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Wild Beasts

Interview publiée par Jean-Christophe Gé le 26 août 2009

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Un an à peine après un premier album encensé par la critique, Wild Beasts nousreviennent avec Two Dancers, second effort démontrant une véritable évolution dans un son toujours aussi résolument pop. Rencontre avec ces quatre anglais à l'univers plus séduisant que jamais...

Vous nous aviez accordé une première interview il y a un an lors de la sortie de Limbo, Panto, comment percevez-vous votre évolution durant ce laps de temps ?

Cinq années nous avaient été nécessaires pour achever Limbo, Panto, principalement parce que nous devions d’abord apprendre à écrire des chansons et à fonctionner en tant que groupe, mais aussi découvrir qui nous étions et quel était notre but. Une fois ces bases acquises, nous avons été capables de travailler plus rapidement.
Nous n’avions aucune attente particulière pour Limbo, Panto, ni aucune inquiétude lors de sa sortie. Au final je crois que nous avons surpris beaucoup de monde, nous y compris. Cette réussite a créé une forme d’excitation qui nous a poussée à être plus aventureux.

Comment avez-vous appréhendé cette rapidité nouvelle pour cet album ?

Je pense que nous avons simplement travaillé très dur. Lorsque nous n’étions pas en tournée, nous consacrions l’ensemble de nos journées à expérimenter des nouvelles idées. Nous profitions de notre statut de « vrais » musiciens. Nous avons rapidement enregistré des démos sans nous rendre compte ni de la qualité ni de la quantité, tout s’est produit sans réel effort de notre part. L’ensemble du processus a été très naturel.

Il est coutume de dire qu’il est plus dur d’enregistrer un second album que le premier, cela ne semble pas avoir été le cas pour vous !

L’enregistrement du disque en lui-même s’est déroulé en Suède avec Tore Johansson, et après une année à partir en tournée sans cesse nous avions emmagasiné assez d’énergie et de confiance pour mener cette mission à bien. Avec nos nouveaux outils et une connaissance plus approfondie de l’amour, rien n’aurait pu nous faire peur !

Avec du recul, quel regard posez-vous sur Limbo, Panto ?

J’en suis fier et encore émerveillé ! Comme je l’ai dit, nous ne nous étions jamais posé de questions comme le fait de savoir où nous allions ni ce que le public attend des groupes actuels. C’est pour moi la différence majeure entre nos deux albums. Désormais nous disposons d’un manifeste dense et complexe qui nous servira de bases pour les années à venir.

Comment aviez-vous vécu l’accueil réservé à ce premier album justement ?

Nous avons été surpris… par la manière dont le public a été surpris en l’écoutant ! Tout cela sans avoir d’attentes particulières. Le fait de voir notre nom sur la pochette d’un disque était suffisant pour nous, nous avions fait notre part du travail. La cause prenait déjà le pas sur la conséquence.

L'ensemble de Two Dancers semble plus moderne que la plupart de vos anciennes chansons. Comment expliquez-vous ce changement ?

Je pense effectivement que cet album est plus moderne et urbain que le précédent sur bien des points. Avec Limbo, Panto il était nécessaire que nous fassions nos preuves, c’est sans doute pour cela que notre approche avait été très traditionnelle tout en respectant certaines bases. Par la suite, il était plus simple d’explorer de nouvelles directions, sans doute guidées par le fait que nous écoutons tous beaucoup de groupes électroniques comme The Knife, Junior Boys ou Four Tet.

La manière dont sonnent la plupart des instruments, et plus précisément la guitare, semble avoir été particulièrement soignée. Pour créer une atmosphère spécifique peut-être ?

Nous avons consciemment cherché à exploiter les guitares différemment. Pour chaque chanson, l’idée était de disséquer sa structure, de travailler tous les éléments indépendamment les uns des autres, puis de tout ré-assembler à la fin. Globalement je dirais que le résultat est souvent plus abstrait, les guitares ne jouent pas nécessairement un rôle central et cela provoque une forme d’embellissement au final.

