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Maxïmo Park

Interview publiée par Fab le 4 octobre 2012

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Après la sortie remarquée de leur quatrième album, The National Health, en juin dernier, Maxïmo Park effectuaient leur retour en France le samedi 25 août dernier lors du festival Rock en Seine. C'est à cette occasion que Paul Smith et Lukas Wooller se sont entretenus avec nous pour faire un point sur leur carrière et leur avenir.

Vous n’aviez plus joué en France depuis un certain temps avant le concert donné cet après-midi à Rock en Seine, comment l’avez-vous vécu ?

Paul : Le soleil brille aujourd’hui, ce qui est plutôt une bonne chose, et le public semble avoir pris du plaisir. Je pense que nous n’avions jamais joué en France devant un public si nombreux. On nous propose souvent de plus petites scènes, et nous nous faisons rares dans les festivals de votre pays, alors notre venue à Rock en Seine était une bonne opportunité de nous présenter à beaucoup de gens tout en jouant les nouvelles chansons de The National Health et nos anciens titres les plus connus.

Ce concert était-il plus difficile à assurer du fait que la majeure partie du public vous découvrait ?

Paul : Sans doute un petit peu... C’était un challenge ! Je le ressens comme une chose positive car j’aspire à ce que de plus en plus de personnes connaissent Maxïmo Park. C’est une question de logique pour des musiciens, cette envie de progresser, d’avoir un public plus important jusqu’à devenir le plus grand groupe du monde un jour (rires) ! Nous voulons ressentir la satisfaction du public nous écoutant sur scène, savoir que des gens ont pu passer une bonne journée en partie grâce à nous. Chacun de nos concerts est un challenge pour différentes raisons. Notre musique comporte une importante part d’émotions, il n’est pas si facile de parvenir à les transmettre et les faire pénétrer l’esprit de ceux qui nous écoutent. Le fait de voir qu’autant de gens te font encore face à la fin de ton concert sur une si grande scène, c’est une récompense.
Lukas : Je me sens privilégié à l’issue de ce concert. J’avais des appréhensions par rapport à notre venue sur la grande scène d’un des principaux festivals français, d’autant plus que nous n’avions plus joué dans votre pays depuis longtemps. C’était vraiment un bon concert avec toutes ces personnes venues nous écouter.

Nous avions tous des envies différentes, nous ne voulions pas nous forcer à aller en studio pour enregistrer des chansons bâclées ou écrites à la va-vite.

Trois années se sont écoulées entre la sortie de The National Health et celle de votre précédent album, une période plutôt longue compte-tenu de votre rythme habituel et de vos habitudes...

Paul : La réponse est en partie dans ta question, il nous fallait changer nos habitudes. Nous avions tous des envies différentes, nous ne voulions pas nous forcer à aller en studio pour enregistrer des chansons bâclées ou écrites à la va-vite. Nous avons donc pris nos distances pendant un moment mais au final nous n’avons pas eu le sentiment de disparaître très longtemps. Lorsque j’ai sorti mon album solo, c’était selon moi le choix logique à faire à cet instant précis. Nous sommes partis en tournée pendant environ une année afin de promouvoir Quicken The Heart, cette pause du groupe était finalement normale il me semble. Nos idées divergeaient à l’époque, nous avions des aspirations différentes, et quand tu fais partie d’un groupe les plus petites différences peuvent rendre les choses très difficiles pour aller de l’avant. Lorsque nous nous sommes retrouvés pour enregistrer ce disque, nous étions tous complètement concentrés sur Maxïmo Park et rien d’autre. Au final, ce disque n’en a été que meilleur, le résultat nous plaît énormément. En sortant du studio, nous avions conscience d’avoir fait de notre mieux. Il est important pour moi que chaque jour comporte son lot de nouveautés et de progression, la frustration t’empêche d’avancer.

Cet album est votre premier depuis que vous avez quitté Warp Records, ce changement a-t-il eu un impact sur le disque et la vie du groupe ?

Paul : Nous avons enregistré l’ensemble du disque avant d’avoir trouvé une nouvelle maison de disques. Nous voulions d’abord nous faire plaisir et voir ensuite si le résultat pouvait plaire à d’autres personnes, garder la liberté de travailler comme nous l’entendions. Heureusement pour nous, Cooperative Music ont par la suite été réceptifs à ce que nous avions à offrir !
Lukas : Nous avons toujours suivi ce mode de fonctionnement. Nous ne voulons pas que quiconque interfère dans le processus de création d’un de nos disques. Peu importe le label, nous ne laisserons jamais une personne prendre des décisions artistiques à notre place. Nous savons où nous allons.
Paul : Je pense qu’au fil du temps les gens ont compris le genre de groupe que nous sommes. Nous avons toujours été très indépendants et il est bien trop tard désormais pour que quelqu’un tente de changer cela !

Le titre de votre nouvel album, The National Health, semble avoir une connotation politique à première vue. Pouvez-vous l'expliquer ?

