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Goldheart Assembly

Interview publiée par Mélissa Blanche le 10 mai 2010

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Alors que leur premier album Wolves And Thieves commence à remporter outre-Manche un succès sacrément bien mérité, les musiciens de Goldheart Assembly semblent n’avoir rien perdu de leur naturel et de leur gentillesse. A l’occasion de leur unique passage en France, nous avons rencontré John Herbert et Dominic Keshavarz, guitaristes du groupe, dans les loges de la Maroquinerie, accompagnés par moment de leurs camarades venus se joindre à la conversation.

Comment vous sentez-vous avant le le concert de ce soir ? Vous n’êtes pas stressés ?

John : Si, on était très stressés aujourd’hui parce que Jim (ndlr : James Dale, le chanteur et bassiste du groupe) ne se sentait pas bien du tout. L’autre chanteur, il n’est pas avec nous là, il est en train de grogner, de s’agripper l’estomac. Du coup, on est un peu stressés.

Vous n’avez pas l’air du tout stressés pourtant !

Dominic : Lui, il est stressé, nous pas (rires).
John : Je suis stressé parce que je dois chanter avec ces… et James ne récupère pas.
Dominic : Il a une voix très haute (il fait semblant de chanter d’une voix très aigue).

C’est votre première tournée en dehors de la Grande-Bretagne ?

John : En dehors de la Grande Bretagne, oui. On vient d’aller à Rotterdam. Et on voulait vraiment jouer autre part aussi. Donc on a beaucoup de chance de faire ce concert ici.

Vous avez joué dans certains des plus grands festivals anglais, comme Reeding et Leeds. Comment c’était ?

John : C’était génial. J’avais toujours voulu jouer à Glastonbury surtout.
Dominic : C’était drôle ! Donner un concert, c’est toujours très marrant, de toute façon. Et il y a toujours beaucoup de choses à boire.

Vous avez fait une tournée avec The Low Anthem. Comment ça s’est passé ? C’est vous qui les avez contactés ou bien c’est eux ?

John : On leur a envoyé une démo en janvier dernier… on a envoyé beaucoup de démos aux majors du disque. Donc on était très flattés quand ils ont accepté. Alors on a fait quinze dates avec eux. Et ils étaient vraiment sympas. Je ne sais pas s’ils en savaient beaucoup sur Charlie Darwin (les autres rient), parce que j’ai étudié la zoologie à l’université.

Et vous êtes encore en contact avec eux ?

John : Non, on aimerait bien. Salut ! Salut Jeff !
Dominic : Salut Jeff!

Et qu’est-ce que ça vous a fait de sortir votre premier album ?

John: J’étais très excité. J’étais sur le point de laisser tomber la musique à ce moment-là parce qu’ avec le groupe on avait accompli ce que j’avais toujours voulu faire... C’était merveilleux.

Plus de questions sur le groupe maintenant. Vous n’êtes pas encore très connus en France. Alors est-ce que vous pourriez présenter un peu le groupe ? Qui compose par exemple?

John : Jim et moi composons les chansons. Moi, c’est John ! On les apporte au groupe, qui les enrichit, leur donne un meilleur son. Les font bouger. Je veux dire, tout le monde met un peu son grain de sel et contribue à l’ensemble.

Et le nom du groupe, comment vous l’avez choisi ?

John : Et bien, on cherchait un nom et je suis un grand fan de Guided By Voices, alors leur chanson The Goldheart Mountaintop Queen Directory nous a inspiré pour « goldheart » et puis je voulais qu’il y ait un côté collectif là-dedans, d’où le mot « assembly », parce que...
Dominic : Parce que c’est comme ça qu’on le sentait le mieux. On peut faire venir plein de monde, comme dans une assemblée.

Comment en êtes-vous venus à la musique ?

John : Moi, je voulais juste être riche (rire) !
Jake : C’a été différent pour tout le monde. On jouait dans des groupes différents. Nicky et moi, on était dans une école de musique et on a rencontré Jim, John et Don dans un night club de Covent Garden où on allait souvent. Ensuite ils l’ont fermé et en ont fait une boutique Apple, ce qui nous a tous vraiment énervés.
John : Jim et moi, on était dans des groupes différents depuis longtemps. On jouait des musiques différentes. Tom était dans le groupe de Jim aussi et je crois qu’en commençant à discuter on s’est rendu compte qu’on s’aimait bien. On a commencé à donner quelques concerts improvisés et on a apprécié le son qu’on produisait ensemble. Alors on a dissout nos anciens groupes pour en faire un nouveau.

