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These New Puritans

Interview publiée par Amandine le 22 juillet 2013

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C'est sous une pluie diluvienne, quelques heures avant leur grand retour sur la scène du Café de la Danse, que nous retrouvons les jumeaux terribles de These New Puritans pour nous parler de la sortie de leur dernier album : Field Of Reeds. Entre private jokes et explications plus sérieuses, nous avons tenté d'en savoir plus sur les motivations des petits génies londoniens.

Apparemment, vous avez rencontré quelques difficultés pendant votre soudcheck : tout est prêt, vous êtes satisfaits ?

George : C'était compliqué pour qu'on se mette en place, cette configuration est toute nouvelle pour nous. Mais je pense qu'on est bons, ça devrait bien se passer. Par contre, il fait une chaleur assommante dans ce Café de la Danse, on est déjà épuisés.

Comme vous l'aviez fait pour votre album précédent, Hidden, chaque partie de chaque composition était déjà enregistrée et pensée avant d'entrer en studio : c'est important pour vous de découper dans le détail toutes les opérations ?

Jack : Oui, j'avais tout composé avant que l'on ne décide d'entrer en studio pour enregistrer Field Of Reeds. 99% de l'album était en fait écrit avant d'enregistrer, c'est ma façon de me conforter dans l'idée que ce sera le plus proche de ce que j'ai en tête.

Jack, pour Hidden, tu as appris le solfège et tu as appris à écrire des partitions, comme pour la musique classique, d'une façon très scolaire : cela a-t-il changé quelque chose pour ce nouvel album ? Cet apprentissage t'a t-il permis d'être plus précis sur certains points de tes compositions ?

George : Je ne suis pas certain que nous puissions réduire notre musique à l'écriture à proprement parler. Il y a aussi l'alchimie en studio et sur scène, non ?
Jack : C'est tout de même important pour que tous les musiciens aient une vision précise de ce que j'ai en tête mais en effet, le changement est plus de mon côté finalement et pas dans le résultat.

En parlant de changement, Sophie a quitté le groupe il y a quelques mois...

George : Elle n'a pas réellement quitté le groupe, elle n'a simplement pas beaucoup participé à l'élaboration de Field of Reeds... Elle a joué quelques concerts du Hidden Live et elle ne voulait ou ne pouvait plus s'investir comme avant dans le groupe. Il est vrai que son rôle n'a pas été très important ces derniers temps, mais nous ne sommes pas fâchés ou quoi que ce soit. Nous sommes restés très bons amis.

Mais son absence a-t-elle eu des répercussions sur la suite de These New Puritans ?

Jack : Je ne pense pas, finalement. Nous avons fait appel à de très bons musiciens pour pallier au départ de Sophie et tout s'est très bien passé.

Le fait d'être seulement trois à plein temps dans le groupe est nouveau pour vous. Concrètement, ça change quelque chose ?

George et Jack : Oui et non, en quelque sorte.
George : C'est différent lorsqu'on est entre nous ou en tournée car sa présence crée un vide mais musicalement, c'est assez similaire à ce qui pouvait se passer auparavant. Mais n'allez pas croire que nous sommes fâchés, elle est vraiment fantastique !
Jack : George, tu en fais trop, là ! (rires)
George : Plus sérieusement, nous voyageons maintenant avec sept musiciens, comme vous allez le découvrir ce soir. Il y a donc toujours du mouvement autour de nous avec tout ce monde.

(La serveuse lui apporte un verre avec une tranche de citron)
George : Pourquoi ce citron ? Juste pour faire beau ?

Non, tu peux le presser pour le mettre dans ton verre si tu veux...

George : Ah ! Ces Français, toujours très sophistiqués. Nous ne pouvons pas rivaliser avec vous, même musicalement. Et pourtant, nous y mettons tous nos efforts!

Comment est née la collaboration avec les musiciens qui sont présents sur l'album ?

