logo SOV

Django Django

Interview publiée par Laetitia Mavrel le 9 février 2021

Bookmark and Share
Django Django nous reviennent en ce début d'année avec un nouvel album Glowing In The Dark faisant figure de potion magique contre la morosité ambiante. Le maître des claviers, Tommy Grace, a bien voulu nous répondre sur l'état d'esprit du groupe en cette période troublée et revenir sur le parcours de l'une des formations electro pop les plus sophistiquées.

Ce nouvel album, Glowing in The Dark, paraît trois ans après Marble Skies, soit votre rythme de sortie depuis vos débuts, quelle régularité ! Est-ce que la composition de ce disque a été impactée par la pandémie ?

En fait, j'ai l'impression de n'avoir jamais cessé de bosser depuis Marble Skies ! Il y a eu quand même des différences dans notre façon de travailler. Principalement du fait que nous sommes maintenant éloignés les uns des autres. J'habite à Glasgow, Jimmy est à Margate, Vince habite à deux heures de Londres... Nous nous sommes vraiment concentrés un maximum lorsque nous étions réunis. Nous avons alors jammé et répété intensément tous les quatre, quand nous avions plus de temps et de facilités à nous retrouver en studio. L'écriture s'est pas mal faite chacun de notre côté. La méthodologie a donc évolué mais pas notre musicalité qui gravite toujours majoritairement autour de l'électro.

L'album est composé de morceaux particulièrement festifs et rayonnants, son titre Glowing In The Dark fait-il référence à la dure période que nous traversons en ce moment ?

Quand nous avons composé le disque, la pandémie n'était pas encore installée et nous n'étions pas encore enfermés. Pas mal de nos chansons qui sont pourtant antérieures au virus sonnent juste de part leur titre et leur univers. On a peut-être fait ça inconsciemment ! En tout cas, en décembre dernier, sortir la chanson Glowing In The Dark nous a paru parfaitement approprié.

Est-ce qu'à un moment vous avez été tenté d'en modifier le contenu, étant tous affectés par l'ambiance du moment ?

Nous disposions d'entre vingt et vingt-cinq chansons avec lesquelles construire cet album, c'est la première fois que nous avions autant de matière. Mais la sélection s'est faite lors du confinement. Du coup, bien que les titres soient restés intacts, le choix du tracklisting a forcément été influencé par la situation.

Une très bonne sélection ! J'ai trouvé dans ce disque la même énergie que celle que j'avais ressenti en découvrant votre premier album Django Django en 2012. C'est incroyable de se dire aujourd'hui que vous avez plus de dix ans de carrière. Que penses-tu de ton évolution depuis lors ?

Quand nous avons débuté, nous n'étions plus si « jeunes » (rires) ! Nous avons commencé vers la fin de la vingtaine, je bossais dans le design, Vince état architecte... donc déjà une culture musicale bien ancrée. On a progressé avec le temps, et nous étions aussi plus exubérants car encore amateurs à l'époque. Ça me fait penser à un mug que ma femme a dans la cuisine, ça dit « les amateurs ont construit l'Arche (ndlr : de Noé, semble-t-il) , les professionnels le Titanic ». J'aime cette idée que lorsqu'on débute on ne réfléchit pas à tout et que le résultat fonctionne malgré cela. En plus, quand on se ré-écoute, on se dit qu'on aimerait changer ça, qu'on n'aurait jamais fait comme ça aujourd'hui. Et bien c'est une très bonne chose (rires) ! On se pose trop de questions maintenant sur le type de batterie ou de microphones qu'on va utiliser... Mais l'expérience acquise est une bonne chose également.

D'ailleurs, aujourd'hui, il existe un « son » Django Django, reconnaissable à la première note. Le résultat de cette expérience acquise ?

Nous avons mis du temps à trouver notre musicalité, surtout s'agissant du chant. On passe des heures et des prises à travailler les chœurs ou un solo de guitare, ce qui a été très laborieux lors du premier album d’ailleurs. Aujourd'hui on sait pertinemment ce que l'on cherche grâce à toute cette expérience et j'ai adoré travailler de la sorte sur ce dernier disque, tout en étant séparés les uns des autres.

On trouve dans le disque une surprise : un duo avec Charlotte Gainsbourg. Qui a eu l'idée de ce duo et comment cela s'est-il passé ?

