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Soft Play

Interview publiée par Pierre-Arnaud Jonard le 18 septembre 2018

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Avec leur troisième album, Acts Of Fear And Love, sorti en août dernier, Slaves prouvent qu'ils sont définitivement l'un des meilleurs groupes anglais actuels. Un disque qui voit en outre le groupe s'ouvrir à de nouveaux horizons musicaux. Une bonne occasion d'échanger avec Laurie Vincent, de passage à Paris, avant leur concert au Trabendo à Paris le 29 octobre prochain.

Quand vous avez commencé à enregistrer Acts Of Fear And Love, Dans quel état d'esprit étiez-vous par rapport à Take Control ?

On voulait faire ce nouvel album de manière plus réfléchie. Sur Take Control, on a fait les choses à l'instinct. Là nous voulions prendre plus notre temps pour l'élaboration des morceaux.

L'album est typique de Slaves mais il y a aussi des titres qui sonnent différemment de votre son habituel. Je pense à Daddy par exemple. De quoi parle le morceau, du fait d'être père ?

Non, cette chanson parle de la crise de la quarantaine. On a voulu mettre ce morceau au milieu de l'album parce qu'il est calme et apporte une respiration au disque. Pour moi, un disque se doit d'être comme le cheminement d'une journée, avec les différents états d'âme que tu peux traverser 24 heures durant.

Photo Opportunity aussi est différent...

C'est le premier morceau que nous avons enregistré pour l'album et c'était une bonne indication de ce vers quoi nous voulions aller.

Vous pensez à faire des choses encore plus diverses à l'avenir ?

On n'exclue jamais rien. On aime des tas de choses : des trucs acoustiques à la musique électronique. On ne veut pas être enfermé dans quoi que ce soit.

Le disque garde malgré tout un esprit punk. Est-ce le punk qui vous a influencés à la base ?

Oui, pas seulement pour la musique mais également pour l'attitude. On écoutait les Clash, Crass, Billy Childish, et aussi des trucs garage comme les Oh Sees.

Est-ce que vous essayez de recréer en studio la folie de vos live ?

Clairement. Je pense que c'est sur scène qu'il faut nous voir. On a effectivement voulu recréer sur ce disque la folie que nous avons en live. On a toujours voulu sonner en studio comme on sonne en concert même si c'est parfois difficile. Surtout au niveau des guitares. Mais on tente toujours de retrouver en studio la dynamique du live.

En live, il y a un côté hypnotique dans vos performances...

C'est exactement ce qu'on recherche.

Pourquoi avez-vous enregistré l'album en Belgique ?

On a commencé à l'enregistrer en Angleterre mais il y a eu un problème par rapport à l'heure de fermeture du studio. On a un peu paniqué car cela nous a fait perdre du temps sur l'enregistrement mais au final cela a été bénéfique parce qu'à Bruxelles, on pouvait se concentrer uniquement sur la musique. Il n'y avait pas la tentation d'aller boire des coups avec les potes. En plus, le studio ICP est vraiment un super studio.

Comment un duo arrive-t-il à faire tant de bruit ?

Des années de pratique !

Que signifie le titre de l'album, Acts Of Fear And Love ?

C'est contre le sentiment de haine qui tend à se développer de par le monde. C'est à propos de la période difficile que nous vivons, du Brexit à Trump. C'est politique d'une certaine manière. On a envie que les gens s'interrogent sur le monde qui les entoure.

Vous vous considérez comme un groupe politique ?

Oui, de la même façon que pouvaient l'être The Clash qui jouaient de la bonne musique avant d'être politique.

Les morceaux du nouvel album le sont ?

En partie, oui. D'autres sont des observations, d'autres encore parlent de ce qui nous arrive dans la vie de tous les jours.

Le climat actuel en Angleterre favorise la rage qu'il y a en vous ?

Il y a toujours eu des trucs merdiques en Angleterre, de Thatcher au Brexit. Cela est positif pour faire de la musique bien énervée, c'est vrai. Mais après il est important d'être joyeux, malgré tout.

Avez-vous été énervés par la polémique née il y a quelques années sur le fait qu'un groupe de blancs ne puisse se nommer Slaves ?

Nous n'avions pas compris cette polémique car nous transmettons un message de joie avec des choses positives. C'était hors propos mais comme tu le sais une partie de la presse anglaise n'aime que les gossips...

Que signifie cette pochette étrange ?

On voulait être sur la photo de pochette du disque mais pas de manière classique. On y voit mon fils. C'est une photo qu'on peut trouver un peu trash mais elle est honnête.

Est-ce important pour le groupe d'avoir classé tous ces albums dans le top 10 des charts britanniques ?

Ça ne l'est pas tant que cela mais ça fait plaisir. C'est agréable.

N'êtes-vous pas surpris d'être sur une major par rapport à la musique que vous jouez ?

Je trouve intéressant d'être un groupe radical et d'être signé sur une major. J'ai l'impression qu'il y a un vrai retour du rock avec des groupes comme IDLES ou Shame, deux groupes que nous aimons beaucoup. Cela fait vraiment plaisir de faire partie de cette vague. Je pense qu'eux comme nous arrivons au bon moment. Les gens veulent de nouveau entendre des choses un peu bruitistes.

Vous avez sorti trois albums en six ans. Vous êtes prolifiques ?

Assez mais moins que les groupes des années 60. Les Beatles sortaient trois albums par an...

L'album est court. Vous aimez ce format ?

Oui. Je trouve que c'est le temps parfait pour les gens pour écouter un album. C'est rare qu'ils puissent avoir plus de trente minutes devant eux. Si un disque dure plus longtemps, ils risquent de passer à autre chose, ou de ne plus être seulement dans l'écoute du disque.

Vous jouerez en France bientôt ?

Oui, au Trabendo à Paris et à Nantes. On est heureux de revenir jouer chez vous. Le public français a toujours été très enthousiaste envers le groupe. Et en plus, Paris est l'une de mes villes préférées au monde.