George : Ce ne sont pas nécessairement des collaborations au sens propre du terme pour tout avouer.
Jack : Nous avons fait appel à beaucoup de personnes de milieux différents pour nous enrichir de leurs différentes influences et expériences. Par exemple, nous voulions un trompettiste un peu jazzy et nous nous sommes rendus compte que l'Angleterre regorgeait de ce genre de talents ! On ne connaît pas toujours l'existence de ces virtuoses et j'ai voulu chercher et faire appel à ce genre de personnes plutôt que de me tourner vers des musiciens extrêmement connus juste pour mettre des noms sur la pochette de Field Of Reeds. J'ai toujours trouvé ça ridicule.

Une nouvelle fois, il semble que vous ayez voulu faire de l'art pour l'art, sans aucune compromission ; ce n'est pas parfois difficile à véhiculer cette idée, notamment avec la pression des labels ?

Jack : Les personnes de notre label s'occupent du côté commercial. Ils font ça très bien et nous, ça ne nous intéresse pas le moins du monde. Le mec qui s'occupe de nous au label est un peu comme le frère de Van Gogh pouvait être avec Vincent : il croit en ce que nous faisons. C'est très important pour nous car de ce fait, il ne nous met pas la pression et nous pouvons continuer à faire ce que nous avons envie de faire.
George : De toute façon, je ne vois pas tellement comment nous pourrions répondre à des demandes spécifiques de la part d'un quelconque label, ce serait tricher, ce n'est pas dans notre nature.

Vos albums tournent toujours autour d'une symbolique assez précise : la numérologie et la magie pour le premier par exemple ; quel a été le concept particulier autour de Field Of Reeds ?

Jack : C'était moins évident cette fois-ci. J'ai voulu un retour à des choses plus simples. Je voulais mettre en lumière les sentiments obscurs de l'être humain.
George : Une grande mission (rires).
Jack : La musique de Field Of Reeds est beaucoup plus inscrite dans une tradition musicale que les albums précédents je pense. De nos jours, les groupes ont tendance à mettre de la guitare parce qu'il y a de la guitare dans la musique, c'est comme un fait avéré. Je ne voulais pas garder ces fausses habitudes (c'est d'ailleurs pourquoi nous avons abandonné la guitare). Je voulais retrouver l'essence de la musique.

Jack, tu avais apparemment beaucoup de mal au début de These New Puritans à entendre ta musique jouée par d'autres personnes parce que tu te rendais alors compte que ce n'était pas ce que tu avais réellement en tête lors de la composition. Où en es-tu de cela désormais ?

Jack : Tu veux dire entre les compositions premières et le résultat ?
George : Non ! Rappelle-toi ! Tu trouvais toujours que ce que tu retranscrivais n'était pas ce que tu avais en tête et ça ne te plaisait pas du tout. Tu disais qu'il y avait un fossé entre les deux.
Jack : Non, ce n'est pas ce que je voulais dire... C'était plus un fossé personnel que musical. Entre le moment où tu écris un morceau et celui où tu le joues devant des gens, tu te rends compte qu'en fait, plus rien ne t'appartient à partir du moment où tu le partages. C'est de ce fossé dont je parlais. Mais je suis plus à l'aise avec tout ça maintenant, je m'améliore je pense. George : Mais quand tu chantes tes propres compositions, il n'y a pas vraiment de distance, c'est réel !
Jack : Bien sûr ! Mais le morceau ne m'appartient plus, même si je mets le meilleur de moi-même quand je le chante ou le joue...

Vous aviez travaillé à une mise en scène très particulière et très élaborée pour le Hidden Live : avez-vous déjà pensé à quelque chose de similaire cette fois-ci ?

George : Le fait d'être avec sept musiciens sur scène va sans aucun doute créer une mise en scène spéciale, c'est certain. Je trouve personnellement que c'est parfait. C'est une version de nous et de notre musique qui nous représente parfaitement. Ce n'est ni trop emphatique, ni trop intimiste. Le fait que nous soyons pas mal de musiciens permet de créer des ambiances très étoffées mais nous gardons le caractère familial d'un petit groupe, c'est génial.
Jack : La taille adéquate je dirais.

