise à élire le meilleur groupe non signé d'Angleterre. Vous vous attendiez à aller si loin dans cette compétition ?

Art : Non non, c'était assez étonnant ! Au départ on ne savait même pas qu'on avait été sélectionné car c'est la petite amie de notre batteur qui nous avait inscrit sans rien nous dire. Au bout de quelques mois elle nous a dit qu'on figurait parmi les six groupes sélectionnés par le jury alors que près de huit mille avaient postulé !
Déah : Au début Art a cru que c'était une farce et que Radio1 voulaient juste se faire de la pub !
Art : C'est vrai que je me disais que Radio1 essayaient d'être bien vus en prenant des groupes indépendants et en parlant un peu d'eux mais c'était complètement faux ! Une fois sélectionnés avec les 5 autres groupes, on passait à l'antenne pendant une semaine avec nos chansons, on faisait des sessions acoustiques... et un groupe était éliminé chaque jour. On était déjà très contents d'être sélectionnés mais petit à petit on s'est aperçus qu'on n'était pas si mauvais... et on est allés jusqu'au bout. Ce sont les gens qui nous ont élus avec leur vote, et il faut savoir que Radio1 en Angleterre c'est plusieurs millions d'auditeurs, un peu comme Europe 1 ou NRJ en France.

Concrètement ça vous a apporté de nouveaux contacts ?

Art : Non même pas ! Ca nous a surtout donné une plus grande popularité, nos concerts attirent plus de gens. Grace à cette expérience on peut se permettre de prendre nos temps vis-à-vis des maisons de disques, mieux comprendre comment toute cette industrie fonctionne. On ne veut pas signer immédiatement sur un gros label pour qu'on parle de nous partout et qu'on sorte immédiatement des disques, on préfère chercher un label qui aime notre musique telle qu'elle est et qui nous aidera à réussir, même sans nous donner de gros moyens. On préfère avancer à notre rythme.
Déah : On a décidé d'exclure un peu l'industrie musicale de la création de notre album. Ca fait déjà longtemps qu'on clame notre indépendance et on ne veut pas aller démarcher des maisons de disques pour un contrat.
Art : L'industrie anglaise tourne sur elle-même, elle ne va pas chercher de nouveaux groupes, elle préfère être démarchée par les formations. On est arrivés à un niveau où on remplit des salles de 500 places en Angleterre, plein de gens nous suivent mais les maisons de disques nous ignorent un peu. On n'a pas de manager pour les contacter.
Déah : Je me souviens avoir demandé un jour à un magazine pourquoi ils n'avaient jamais parlé de nous et on m'a répondu que chaque jour des dizaines de groupes les contactaient pour avoir un article, ce qu’on n’a jamais fait ! On ne veut pas pousser les gens à s'intéresser à nous, on préfère que les gens qui aiment notre musique nous aident à réussir.
Art : On laisse les choses se faire petit à petit plutôt que de faire beaucoup de promotion et ça marche ! On ne veut pas perdre nos racines, on fait notre musique et on laisse la bouche-a-oreille nous aider à percer. C'est mieux que d'avoir des affiches partout, des pubs télés...

C'est la raison pour laquelle vous avez sorti votre premier album par vous-mêmes ?

Art : Oui tout à fait !
Déah : C'est vrai mais ça vient aussi du fait que ce n'était qu'un mini album composé de deux anciens EP. On a voulu se débrouiller tous seuls.
Art : On n'avait pas de moyens, pas de studio mais maintenant qu'on donne des concerts un peu partout on commence à gagner un peu d'argent et on va pouvoir louer un studio pour l'enregistrement du second album. On travaille actuellement dessus et il devrait sortir en début d’année prochaine.
Déah : Petit à petit on va chercher un label pour le distribuer mais on ne veut pas qu'on nous paye avant de l'enregistrer. On va d'abord le terminer et si une maison de disque aime le résultat, alors ils pourront le distribuer.
Art : On aura surtout besoin d'aide pour tout ce qui concerne la promotion, c'est beaucoup d'argent et beaucoup de travail.

Où est-ce que vous en êtes dans l'enregistrement de ce second album ?

Art : On a prévu d'enregistrer 12 ou 13 chansons. On commence par la batterie et la basse en général mais on garde aussi parfois quelques prises de guitare si elles sonnent bien. Pour le moment il y a un morceau presque fini et deux autres sur lesquels on bosse ces temps-ci. On se donne jusqu'à décembre ou janvier pour terminer le travail.

Vous n'avez encore jamais fait de tournée en France, jusque quelques concerts à Paris ?

Art : Oui on a déjà joué à Paris, ce soir c(est la troisième fois qu(on vient. Là encore on compte sur le bouche-à-oreille pour ramener du public.
Déah : C'est comme quand on a commencé en Angleterre, il devait y avoir dix personnes à nos concerts. Mais petit à petit les gens qui venaient ont ramené des amis à eux et maintenant on est arrivés à 500 personnes ! C'est génial. Ici c'est pareil, ça va prendre beaucoup de temps, surtout que Paris est une grande ville et qu'il y a plein de choses à faire ici la nuit.

Pour finir, voilà le questionnaire Sound Of Violence, quels sont vos ... préférés ?
Groupe

Art : Hmmm... moi je peux dire pour Déah... Pink Floyd.
Déah : Oui je crois.... entre Pink Floyd, Led Zeppelin, le Velvet Underground et les Beatles. Et toi ?

Chanson

Déah : Il y en a trop, des milliards... mais j'adore les paroles d'Hallelujah de Leonard Cohen.
Art : Paint It Black des Rolling Stones. Je repense aussi au groupe The Police, ils ont été un peu oubliés ces dernières années mais c'était un super groupe. Sinon il y a aussi Fast Cars de Tracy Chapman, et Jacques Brel pour la chanson française qui est une référence absolue au niveau des paroles.

Film

Art : Moi je dirais Brazil de Terry Gilliam, c'est un film qui m'a vraiment beaucoup touché. American Beauty pour toi Déah ?
Déah : Je ne sais pas si je le garde comme film préféré après toute la publicité qu'il y a eu autour. La première fois que je l'ai vu il était totalement inconnu et c'est toujours mieux de voir un film sans avoir lu de commentaires dessus avant.
: Sans que ce soit mon film préféré j'ai beaucoup aimé Le Village. J'adore cette vision poétique du cinéma.

Endroit préféré pour donner un concert

Art : Moi je dis Brighton. C'est là qu'on a grandi depuis plusieurs années, on a nos premiers fans là-bas. Ils connaissent les paroles, ils chantent avec nous, ils bougent avec nous... c'est génial. On avait aussi fait une première partie au Barrowlands à Glasgow, une salle de 5000 places, et c'était extraordinaire.

Equipe de foot

Art : Je suis pas très football en fait. Quand tu fais de la musique et que tu pars en tournée tu n'as pas trop de temps libre. La Coupe du Monde je regarde mais mon intérêt pour le football s'arrête là.