Nous avions déjà la chanson mais elle ne nous paraissait pas vraiment finalisée. Nous avons alors pensé à y associer une chanteuse. C'est notre label qui a eu l'idée de Charlotte Gainsbourg, car elle y est également signée. On a adoré car son répertoire est très cool. On a été bluffés qu'elle accepte ! Nous avons alors pris l'Eurostar jusqu'à Paris et enregistré en studio avec elle. J'espère qu'on se retrouvera à la fin pour peut-être jouer ensemble, ça serait génial.

De très bons remixes des nouveaux singles sont également disponibles, notamment par les non moindres MGMT et Hot Chip. Comment se passe le process des remix ? Vous avez un mot sur ceux qui retravaillent vos morceaux ou c'est la surprise ?

Dave (ndlr : Maclean, batteur et producteur du groupe) est très impliqué, il a toujours des idées sur qui pourrait remixer ceci ou cela, il est très familier avec le petit monde de l'electro dance.

Tu as un remix de Django Django préféré ?

J'aime beaucoup celui de MGMT (ndlr : pour Spirals, titre tiré de Glowing In The Dark) , ils ont vraiment monté d'un cran le niveau du titre !

Et vous venez de lancer sur Internet un concours qui permet aux fans de remixer eux-mêmes un des nouveaux titres, c'est très orignal comme idée...

Oui, pas mal de nos fans produisent leur musique, on a trouvé très sympa et intéressant de leur proposer de participer. En plus, créer de la musique est tellement plus accessible aujourd'hui, de chez soi et avec peu de moyens. Le résultat devrait être assez amusant à écouter.

Le disque se plie selon moi particulièrement au live. Et vous êtes connus pour assurer de très bonnes performances sur scène. Est-ce que vous y pensez dès le moment de l'écriture et du passage en studio ?

Pas réellement, il s'agit surtout de bien faire se succéder les titres, trouver les bons enchainements qui donneront un ensemble cohérent. C'est par la suite que nous retravaillons l'interprétation en vue des concerts, avec Dave et nos ingés son qui déterminent comment nous jouerons les titres en live. Mais cela nous vient généralement très naturellement, grâce aussi à une très bonne connexion avec le public.

A ce propos, au vu des difficultés post-Brexit qui s'annoncent s'agissant de l'obligation de visas pour les musiciens qui souhaitent se produire dans l'Union Européenne, penses-tu que cela représentera une difficulté pour vous, que ça vous restreindra dans vos projets de tournée ?

C'est une honte ce qu'il se passe, les difficultés financières vont être gigantesques pour énormément d'artistes. Nous aurions été incapables de faire tous nos premiers concerts et de nous faire connaitre si nous avions vécu ça à l'époque. On a débuté au festival des Transmusicales de Rennes, c'était énorme comme opportunité. Et par la suite on a joué en première partie de Metronomy dans des salles prestigieuses ! C'était plus facile de se produire. Heureusement que nous avons aujourd'hui atteint ce stade où nous somme entourés et où l'on peut organiser des tournées sans trop de difficultés.

Tu te souviens de ton dernier concert avant le début de la crise ?

Pour être honnête, pas vraiment ! Par contre le dernier concert qui m'a vraiment marqué était celui de David Byrne au Coachella Festival en 2018. Je suis un fan de longue date et la production était démente. Chaque musicien avait son instrument accroché à lui de manière à pouvoir bouger et danser librement sur une scène vide. Son approche visuelle holistique est une grande source d'inspiration.

En tout cas, vous avez fait l‘effort de rester en contact avec vos fans depuis le début de la crise, avec des live, séparés ou non, et une grande présence sur les réseaux sociaux...

Je suis heureux de voir que les fans apprécient ! Dès que nous avons compris que rien ne serait faisable, nous avons tout de suite veillé à être présents. Et notre label a aussi veillé à nous offrir les moyens de communiquer sur l'album. Une chose est sûre, ça ne sert à rien de ruminer dans son coin, alors autant faire avec ce que nous avons actuellement et nous rendre disponibles. Ça demande beaucoup d'énergie mais il faut vraiment s'adapter, c'est la clé.

Les retours enjoués qu'on peut lire après chacune de vos interventions doivent vous rassurer sur l'avenir ?

C'est génial d'avoir ces retours, et personnellement ça me rend émotif à chaque fois !