Pour laisser plus de places au chant de Hayden également ?

C’est aussi une possibilité… Je voulais que l’énergie et le mouvement soient d’abord suggérés par les instruments, de manière à ce que le chant joue un rôle de narrateur plutôt que de guide.

Depuis vos débuts, la presse parle de vous comme un groupe « pop ». Est-ce encore le cas pour Two Dancers selon vous ?

Absolument ! Les chansons ont été travaillées pour rentrer dans des moules de nuances pop, par exemple verset, refrain, verset, refrain, pont et enfin un final avec des chœurs. C’est presque une fascination compulsive de notre part, nous ne pouvons pas nous en empêcher. Cela changera sans doute un jour, mais pour le moment l’excitation de la chanson pop nous semble magique : tout dire en l’espace de quatre minutes.

Two Dancers est malgré tout relativement différent de Limbo,Panto...

Je pense que Two Dancers est plus simple que Limbo, Panto sur certains aspects, mais la réciproque s’applique également dans certains domaines. Plus globalement, j’apprécie beaucoup Two Dancers car il se rapproche de certains « seconds albums » que j’aime : il synthétise toutes les caractéristiques essentielles et idées du groupe pour les présenter avec une approche plus simple et découpée en plusieurs morceaux.

Two Dancers a été produit par Richard Formby avec qui vous aviez travaillé durant vos premières années d’existence. Pourquoi vous être à nouveau tournés vers lui pour ce disque et non pour le premier ?

Nous l’avons contacté car nous souhaitions achever ce qui avait été laissé suspens lors de nos débuts. Two Dancers résulte ainsi de la collision de deux philosophies artistiques opposées. Richard a confiance dans les méthodes d’enregistrement traditionnelles avec de vieilles machines alors que nous avons voulu mettre en œuvre notre connaissance nouvelle des méthodes récentes combinant les ordinateurs et des sonorités plus modernes. Ces deux « univers » ont tenté de prendre l’ascendant l’un sur l’autre, ce qui explique que ce nouvel album possède plus de caractère que le premier.

Pourquoi avoir choisi Two Dancers en tant que titre de ce disque ? Pour un groupe pop comme le votre, la référence semble plus liée à Joy Division qu’à Michael Jackson !

Les deux volumes de la chanson Two Dancers décrivent les situations dans lesquelles des états émotionnels exacerbés provoqués par la fatigue ou la recherche d’une gratitude quelconque peuvent amener quelqu’un à des comportements dangereux. La première section décrit une spirale infernale vers l’obscurité, le désordre et les catastrophes. La seconde représente par la suite le soulagement, le baiser après le choc qui permet de retrouver une fois encore une certaine stabilité.

La première chanson de Two Dancers, The Fun Powder Plot, semble contraster avec l’aspect mélancolique du disque. Comment l’expliquez-vous ?

The Fun Powder Plot est une chanson dédiée à l’événement qu’a été l’attaque du groupe Fathers 4 Justice contre Tony Blair à l’aide de bombes de farines à la Chambre des Communes. Cette chanson correspond plutôt bien à ce que je ressens avec l’album, trouver une part de joie même dans les pires situations.

A contrario, Hooting & Howling, votre dernier single, est certainement la chanson la plus rythmée et entrainante…

C’est la dernière chanson que nous ayons enregistrée dans l’optique de ce nouvel album. D’une certaine manière, cette chanson somme toute les composantes que rassemble Two Dancers. Son squelette est construit à partir de ceux des autres titres.

Comment envisagez-vous la suite de votre carrière désormais ?

Qui sait… Je n’ai pas envie de me mettre une pression inutile en me focalisant sur ce genre de choses si tôt. Je préfère nous voir avancer dans l’obscurité, l’art de la surprise est important pour moi.

Avez-vous prévu de partir en tournée en Europe prochainement ?

Nous l'espérons avant la fin de l'année 2009. Le Festival des Inrockuptibles reste un excellent souvenir. La nourriture et l'hospitalité du public sont parmi les choses les plus positives que nous ayons connues en tant que groupe.