Vous semblez très perfectionnistes dans vos démarches, notamment toi, Jack, et en même temps, vous voulez garder un son qui sonne live : ce n'est pas un peu antithétique ?

George : C'est extrêmement difficile de tenir cet équilibre fragile. Nous avons passé deux mois à répéter et à réarranger tout l'album pour le live et pour en faire quelque chose qui nous ressemble à tous.

Vous avez toujours des idées assez folles pour vos enregistrements comme par exemple l'enregistrement d'un vautour dans le studio...

George et Jack : Oui, en effet...
George : Mais il ne faut pas retenir que cette partie de notre musique !

Bien sûr que non mais, cette fois, vous avez brisé des centaines de vitres pour récupérer le son parfait et vous admettrez que ce n'est pas anodin !

Jack : A vrai dire, pour moi, c'est quelque chose de tout à fait normal (rires).
George : Tout ce qui peut nourrir la musique, nous sommes preneurs ! Que ce soit jouer une partition très classique ou enregistrer le bruit des vagues, il n'y a pas de différence pour nous.
Jack : Nous ne faisons pas ça pour nous faire remarquer, c'est juste que quand j'ai une idée, je fais tout pour la mettre en œuvre parce que j'ai l'impression que c'est ce qui pourrait manquer au morceau pour être parfait. Quand je compose, j'ai déjà en tête que tel et tel son devraient y être donc je ne fais ensuite que soumettre ça aux autres. « Fais ce que la chanson te dicte de faire », j'essaie de toujours suivre ce principe.

Cet album a une dimension cinématographique indéniable...

Jack : J'aime beaucoup cette idée, merci pour ce compliment.

Est-ce juste une étape dans l'évolution du groupe ou passons-nous à une ère totalement nouvelle ?

George : C'est juste ce que nous étions à ce moment de nos vies donc je pense que c'est une période, une étape mais certainement pas une révolution comme certains voudraient le penser.
Jack : Nous sommes en mouvement permanent. Je comprends que ce nouvel album puisse surprendre mais tant mieux ! Nous ne pouvons pas imaginer faire la même chose toute notre vie sans nous renouveler.
George : Si tu regardes une photo de nous qui date d'il y a trois ans, tu te diras que nous avons beaucoup changé. C'est pareil pour la musique. La pochette de l'album traduit d'ailleurs très bien ce changement.

J'ai lu dans une interview que vous aviez toujours une idée de ce que serait votre prochaine album car il découlait forcément des précédents : vous vous attendiez donc à un tel résultat avec Field Of Reeds ?

Jack : Je savais une chose : je ne voulais pas faire un disque de pop.
George : Oui, nous ne ferons jamais du Bruno Mars ou du Britney Spears, même si nous trouvons la production des disques de Britney extrêmement intéressante, ce n'est pas une blague.

L'ambiance du Hidden Tour, pendant lequel a été écrit votre nouvel album, a-t-elle influencé l'ambiance du disque ?

Jack : Je suis toujours en train de composer et même si je suis conscient que ce qui se passe autour de moi influence ce que j'écris, j'essaie toujours de faire en sorte que ça ne prenne pas le dessus sur le reste.
George : Et tu as déjà en tête quelques idées pour le prochain album ?
Jack : Plus ou moins...
George : On pourrait envisager un show où j'arriverais sur scène sur une grosse voiture et je jouerais de la batterie sur le capot. (Rires)

Pour les prochains mois, vous avez quelques concerts prévus mais que se passera-t-il ensuite ?

Jack : Pour le moment, nous ne prévoyons que de jouer ensemble, tous les sept.
George : Nous aurons d'autres concerts vers septembre ou octobre, nous verrons à ce moment-là si nous pouvons envisager de nouvelles choses ou si la mise en scène actuelle nous convient. Peut-être ferons-nous quelques concerts juste Jack et le piano car les dernières compositions le permettent.