Quels sont les artistes qui vous ont le plus influencés ?

John : Je crois qu’on a tous grandis avec les Sparks, on écoutait différents trucs. Je suppose qu’on a tous évolué avec la musique des sixties aussi.
Dominic : Les Beatles, les Stones…
John : Après, je pense qu’on a chacun notre espèce de niche, dans toute la musique populaire, comme le post-punk, les années 80, l’indie américain, la Motown…
Dominic : Le jazz.
John: Le jazz, le folk. Nicky, notre batteur, aime le folk psychédélique. Enfin, toute la bonne musique...

A propos du folk justement. Vous mêlez le folk et le rock avec beaucoup de facilité mais vous semblez plus proche du folk que du rock. Quel est votre ressenti sur le sujet ?

Dominic : On ne joue pas de folk. Beaucoup de gens disent qu’on joue du folk mais en fait, pas vraiment. Il n’y a que John à la guitare acoustique. Ca m’énerve, peut-être qu’eux ça ne les choque pas, mais moi ça m’énerve. Parce que ça veut dire qu’on s’attend à ce qu’on fasse certaines choses. Mais on n’a pas de genre particulier. On peut faire tout ce qu’on veut.
John : Je crois que c’est juste ce que l’album a pu laisser penser. Je ne crois pas qu’on ait forcément notre propre son. Si on voulait faire un truc en particulier, on pourrait le faire, on pourrait développer autre chose. Donc le prochain album pourrait être très électrique par exemple.

C’était ma prochaine question… Pensez-vous avoir trouvé votre propre style ou souhaitez-vous développer d’autres choses ?

John : Je ne crois pas que tu puisses jamais trouver ton style…
Dominic : Si c’est le cas, alors tu es fichu, parce qu’à ce moment-là tu ne peux plus aller nulle part.

Ces dernières années, il semble qu’il se soit produit une sorte de comeback des musiques plutôt acoustiques, avec des artistes comme Turin Brakes, Bon Iver ou d’autres. Avez-vous l’impression de faire partie de cette tendance ? Et comment expliquez-vous ce nouvel intérêt pour cette musique ?

John : Je crois que quelqu’un a dit à Jim il y a deux ans « vous les gars, vous êtes géniaux, parce qu’avec vous ce n’est pas une question d’image, ce n’est pas artificiel, vous vous intéressez juste à la musique ». Donc je pense que cette espèce de tendance où ce qui compte c’est la musique s’est développée, plutôt que de danser sur la scène en slim. Je ne sais pas si ce n’est pas un peu injuste, ce que je dis.
Dominic : Non, c’est juste.
John: On n’a pas l’impression de faire partie de quoi que ce soit. Je ne sais pas pourquoi, c’est venu avec cette espèce de mode pour le style anglais de la période victorienne, qui a vraiment démarré il y a deux ou trois ans quand tout le monde a commencé à ressembler à des gentlemen de cette époque.
Dominic : A fumer la pipe.
John : Ouais. Mais je ne sais pas s’il y a un rapport entre la musique acoustique et le style victorien. Je ne sais pas (rire) !

Je crois que la question que je vais vous poser va vous énerver. Vous êtes toujours comparés aux Fleet Foxes (ils sourient). Ca ne vous plaît pas ? (ils réfléchissent)

John : Hum… Je ne crois pas qu’il y ait aucun d’entre nous qui déteste les Fleet Foxes mais… c’est à cause des harmonies, c’est ça ?
Dominic : Et le fait que, nous non plus, on ne se rase pas tous les jours.

Je trouve votre album assez homogène, vraiment recherché en tout cas. Pensez-vous qu’il est plus important de faire un album que des chansons ?

Dominic : C’est un peu pour ça qu’on a eu l’idée d’enregistrer l’album au Steam museum (ndlr : le Forncett Industrial Steam Museum à Norfolk, un musée de locomotives à vapeur), pas forcément pour être dans ce musée en particulier, mais pour l’idée que l’ambiance de cet endroit pourrait en quelque sorte se retrouver dans la musique. Donc, oui, c’est vraiment un album plus qu’un ensemble de chansons, merci.