Paul : Je pense que le titre est presque politique (rires) ! En le découvrant, il reste encore une part de mystère, il ne dévoile pas complètement ce à quoi nous voulons faire référence. Il est en partie inspiré par le National Health Service (ndlr : système de la santé publique du Royaume-Uni) mais nous avons trouvé plus intéressant de ne le citer que partiellement. Sans vouloir trop généraliser, il s’agit d’une forme d’état des lieux de ce qu’est notre pays à l’heure actuelle. Ce titre est aussi une manière d’attirer l’attention des gens pour leur faire comprendre que nous ne sommes pas uniquement un groupe dit « romantique », nos chansons sont plus que jamais des sortes de commentaires sur le monde actuel. Les titres de nos trois précédents albums possédaient un aspect plus poétique, ce qui est encore le cas pour bon nombre de nos nouvelles chansons, mais je crois que ces dernières vont plus loin et possèdent un lien étroit avec le titre de l’album. Dans le pays qui est le nôtre, même dans la situation actuelle économiquement difficile, il est encore possible de voir des gens tomber amoureux au coin d’une rue. Je pense que l’album est très complexe de ce point de vue, tout en restant très varié d’un point de vue musical. Pour résumer, ce titre était une manière comme une autre d’attirer l’attention de nouvelles personnes et de capter à nouveau l’attention de ceux qui nous ont suivis à une quelconque époque de notre existence.
Lukas : La première chanson du disque est importante en ce sens car c’est une forme de narration introduisant le disque et expliquant ce nous avons souhaité exprimer. Nous avons conscience d’avoir souvent été présentés comme un groupe poétique jouant sur les émotions, mais ce n’est pas tout. Si certains pensaient que nous n’étions pas ouverts sur le monde et ce qu’il s’y passe, nous espérons avoir prouvé qu’il n’en est rien.

Nous apprenons de nos erreurs passées pour qu’elles ne se reproduisent plus, et je pense que nous sommes parvenus à nous réintroduire nous-mêmes avec ce disque.

Il y a quelques mois, vous aviez choisi de présenter Hips And Lips en tant que premier extrait de l’album. C’est un titre aux sonorités plutôt surprenantes...

Paul : Même si notre univers possède ses propres limites, nous avons toujours cherché à proposer un son varié. Nous restons le même groupe que nous avons toujours été mais tous les ingrédients ne sont pas toujours identiques d’une chanson à une autre. La décision de la sortir avant d’autres titres a été très naturelle et simple à prendre car de nos jours les radios semblent de plus en plus intéressées par les chansons possédant une certaine dimension électronique. Je suis sûr que certaines personnes ont été surprises en l’écoutant car l’étiquette de groupe de rock à guitares nous colle toujours à la peau, cette image de groupe de revival ! L’utilisation de sons électroniques atypiques n’est pourtant pas nouvelle, si tu écoutes des titres comme Limassol ou Acrobat sur notre premier album, le résultat est très proche ! Même d’autres chansons plus récentes comme Our Velocity ou The Kids Are Sick Again reposent sur une base électronique importante.
Lukas : C’est une chanson qui a beaucoup évolué depuis son écriture. Nous n’étions pas certains dès le départ du potentiel de ce titre, mais progressivement nous avons pris confiance en nous et l’avons intégré à l’univers de Maxïmo Park. L’idée de pouvoir encore surprendre les gens avec une chanson est plutôt plaisante il me semble. Bien sûr, les idées ne fonctionnent pas toujours, je pense par exemple au vidéo clip de The Kids Are Sick Again dont le résultat s’était avéré très différent de nos attentes initiales. Le jour où nous l’avons filmé, nous avions eu des problèmes de caméras et les éclairages n’étaient pas les bons, ce sont des éléments que tu ne peux pas toujours contrôler. Nous luttons contre ces choses-là, nous apprenons de nos erreurs passées pour qu’elles ne se reproduisent plus, et je pense que nous sommes parvenus à nous réintroduire nous-mêmes avec ce disque.

Vous avez maintenant quatre albums et plus de dix années de carrière derrière vous, quel regard portez-vous sur votre parcours ?

Paul : Nous ne savons pas ce qu’il se passera ensuite et nous essayons de ne jamais faire de plans. Sept années se sont écoulées depuis la sortie de notre premier album en 2005 et je me projette actuellement vers le dixième anniversaire de ce disque. C’est à ce moment-là que je ferais un bilan de ce que nous sommes parvenus à faire ensemble avec Maxïmo Park. Le groupe aura-t-il encore un sens pour chacun de nous ? Devrons-nous continuer à sortir des disques ? Tant que ces questions se posent encore, je pense qu’un groupe possède toujours un intérêt. Ce sont de bonnes questions. Dans un monde idéal, tous les groupes devraient faire cela et ne pas suivre une mécanique donnée sans réfléchir. Nous sommes toujours amis comme au premier jour tous les cinq mais je ne sais pas ce qu’il en sera au moment d’enregistrer un autre album. Il nous faudra d’abord passer d’un esprit de groupe en tournée à un climat propice à l’écriture.
Lukas : Nous cherchons toujours depuis nos débuts comment concilier les tournées et l’écriture de nouvelles chansons...
Paul : Je suis optimiste. Je sais que Duncan ou Lukas travaillent déjà de leur côté sur de nouvelles idées. Avec la technologie, tout est devenu plus facile. Nous pouvons enregistrer des bribes d’idées ou des démos n’importe quand. Il n’existe plus de barrières sur notre chemin !