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All We Are

Interview publiée par Olivier Kalousdian le 26 janvier 2015

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Brésil, Irlande et Norvège : trois pays traçant un triangle isocèle de belle taille et large de deux hémisphères sur la mappemonde, parfois réduite, du rock International. L'irlandais Richard O'Flynn (batterie et voix), la norvégienne Guro Gickling (basse et voix) et le brésilien Luis Santos (guitare et voix) ont décidé, un jour de l’année 2012, de pacifier les contrées rock de Liverpool et de donner à leur ville d’adoption, une leçon de pacification dans son passé tumultueux fait de guitares stridentes, de britpop acide et des hurlements à jamais propagées par les ondes dans l'espace infini, des groupies des éternels Fab four.

All We Are (aka AWA), c'est leur nom, prennent soin de leurs racines jazz et R&B pour mieux laisser germer un groove « smooth » et blanc, mélange hétérogène de trois visions musicales apaisées issues de trois cultures et trois nationalités différentes. Aperçus à Paris au Pitchfork Music Festival en opening party le 16 octobre dernier, et attendus au Badamoum le 16 février prochain, Guro, Richard et Luis dressent le bilan de leur jeune carrière et d'une année 2014 qui aura été celle de la mise en route de leur premier album éponyme et d'un succès d'estime qui ne demande qu'à perdurer.

Le nom de votre groupe, All We Are, peut révéler plusieurs interprétations. Quel est le sens premier que vous avez voulu donner à ce nom ? Y faites vous référence à vos diverses nationalités ?

Effectivement, nous interprétons notre nom de groupe de façon très littérale. Quand nous avons terminé notre parcours d'étudiants, nous nous sommes dits que tout irait bien tant que nous resterions ensemble. Et la meilleure façon de faire cela était de former un groupe, d'où notre nom. C'est tout ce que nous faisons et tout ce que nous voulons être.

Donc il n'y a aucune référence au titre All We Are du groupe heavy metal Allemand, Warlock ?

(rires) On aurait aimé ! Mais nous ne connaissions même pas ce groupe avant de créer le nôtre.

Quand et comment avez-vous décidé que vous entreprendriez des carrières de musiciens ?

Nous avons tous toujours joué et composé des chansons, et ce depuis que nous étions enfants. Nous aimions cela à cette époque et nous aimons toujours cela. Si tu réfléchis bien, c'est quand même le meilleur job au monde, non ?

All We Are est le titre éponyme de votre premier album. Vous l'avez écrit, isolés dans des petites cabanes sur des montagnes de Norvège et du Pays de Galles. Pourquoi ce choix ?

Ce n'étaient pas vraiment les lieux en eux-mêmes qui comptaient, mais l'isolement que nous ont procuré ces lieux. Cela nous a permis de nous concentrer totalement sur l'univers d'All We Are que nous avons créé. Nous avons oublié le temps qui passait pour simplement jammer ensemble, dans note bulle, de jour comme de nuit. C'est notre manière favorite d'écrire des chansons.

Nous avons créé un studio et avons passé la plupart de notre temps dans ce lieu à travailler cet album.

Vous êtes ensuite allés enregistrer votre disque à Liverpool, avec l'aide du fameux Dan Carey (Bat For Lashes, Hot Chip...). Par quoi avez-vous été attirés dans son travail ? Comment l'avez-vous rencontré ?

Nous avons choisi de répéter dans une école abandonnée de Liverpool. Là, nous avons créé un studio et avons passé la plupart de notre temps dans ce lieu à travailler cet album. Mais, l'enregistrement lui-même s'est passé à Londres avec Dan Carey. Nous avions eu quelques précédentes expériences avec d'autres producteurs avant de rencontrer Dan, mais quand nous avons enregistré le titre, Feel Safe avec lui, nous avons eu un déclic. Il est incroyable, c'est incontestablement le maître ! Nous nous sommes immédiatement compris et cela devenait totalement logique de faire tout l'album avec lui.

Vous avez souvent décrit votre musique comme étant du « Psychédélique Boogie ». Dans quels univers musicaux avez-vous grandi ? Quelles sont vos principales influences musicales ?

Bien que nous ayons grandi dans trois pays distincts, nos univers musicaux ne sont finalement pas si différents que ça. Nous avons adoré les années 90 et le hip-hop, la g-funk et la soul. Tous les courants musicaux qui donnent envie de groover en fait !

Il y a même quelque chose de très jazzy dans un titre comme I Wear You. Avez-vous suivi des cours de solfège ? Étiez-vous entouré par des familles musiciennes ?

Nous assumons cette influence jazzy dans ce titre, sans revendiquer le jazz comme une influence majeure. D'ailleurs, nous n'avons jamais eu d'éducation musicale ou pris de cours de solfège.


Vous avez été nominés pour le prix GIT Awards à Liverpool cette année. Qu'est-ce que cela a changé dans votre carrière ?

Nous adorons la scène musicale de Liverpool dont nous nous sentons vraiment proches. Il se passe tellement de belles choses artistiquement parlant là-bas depuis des années que cette nomination fut une grande fierté pour nous. Être reconnus dans notre ville d'adoption – et quelle ville question musique ! – en tant que groupe et, qui plus est sachant tout le dur travail que nous avons abattu au cours de ces dernières années, c'est quelque chose qui nous a donné et qui continue de nous donner une motivation exacerbée.