Pourquoi avoir décidé d’enregistrer là-bas ? Qu’y avez-vous gagné concrètement ?

John : Je crois qu’aucun de nous n’est doué pour aller dans un studio. On n’aime pas vraiment les studios. Alors on voulait aller quelque part où l’endroit lui-même aurait une influence sur les sonorités. C’était un lieu intéressant pour enregistrer, dont on pouvait utiliser l’atmosphère. Il y avait des recoins où l’on pouvait placer les amplis et obtenir des sons différents.
Dominic : On a utilisé les machines elles-mêmes pour faire le rythme de certaines chansons.

Vous avez signé avec une maison de disques indépendante, Fierce Panda. L’avez-vous choisie parce que c’est une maison indépendante ou simplement parce qu’elle vous plaisait ?

John : Honnêtement on l’a choisie parce qu’il n’y avait pas grand chose d’autre (rire) !
Jake : Non, ils sont supers.
Dominic : On était ravis.
John : On était enchantés, c’est une maison de disques géniale. A cette période, il y avait beaucoup de majors du disque qui rôdaient, qui voulaient passer un contrat avec nous. Mais on commençait à avoir un peu peur parce qu’Atlanta était venue nous voir puis nous avait lâchés parce qu’on était tous saouls. Enfin, ils avaient aimé la musique mais ils voulaient quelque chose de plus professionnel. On aime jouer de la musique, tu vois, mais parfois on aime bien prendre un verre et s’amuser. On n’est pas carriéristes. Donc oui, on est très contents d’être chez Fierce Panda.
Dominic : Peut-être que si on avait signé chez un major on n’aurait pas été capable de faire l’album qu’on voulait faire, ils nous auraient dit de faire ci ou ça, alors que Fierce Panda ne nous ont a rien demandé. On a fait ce qu’on voulait.

A propos de l’album toujours, comment avez-vous choisi son titre, qui est aussi le titre de la face B d’un single ?

John: Je crois qu’on a aimé le titre mais que pour je ne sais quelle raison, on s’est dit qu’on n’aimait pas la chanson...
Dominic : Le titre est meilleur que la chanson.
John : Le titre est meilleur que la chanson (rires). Mais c’est juste un titre, tu vois. On n’avait pas beaucoup d’inspiration pour ça.

Il y a beaucoup de ballades dans l’album, des chansons parfois très touchantes. On dirait des chansons introspectives. Est-ce conforme à votre vision ? Vous êtes-vous inspirés de la réalité ?

John : La plupart de l’album reflète notre état d’esprit, à Jim et à moi, au moment où on l’a composé et je suppose que beaucoup de chansons sont plutôt douces parce que c’est comme ça qu’on se sentait à ce moment-là. Ce n’était pas vraiment conscient. C’est juste venu comme ça et c’est difficile d’expliquer pourquoi. Je ne sais pas, ça vient peut-être en partie de la musique qu’on écoutait à ce moment et en partie de ce qu’on était en train de vivre mais ça s’est juste fait comme ça ! On ne voulait pas faire un album calme forcément.

Avez-vous une chanson préférée sur l’album ?

Thomas : Anvil.
John : Moi, c’est Boulevards.
Dominic: Oh j’aime bien… The Carrying… Carnival 4.

Laquelle ?

John : L’avant-dernière.
Dominic : Celle qui est très, très longue. Celle que tu as zappé parce qu’elle tournait en rond.

Je l’ai écoutée jusqu’au bout !

Dominic : Tu es probablement la seule.
John : Elle a été diversement appréciée. Le rythme n’arrête pas de se répéter à la fin. Certains aiment ça, d’autres non.

A propos de la réception de l’album, vous avez reçu beaucoup de soutien de la part des critiques. Vous avez joué pour Steve Lamacq par exemple, le NME vous a consacré une page entière. Vous ne vous attendiez pas à cela ?

Dominic : Non, je ne sais même pas pourquoi Steve Lamacq nous a choisis. Normalement il aime plutôt les trucs bruyants, non ? Mais c’est génial, on n’en serait pas là sans Steve Lamacq et 6 Music.
John: Je pense qu’ils nous ont aimés parce qu’on est un petit groupe.

