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Hollow Hand

Interview publiée par Yann Guillo le 28 mars 2018

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Sortis de nulle part, Hollow Hand sèment depuis quelques mois dans leur sillage de fabuleuses chansons aux délicieuses effluves 60s. Point d'exercice de style pourtant ici. L'art de la mélodie sinueuse et de l'arrangement folk baroque sont, chez Max Kinghorn-Mills, des langues bien vivantes. Nous avons voulu en savoir plus sur ce groupe inespéré, cousin anglais des Fleet Foxes, Midlake ou Eliott Smith, qui ressuscite avec superbe l'âge d'or de la pop britannique.

Comment présenterais-tu Hollow Hand à quelqu'un qui n'a jamais écouté ta musique ?

Max Kinghorn-Mills : Je pense que ma musique s'inspire principalement des groupes que j'ai découverts quand j'avais une vingtaine d'année. Il y a du British Folk, des groupes de la fin des années 60 et des années 70. Certains me disent qu'ils entendent du Syd Barrett ou des influences américaines avec beaucoup d'harmonies : The Byrds, Neil Young, Crosby, Stills, Nash And Young... J'espère surtout que cela donne un résultat original, sinon quel intérêt ?

Tu es le compositeur, chanteur et guitariste. Y a-t-il d'autres membres permanents ?

Max Kinghorn-Mills : Sur disque, Hollow Hand ça a toujours été Chris Crusoe, à la batterie, et moi. Nous avons été rejoints par Pan Andrs en studio pour notre nouvel album. Depuis, nous faisons tout à trois. Pour le live en revanche, le line-up varie. Des amis musiciens se joignent à nous à l'occasion. Nous jouons tous dans les groupes des uns et des autres, selon les besoins. En ce moment, nous nous en tenons à quatre personnes sur scène car c'est le maximum pour pouvoir continuer à nous déplacer pour les concerts !


Après un premier album de psych-folk, vous venez de sortir trois singles beaucoup plus pop. Qu'est-ce qui a fait évoluer ta façon de composer ?

Max Kinghorn-Mills : Je pense que les limites de mes obsessions personnelles ont été atteintes avec mon premier album. Notamment quand j'avais prévu d'enregistrer des solos de tournebout, cet instrument à vent de la renaissance. Le joueur de tournebout n'a heureusement jamais donné suite. J'ai enregistré chaque note de Ancestral Lands seul, dans ma chambre, en racontant en chansons les pérégrinations des pèlerins (ndlr : « Pilgim's progress »). C'était difficile pour moi de poursuivre dans cette veine fantasy en gardant ma contenance car les autres membres du groupe sont dans toute autre chose ! Mais c'est positif. Je laisse volontairement évoluer la musique pour explorer de nouvelles directions.

Votre nouvel album, Star Chamber, devrait sortir prochainement. A quoi faut-il s'attendre ?

Max Kinghorn-Mills : Star Chamber sortira cet été je pense. Je ne suis pas encore certain du label qui s'en occupera, mais tout est prêt. L'album sonne plus compact que le premier. Il y a aussi des influences plus groove, inspirées de Curtis Mayfield notamment. Grâce à Pan Andrs et Atlas Shrugs, la production est d'un tout autre niveau que sur le premier album. C'est vraiment par nécessité que j'avais enregistré et mixé seul Ancestral Lands.

Vous enregistrez tout dans votre propre studio baptisé Cosmic Ocean. Pourquoi ce choix ?

Max Kinghorn-Mills : Hollow Hand n'a jamais publié de chanson enregistrée dans un « vrai » studio. Nous avons eu une expérience à Abbey Road. Mais, à part regarder des photos des Beatles, nous n'avons pas vraiment passé un bon moment. Je trouve que les aspects techniques peuvent être intimidants et frustrants. J'ai grandi en enregistrant ma musique dans ma chambre et j'ai encore du mal à voir les avantages à enregistrer ailleurs. Je trouve que tout ce qui interfère avec la concentration sur la musique elle-même est négatif. L'enfer pour moi, c'est une personne debout devant un clavier Nord, qui joue un do à l'infini en essayant toute la banque de sons du synthétiseur.

Comment s'est passé l'enregistrement de Star Chamber ?

Max Kinghorn-Mills : J'avais composé et écrit tout l'album, puis j'ai présenté les démos des chansons aux autres. Nous les avons rejouées à trois, expérimenté et ré-arrangé chaque morceau. Nous avons ensuite fait les prises de batterie sur un enregistreur à bande et avons construit le reste de l'album à partir de là. Ça nous a pris beaucoup de temps. Peut-être que je raconterai un jour tout en détails, dans la version deluxe repackagée de l'album s'il y en a une ! Notre toit avait des fuites, une des portes ne voulait pas rester fermée. Chaque nuit, à la fin des sessions, nous devions prendre le temps de ranger tout notre matériel, pour éviter qu'il prenne la pluie. Comme tous les groupes, nous avons aussi beaucoup appris les uns sur les autres. Et nous avons probablement testé toutes les variations possibles des plats végétariens à base de riz.


