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Wild Beasts

Interview publiée par Jean-Christophe Gé le 22 juin 2008

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Rencontre dans les locaux parisiens de PIAS avec deux bêtes sauvages : le chanteur Hayden Thorpe et Ben Little, guitariste. Ce sont en fait deux jeunes poppeurs sérieux qui acceptent de répondre aux questions de Sound of Violence quelques jours avant la sortie de leur premier album...

Vous venez de sortir votre premier album après cinq passés ensemble. Comment avez vous évolué au cours de ces années pour en arriver à Limbo, Panto ?

Hayden : Nous avons passé beaucoup de temps à jouer live, à découvrir comment on écrivait des chansons et à nous forger notre propre identité. Mais aussi à prouver à notre entourage que ce n’était pas qu’un hobby. Nous venons de Kendall dans le Lake District, c’est très beau, mais il n’y a rien là bas qui tourne autour du rock et rien pour inciter les jeunes à jouer. Le fait que nous jouions de la musique ne dérangeait personne, mais personne ne nous prenait non plus au sérieux.

British Sea Power vient de Kendall aussi ?

Hayden : Oui, mais comme nous ils l’ont quittée. Nous sommes à Leeds maintenant [NDLR : et British Sea Power à Brighton]. Nous aimons vraiment beaucoup ce qu’ils font, mais nous ne sommes pas vraiment croisés car ils ont cinq ans de plus que nous et quand on est adolescent on ne traîne pas avec les gamins.

Je trouve que vous partagé la même excentricité qu’eux...

Hayden : Ca, c’est typique de Kendall. Les gens ont tous des comportements un peu étranges la bas et ça ne gène personne. Il y a des gars qui se baladent dans de drôles d’accoutrements de randonneurs un peu partout, même dans les restaurants et personne ne les remarque.

Je trouve votre musique assez difficile à définir et apparemment je ne suis pas le seul. Les mots qui reviennent le plus souvent sont new age, romantique, poétique, excentrique… qu’est ce que vous préférez dans tout cela ?

Ben : De la pop, tout simplement. Nous ne visons pas un style particulier et nous ne cherchons pas à ce que les gens nous définissent d’une manière ou d’une autre. Nous voulons seulement que les gens écoutent notre musique.

Et vous, quelle musique écoutez-vous ? Qu’est ce qu’il y a dans vos iPods ?

Hayden : Nous avons comme principe de ne jamais nous laisser influencer par aucun autre groupe. Ce qui nous plait le plus dans l’art ce sont les choses à la fois incompréhensibles et incroyablement accessibles. Pour moi c’est la définition de la musique pop. Michael Jackson, Prince, Marvin Gaye vous accrochent immédiatement, mais vous devez creuser pour en percevoir toutes les nuances. Moi je n’ai pas d’iPod, mon rapport à la technologie est même assez embarrassant.
Ben : Je vais te montrer mon iPod [NDLR : il va chercher son sac à dos de campeur et en sort un iPod 80Go noir]. Be My Baby des Ronettes produit par Phil Spector, est le dernier morceau que j’ai écouté... [NDLR : Il la chantonne, puis il énumère tout un tas de groupe en les faisant défiler sur son écran] Joy Division, The Smith, Spandau Ballet, Phil Spector, Beach Boys, Nick Drake, Portishead, Bjork, Animal Collective, Prince, Kate Bush, Devendra Banhart, Four Tet, The Beatles. Et il y en a plein comme ça. Tu vois c’est assez varié.
Hayden : C’est que j’aime avec l’art moderne, c’est qu’on peut mélanger les styles et ça donne quelque chose de plus intéressant.
Ben : Le problème de toute cette bonne musique c’est que ça te donne envie de tout écouter et du coup je passe mon temps à zapper des extraits de chansons. Hayden : Ca rend boulimique.