Je n’ai lu que des critiques plutôt positives sur vous…

John : Je pense que c’est difficile pour les petits groupes parce que beaucoup de critiques ne vous laissent peut-être pas de temps. Ils n’écoutent pas l’album correctement et ils n’ont pas une opinion bien argumentée. Ils vont juste écrire une critique parce que c’est leur métier. Mais je crois qu’en réalité la plupart de ceux qui ont vraiment écouté l’album nous ont donné un avis plutôt positif, et c’est génial ! On ne s’attendait pas forcément à ça.
Dominic : Beaucoup de chroniques se contentent de mentionner « folk, barbes, Fleet Foxes »…

J’ai chroniqué votre album… et j’ai parlé du folk et des Fleet Foxes (rires) !

Dominic : Ce n’est pas grave (rires) !
Jake : On n’a pas lu la traduction d’une chronique française ?
John : Pour quel site ?

Sound of violence…

Jake : Oui, je crois que c’était ça !
Le groupe : Merci alors ! C’était une chronique très positive !
John : On voit vraiment que tu as écouté l’album, ce qui est génial. Parce que parfois on a vraiment l’impression que les critiques ne le font pas, qu’ils ont leurs réponses toutes faites.
Dominic : Ils lisent le communiqué de presse, écoutent la première chanson et puis écrivent leur papier, tu vois. Mais c’est sympa quand on lit une chronique de se dire qu’ils parlent d’un album qu’ils ont vraiment écouté.
John : Donc merci.

Votre premier single a eu du succès très vite. Encore une fois, comment avez-vous réagi ? Et surtout, avant cela, a-t-il été dur de vous faire connaître ?

John : je ne sais pas vraiment comment ça se fait. Je ne sais pas vraiment comment nous, on a fait. C’est une question de chance. C’est un tas de petites choses, de coïncidences, pas vrai ? C’est de la chance.
Dominic : Et des chansons.
John : Et ça t’aide si tu écris de bonnes chansons. Mais il y a des tas de gens qui écrivent des chansons géniales, bien meilleures que les nôtres. Je ne devrais pas dire ça, notre manager ne va pas apprécier !

Vous n’avez pas encore eu une très longue carrière mais de quoi est-ce que vous êtes le plus fiers jusqu’à maintenant ?

Thomas : D’avoir sorti l’album, je crois.
John: Oui, ça me rend plutôt fier...
Dominic : Privilégié.
John : Privilégié, d’avoir pu sortir l’album. Et si on fait un bide demain, je serai content, je serai heureux de montrer à mes petits-enfants Wolves And Thieves, encore sous cellophane. « Regarde, regarde ça John Junior ! » (rires).

Avec quels artistes rêveriez-vous de travailler par la suite ?

John : Je ne sais pas, j’ai toujours rêvé de travailler avec John Nettles (ndlr : acteur principal de la série Inspecteur Barnaby) (rires). Et j’adorerais que Tobin Sprout (ndlr : coauteur, multi instrumentiste de Guided By Voices) produise le prochain album… et puis peut-être qu’Elvis Costello pourrait produire le troisième.
Dominic : Tom Waits pourrait être aux cuivres.
John: Tom Waits aux cuivres oui, peut-être Stevie Wonder à la batterie.
Dominic : Macca ?
John : Paul McCartney au piano !
Dominic : Johnny Marr des Smiths au vibraphone.
John : Noel Gallagher pour les harmonies. Et Alex James de Blur pourrait conduire le van!

Pour finir, quelle est la prochaine étape ? Est-ce que vous prévoyez de faire un nouvel album ? Avez-vous déjà commencé à l'écrire ?

John : On veut écrire un nouvel album assez vite, on ne veut pas traîner. Je ne sais pas comment ça va sonner. Je vais peut-être essayer d’écouter d’autres musiques que je n’ai jamais écoutées pour m’influencer... Cette réponse est débile (rires) ! Et j’essaierai peut-être d’écrire des chansons sur de nouveaux instruments aussi. Et peut-être d’apprendre un nouvel instrument. Je ne sais pas si j’y arriverai mais j’essaierai !

Comme quoi ?

Dominic : La guitare électrique (rires) !
John : Non je n’arrive pas à jouer de la guitare électrique ! Mais je ne sais pas, peut-être un peu de cuivres. Et on ne sait pas où on l’enregistrera. J’aimerais bien que ce soit dans un endroit différent.