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Clinic

Interview publiée par Claire le 1er octobre 2010

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Mi-juin, Clinic se produisait au Nouveau Casino dans le cadre de la soirée Custom dédiée à Domino Records. C’est à cette occasion que nous avions rencontré Ade Blackburn, guitariste et chanteur du groupe, venu rencontrer le public français et parler du nouvel album, Bubblegum, attendu la semaine prochaine. Discussion enjouée avec un liverpuldien à la croisée du punk et de l'easy listening...

Votre nouvel album Bubblegum sort en octobre. Le dernier était sorti en 2008 et le précédent en 2006. Est-ce que pour vous, deux années, c’est un minimum pour accoucher d’un bon album ?

C’est un bon rythme en fait. On a besoin de ce temps en tant que groupe mais aussi pour laisser à la maison de disques et aux gens qui travaillent sur notre album de faire un boulot correct. C’est toujours difficile d’être entièrement satisfait d’un album, donc on se dit qu’en deux ans, on a donné notre maximum. Par contre, plus de deux ans, c’est hors de question. On aurait l’impression de perdre notre temps et en fin de compte, je pense qu’on serait déçus du résultat. Sans compter que les gens qui nous suivent finiraient par croire que l’on est un peu... prétentieux.

Vous avez déjà une longue carrière derrière vous, mais si vous deviez présenter le groupe à quelqu’un qui ne le connaît pas, que diriez-vous ?

Je dirais qu’on est un groupe pop, avant toute chose. Avec un petit côté rock, voire psychédélique. Mais c’est surtout pop que je retiendrais.

Pouvez-vous expliquer l’origine du nom Clinic et pourquoi vous portez des masques chirurgicaux en concert ?

On n’a aucun problème avec les médecins, rassurez-vous ! On s’est décidé sur le nom du groupe en premier en fait. Il nous semblait que le nom correspondait bien à la musique plutôt minimale que l’on jouait. En plus, j’ai toujours été fan de groupes punk, The Residents pour ne citer qu’eux, et je voulais qu’on ait ce petit côté un peu bizarre, limite mauvais goût, qu’avaient certains groupes punk dans les années 70s-80s. Une fois que le nom a été trouvé, le costume est venu naturellement. En plus, cela permet aux gens de se focaliser sur la musique et pas sur la tête des musiciens.

Durant votre dernière tournée, vous n’avez pas tout le temps porté vos masques... avez-vous prévu quelques surprises vestimentaires pour les mois à venir ?

Ce soir, on va faire basique et coloré. On suit le titre de notre album. On va être couleur « Bubblegum » !

Justement, pourquoi Bubblegum ?

C’est parti d’une blague. On voulait écrire un album pop et quelqu’un de notre entourage nous a dit « Quoi ? Vous voulez faire de le la pop bubblegum ? ». Clairement, on voulait que ça aille vers quelque chose de rythmé et coloré... et on a gardé l’expression.

Vos concerts sont réputés pour être intense et courts. Le public s’attend souvent à une durée moyenne d’une heure et demie. Pourquoi avez-vous choisi de ne jamais jouer plus de 50 minutes ?

Déjà, nos titres sont courts. En quarante-cinq minutes, on peut en jouer dix-huit par exemple. Donc, si on voulait jouer 1h20, on serait totalement épuisés, et en plus, ça affaiblirait la puissance des chansons. J’aime bien l’idée de rester dans une dimension punk où les titres sont très courts. Un peu aussi comme dans les années 60s où les groupes calibraient leurs titres pour être aussi incisifs que possible. Maintenant, les gens s’attendent à quelque chose de plus long, avec des temps de pause. Le public aime bien une certaine normalité. Mais honnêtement, ce n’est pas parce que tu peux faire plus qu’il faut faire plus. La puissance d’un concert ne réside pas dans sa durée .

Vous utilisez beaucoup d’instruments très différents en studio mais aussi sur scène. Pourquoi une telle profusion de sons ?

La guitare, c’est très bien, mais on en a vite marre et on finit par perdre de notre inspiration . En utilisant des vieux instruments comme le dulcimer ou des clavecins, on sait que l’on n’est pas forcément techniquement excellents mais ça nous ouvre des tas de possibilités et ça nous donne des tas d’idées. Je pense que c’est une bonne façon de travailler. Et ça apporte une dimension mélodique que l'on recherchait absolument pour cet album.

Sur Bubblegum, vous avez intégré beaucoup de cordes, ce qui rend votre album beaucoup plus calme que les précédents. De quoi vous êtes-vous inspirés ?