J'aime beaucoup le graphisme de vos derniers singles et votre logo énigmatique. Tu t'occupes toi-même de tout le design et réalises tes propres vidéos. Est-ce qu'il y a une dimension visuelle à ta musique ?

Max Kinghorn-Mills : Quand j'étais petit à l'école, je trouvais des tas de noms de groupes et je recouvrais mes cahiers de logos que j'inventais. Cet emblème pour Hollow Hand est inspiré de l'héraldique. Il y a toujours une très grande part d'inspiration visuelle dans mon processus de composition. Quand j'écris, j'ai souvent des images en tête. Je trouve l'inspiration dans la peinture, les films, les livres fantasy. Je réalise aussi toutes les vidéos du groupe moi-même, en total DIY. La façon dont je travaille est proche du travail d'animation de Terry Gilliam au début des années 1970. Je fais tout à la main. C'est un très long processus. Ma trajectoire semble être de devoir rester caché dans ma chambre pendant des mois, à découper des photos sous ma lampe de bureau en écoutant des podcasts sur Final Fantasy.

Sur une vidéo publiée récemment, on peut te voir jouer avec Tim Smith, l'ex-chanteur de Midlake. Comment en es-tu arrivé à travailler avec lui sur son mystérieux projet Harp ?

Max Kinghorn-Mills : Tim est un bon ami depuis environ quatre ans. Je lui avais envoyé un email pour parler de musique. Nous avons réalisé que nous avions beaucoup en commun et avons échangé sur nos parcours respectifs. Il a décidé de venir à Brighton pour essayer des choses avec Harp. Nous avons travaillé sur plusieurs chansons avec Pan Andrs. Tim vit un voyage épique et hautement émotionnel avec Harp. Les chansons sont magnifiques. Malheureusement, nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour travailler ensemble cette fois-ci. Mais j'étais simplement heureux de pouvoir l'aider comme je le pouvais. Jouer sa musique chaque jour était une expérience incroyablement inspirante pour moi. Il n'y a pas beaucoup de projets qui soient aussi spéciaux que celui-ci. Il sait que je serai là quand le temps sera venu.


Tim Smith mis à part, qui sont tes compositeurs préférés ? Est-ce qu'il y a un artiste ou une chanson qui t'a donné envie de jouer et de composer ta propre musique ?

Max Kinghorn-Mills : Syd Barrett est sans doute l'un des artistes les plus importants pour moi. Sa musique m'accompagnera toute ma vie. Enfant, je regardais en boucle une copie VHS d'un documentaire de 1991 « The Year Punk Broke ». Ces musiciens m'ont donné envie de jouer dans un groupe. C'est plus tard que je me suis intéressé au vrai songwrtiting, en découvrant Neil Young, Robyn Hitchcock, The Band ou Joni Mitchell. J'adore aussi la façon dont chante Nic Jones, de The Incredible String Band. C'est toujours amusant de faire des listes, mais c'est un très vaste sujet...

Où puises-tu ton inspiration ? Comment trouves-tu de la poésie et de la magie dans ce monde matérialiste et autotuné ?

Max Kinghorn-Mills : Les années passant, mon esprit s'est constitué une bibliothèque vitale d'artistes qui me donne ce sentiment magique que je ressentais plus jeune, ce rush d'inspiration pure. Quand je me sens vide face au monde ou que je ne trouve plus aucune émotion dans la musique, alors je lis de la poésie, je regarde les chefs d'œuvre d'Ingmar Bergman, je me plonge dans un documentaire sur l'art d'Andrew Graham-Dixon ou je vais me promener sur la plage de Brighton. On peut toujours trouver l'inspiration si on se donne la peine de chercher. Pour ma part, je suis toujours en train de chasser.

Quelles sont les prochaines étapes pour Hollow Hand ?

Max Kinghorn-Mills : J'ai déjà composé la plus grande partie de notre prochain album et travaille actuellement sur des démos. J'aimerais commencer à enregistrer dès que possible, mais je voudrais d'abord avoir une vision claire de nos différentes options. Peut-être que nous essaierons à nouveau d'enregistrer en studio, je ne sais pas encore. Je finis juste par ailleurs la vidéo de notre nouveau single Blackberry Wine. Je suis vraiment content du résultat. Je travaille aussi avec Chris Crusoe sur de nouvelles et très belles chansons de Holly Macve, une musicienne de Brighton.