Vous avez tous suivi les cours du Liverpool Institute For Performing Arts où vous vous êtes rencontrés il y a quelques années. Cet institution reconnue et vouée aux arts a-t-elle été un moteur dans la vision artistique que vous défendez aujourd'hui ?

Nous avons vraiment passé de très belles années au LIPA. Nous avons passé beaucoup de temps à jouer de la musique là-bas, mais chacun de notre coté au départ. Nous avons attendu d'être diplômés avant de former All We Are. Nous ne pouvons pas dire que le LIPA a été une influence à proprement parler dans notre élan artistique musical actuel, mais c'est le lieu de notre rencontre et il occupera toujours une place bien à part dans notre mémoire collective.

Vous êtes signés sur le très respectable label Domino Records. Comment les avez-vous rencontrés ?

Nous sommes très fiers de faire partie de l'écurie de Domino Records. Quand nous avons sorti notre premier single auto-produit, Utmoost Good, il y a environ un an et demi, nous avions organisé une soirée de lancement à Londres. Des gens de Domino Records étaient dans le public ce soir là et il se trouve qu'ils ont tout de suite accroché à notre musique. Nous avons rapidement signé avec eux et nous sommes restés très proches, depuis ce jour-là.

Vous cumulez plusieurs nationalités : Anglaise, Brésilienne et Norvégienne. Qu'est-ce que ce melting-pot culturel apporte à votre musique et à votre vision artistique au sein de All We Are ?

En fait, notre vision artistique en tant que groupe n'est pas si influencée que cela par nos multiples nationalités. All We Are doit plus aux longues nuits blanches passées à jammer tous les trois ensemble, qu'au mélange de nos cultures. Nous écrivons tous les titres collégialement ; nous nous réunissons pour jouer et jammer jusqu'à ce que quelque chose de bon en sorte, parfois après toute une nuit. A partir de là, nous exploitons ces idées jusqu'à les concrétiser en studio. Ce que nous faisons le mieux c'est jouer ensemble, en live. C'est exactement ce que nous avons voulu retranscrire sur ce premier album studio. Tous les instruments ont été enregistrés live, dans la même pièce et quasiment en une prise à chaque fois. Dan et nous-mêmes avons passé pas mal de temps à transformer cette pièce pour qu'elle sonne correctement afin d'y enregistrer nos instruments. Dan a également beaucoup insisté pour installer des lasers et des stroboscopes pour créer une ambiance visuelle dans cette pièce. Ce fut vraiment un mois entier incroyable à vivre pour nous tous.

D'un autre coté, est-ce que vos différents backgrounds culturels peuvent compliquer les les rapports au sein du groupe ?

Compliquer ? Disons qu'il y a très souvent du whisky, de l'Aquavit et de la Cachaça durant nos sessions d'écriture. Donc, oui, en un sens ça peut être compliqué parfois (rires) !

En trio, impossible de se cacher derrière quelqu'un d'autre sur scène.

Le fait de n'être « que » trois musiciens dans un groupe, est-ce plus facile ou plus difficile quand vous jouez live ?

Trois, c'est le chiffre magique de toute façon (rires). Plus sérieusement, nous sommes très fiers du son que nous arrivons à produire à trois. En trio, impossible de se cacher derrière quelqu'un d'autre sur scène. Être peu nombreux à jouer dans un groupe t'oblige à en faire toujours plus.

Vos titres sont souvent très doux, voire « smooth » (ndlr : « moelleux »). En tant que personnes, êtes-vous aussi relax dans votre vie de tous les jours ?

Exactement. Nous sommes des gens très doux et qui vivent de façon apaisée. Et nous comptons bien le rester !

On devine votre amour et votre apprentissage du graphisme et des arts visuels au travers de votre logo et de l'artwork de votre disque. Qui est à l'origine de ce travail graphique ?

Leif Podhajsky a effectué tout le travail graphique de notre album et celui de notre logo. Nous sommes des fans de son travail et quand il a répondu positivement à notre demande pour se pencher sur notre album et sur notre logo, nous étions aux anges. C'est un artiste brillant que nous recommandons vivement. Ceci dit, il n'a rien à voir avec le Lipa... (rires)


Selon vous, qu'est-ce qui fait de Liverpool une ville si prolifique en termes de groupes et de mouvements artistiques ?

Liverpool est une ville qui possède un gros héritage musical et, toute l'année, il y a de remarquables concerts et événements culturels de programmés. Tout cela fait qu'il y a constamment de nouveaux endroits live qui ouvrent, par exemple. Et comme c'est une relativement petite ville, tout le monde connaît tout le monde et il s'y pratique grande solidarité entre artistes.

Quand vous êtes en tournée, y a-t-il une playlist qui ne vous quitte pas ?

En ce moment, nous faisons tourner en boucle l'album Regulate de Warren G.

Votre carrière démarre à peine, mais y a-t-il un rêve que vous aimeriez concrétiser dans vos vies de musiciens ?

Je pense que le rêve de chaque groupe Anglais, c'est d'être en headline au Glastonbury !

Une question « classique », mais qui prend tout son sens avec un groupe basé à Liverpool : Beatles ou Rolling Stones ?

Les Beatles bien sûr ! Parce que ce sont de purs génies et des Scouses (ndlr : expression typiquement locale désignant ce qui vient de ou qui est fait à Liverpool) !