En réalité, j’écoute beaucoup d’easy-listening. J'adore ça !

Donc c’est très loin du punk dont tu parlais précédemment !

C’est sûr (rires) ! Mais j’ai grandi avec ça aussi. Mes parents écoutaient beaucoup d'artistes plus calmes, comme Glen Campbell ou Perry Como. C’est évident que l’on ne s’attend pas à ça de nous - nos fans n'imaginent même pas que l'on puise écouter trois minutes de ce type de musique - mais on ne peut pas nier que ça fait partie de notre culture musicale.

Est-ce que vous souhaitiez dès le départ que cet album prenne cette direction easy listening ou est-ce venu au fur et à mesure ?

C'était une volonté depuis le départ. Je pensais qu'il fallait qu'on aille jusqu'au bout du concept, qu'on aille jusqu'au bout de ce qu'on pouvait créer au niveau des mélodies.

Est-ce qu'on peut parler d'un nouveau cycle pour vous ?

Oui, clairement ! Il y a toujours des chansons plus rock mais on veut dorénavant explorer une face plus tranquille de notre musique. Se renouveler, c'est vraiment important.

Pourquoi avoir opéré un changement si radical après six albums ?

On avait décidé d'explorer tout un style et je pense qu'on est allé jusqu'au bout. Notre dernier album a commencé à être un peu plus folk. On voulait voir si on en était capable. On s'est dit que ce n'était pas trop mal et du coup, on n'a pas hésité pour cet album.

Avez-vous réfléchi à la manière dont votre public va réagir ?

Il est possible que nos fans n'aiment pas trop cette orientation. En même temps, je sais que notre public aime que l'on essaie de nouvelles idées, qu'on n'ait pas peur de tenter de nouvelles expériences. Donc, dans l'ensemble, je pense qu'il adhéreront à la démarche.

I Am Aware est le premier single de cet album. Pour quelles raisons l'avez-vous choisi ?

C'est l'album, en miniature. On y retrouve tout ce qu'on a expérimenté : les cordes , l'acoustique, les mélodies. C'est le son de notre album résumé en une chanson.

Sur cet album, vous avez travaillé avec John Congleton (Bill Callahan, St Vincent). Pourquoi un tel choix ?

John Congleton possède une vraie culture de compositeur. On savait qu'il nous donnerait un son plus chaud, plus doux. C'est lui qui a pris en charge les cordes et nous a fait maintenir notre cap easy listening.

Vous êtes signés depuis longtemps chez Domino Records. J'ai cru comprendre que votre maison de disque était très importante pour vous...

En effet, sans eux, on ne serait pas là. Je pense qu'on aurait continué à jouer de la musique mais ils nous ont permis d'évoluer à une échelle à laquelle on n'aurait jamais songé. Ils nous ont permis de toucher un public plus large et nous soutiennent dans notre nouvelle démarche.

Vous vous êtes formés en 1997. Bien que vous n'ayez jamais été de gros vendeurs, quel est le secret de votre longévité et de votre continuelle envie de vous renouveler ?

On n'a jamais été tenté de faire partie d'une scène ou d'intégrer un mouvement musical. On n'a jamais été LE groupe du mois, ni associés à une année, et ç'a été une force car, en conséquence, Clinic n'a jamais été démodé. Et ça nous a permis finalement de faire ce qu'on voulait.

Que rêvez-vous de faire maintenant? Y a-t-il un style musical que vous souhaitez explorer ?

On rêve de faire un album électro très cohérent, c'est vraiment notre prochaine étape. On en a déjà pas mal discuté entre nous et on espère réussir à obtenir quelque chose de concret sur le prochain album.

Vous venez de Liverpool. Le lieu a-t-il encore une importance sur votre musique ?

Dans un sens, oui. Beaucoup de groupes qui en viennent veulent sonner comme The La's ou les Beatles. Et nous, ça nous a justement donner envie de faire l'inverse ! Tous ces groupes qui s'acharnent à s'habiller comme les Beatles, ça nous a motivés pour faire quelque chose de différent.

Que pensez-vous de la scène actuelle ? Y a-t-il un groupe que vous conseilleriez ?

Tout ces trucs à la télé et les charts en angleterre, c'est vraiment, mais vraiment, nul et déprimant. Si je ne devais en citer qu'un, ce serait Stig Noise. Ça ressemble un peu à du Captain Beefheart... Ah oui, j'aime aussi beaucoup The Ettes !