Vous avez choisi votre nom en référence à un mouvement de peinture [NDLR : le fauvisme]. Quelle importance donnez vous aux aspects visuels dans votre travail ?

Ben : Cela nous permet déjà d’élargir nos références par rapport à tous les groupes de pop qui reprennent les mêmes clichés usés sur les relations par exemple.

Comment naît une chanson des Wild Beasts ?

Hayden : Tout ce que nous vivons et que nous croisons peut se retrouver dans nos chansons parce que c’est notre expérience qui nous rend comme nous sommes. En revanche, l’écriture demande une grande concentration, c’est un vrai travail, parfois même une lutte qui peut même ne pas être amusante du tout. Mais le fait d’être un groupe depuis longtemps nous permet de reconnaître quand nous faisons une bonne chanson et de trouver la bonne direction en tant que groupe.

Brave Bulging Buoyant Clairvoyants est un single étonnant et très puissant. Il a dû vous ouvrir pas mal de portes. Pourquoi avez vous retenu la proposition de Domino Records parmi toutes celles que vous avez dues recevoir ?

Hayden : Non, pas tant que ça. Bien sûr il y a beaucoup d’agents qui sont venus à nos concerts, mais la plupart ne sont jamais revenus. La majorité des labels sont à Londres, nous sommes basés à Leeds. C’est Domino qui ont montrés les premiers qu’ils étaient vraiment intéressés par notre musique et qu’ils étaient prêts à nous suivre pour plein d’autres chansons.

Pourquoi n’avez vous gardé qu’une seule chanson de vos précédents singles sur l’album ?

Ben : Nous n’avons gardé que Brave Bulging Buoyant Clairvoyants,mais dans une version réenregistrée, plus forte et qui ressortira en single. Notre deuxième single, Through Dark Night était un cadeau de départ pour notre premier label Bad Sneakers Records, pour les remercier de tout ce qu’ils avaient fait pour nous. Assembly était...

...un cadeau de bienvenue pour Domino Records ?

Hayden : Oui oui c’est presque ça. Nous nous sommes très vite rendu compte que nous étions prêts à enregistrer un vrai album et ces deux morceaux avec la Face-B n’auraient pas vraiment collé dessus. Comme nous sommes fiers de ces chansons nous avons voulu les sortir avant de passer à l’album.

Quelle est la signification de Limbo, Panto ?

Hayden : Ça reflète la balance qu’il y a entre notre musique et nos paroles. Limbo, ce sont les limbes, le lieu entre la vie et la mort. Et Panto c’est un spectacle de pantomime. C’est comme si on prenait des gens apathique, ni vivant, ni mort et que nous les mettions dans un spectacle délirant. Ca reflète notre musique.

Je ne vais pas vous demander une explication de texte sur tous vos titres, mais ils sont tous un peu bizarre. Le premier single extrait de l’album est The Devil's Crayon, de quoi parle t-il ?

Ben : C’est un morceau qui part de l’idée que le diable dessine avec des crayons de couleurs. Les choses mauvaises sont très faciles à comprendre et aussi très attractives. C’est une chanson qui essaie d’avoir un autre point de vue sur le bien et le mal.
Hayden : Toutes nos chansons sont en équilibre entre une signification très profonde et un néant intellectuel total. C’est comme ça que fonctionne la musique pop à mon sens.
Ben : C’est aussi pour ça que tout nos titres sont finalement assez ridicules.
Hayden : De toute façon tu ne peux pas dire grand chose dans une chanson de trois minutes donc tu es obligé de prendre des chemins détournés et tordus.

Vous allez faire une tournée pour Limbo, Panto ?

Hayden : Jouer en concert pour nous c’est un processus en deux directions. Le public re-énergise l’énergie que nous lui envoyons à travers nos chansons et ça donne une nouvelle vie à nos chansons.
Ben : Donc tu joues des chansons différemment, tu les redécouvres.

Eh bien merci et à bientôt sur scène donc !