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Razorlight

Interview publiée par Pierre-Arnaud Jonard le 24 octobre 2018

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Dix ans après un troisième album qui aura laissé perplexe les critiques, Razorlight reviennent avec un nouvel opus particulièrement réussi. Certains comebacks ne devraient pas même voir le jour mais celui des anglais est superbe. Olympus Sleeping montre un groupe qui n' a rien perdu de sa verve créatrice et Johnny Borrell possède toujours ce talent pour écrire la pop song parfaite. Rencontre avec ce dernier, sans aucun doute l'un des musiciens les plus attachants de sa génération.

Aura-t-il fallu attendre dix longues années pour avoir enfin ce quatrième album de Razorlight parce que les critiques n'avaient pas été tendres avec le troisième ?

A l'époque, oui, les critiques m'avaient affecté mais ce n'est pas la raison. Le troisième album de Razorlight était un croisement hybride entre quelque chose de poétique que je voulais différent de ce que nous faisions avant et ce même côté pop que nous avions sur les deux premiers albums que le reste du groupe voulait perpétuer. Andy a ensuite quitté le groupe. Après son départ, j'ai écrit un morceau. On l'a enregistré avec Skully le batteur et Steve Lillywhite à la production mais la maison de disques ne l'a pas aimé, voulant un tube ou rien. Après tout cela, je me suis retrouvé le dos au mur. Cela signifiait pour moi la fin de la première période de Razorlight parce que la maison de disque n'aimait rien de ce que je produisais. J'ai quand même essayé d'enregistrer ce quatrième album pour Razorlight mais l'inspiration était partie. Ce n'était pas de la merde mais ce que je produisais manquait d'âme.

Tu as décidé du coup de sortir un disque solo ?

Oui. Tout d'un coup pour Borrell 1, l'inspiration est revenue, comme par magie.

Durant toutes ces années tu as pensé qu'il y aurait un futur pour Razorlight ?

Oui. J'ai tout mis dans mes deux albums solo mais j'ai toujours su qu'il y aurait un futur pour le groupe.

Est-ce que le succès n'est pas arrivé trop vite pour vous ?

C'est possible. Au début des années 2000, je ne prenais pas de drogues, ne buvais pas. Lorsque je vois notre carrière dans le rétroviseur, je me dis que c'est allé trop vite, en effet. Malgré cette rapidité inhérente au rock, celui-ci peut te faire comprendre beaucoup de choses sur la vie.

Tu avais dit dans le passé que cela te gênait d'avoir été classé indie mais qu'aujourd'hui c'est au contraire quelque chose qui te plait...

Les groupes n'aiment pas être catalogués mais avec le recul je me demande pourquoi j'ai eu cette réaction. J'adore ce genre musical. Pour moi, c'est le rock'n'roll. C'est pour ça que nos morceaux n'excèdent pas les deux, trois minutes.


Comment les choses se sont-elles passées pour ce disque ?

Je me souviens que je travaillais avec mon maçon dans ma maison au pays basque. Mon batteur m'a appelé pour me dire de venir jouer à Londres. Je me suis dit, si ça le fait on y va sinon tant pis je laisse tomber. Et en fait l'étincelle était là.

Malgré cette longue pause, Razorlight a toujours continué à donner des concerts...

J'ai été ému par le concert que nous avons donné l'an dernier à Paris. Cela m'a donné une nouvelle énergie et beaucoup d'envie.

Comment as-tu rencontré Martin Chambers, le batteur des Pretenders qui officie sur ce disque ?

Le premier album des Pretenders a été une grande influence pour moi. Je me souviens qu'aux débuts de Razorlight nous étions surtout inspirés par les Pixies et les Buzzcocks. Il y a quelque temps j'étais à l'anniversaire de Dave Steward de Eurythmics. Il y avait Clive Burke le batteur de Blondie et Martin Chambers. Je me suis dit à qui vais-je parler... Clive prenait un selfie. Je suis donc allé voir Martin qui avait du temps devant lui et m'a dit OK pour venir faire l'album avec nous. J'adore jouer avec Martin. C'est comme mon frère rythmique dans la musique.

Comment avez-vous enregistré l'album ?

On l'a fait à trois, David (Ellis), Martin et moi. Tout le monde a joué un peu de tout. David a écrit des parties de batterie. Je ne sais plus entre David et moi qui joue les parties de basse ou de guitare sur tel ou tel morceau.

Carry Yourself sonne comme un classique de Razorlight...

J'ai beaucoup aimé faire ce morceau. Il est très Razorlight effectivement mais il possède une rythmique disco. Je n'avais encore jamais fait ça. Je voulais un morceau avec un vrai groove. On l'a écrit à Paris avec David.

Brighton Pier est une déclaration d'amour à Brighton ?

C'est un très vieux morceau. Je l'ai écrit en 2003. Je n'arrivais jamais à trouver la bonne formule pour ce titre et finalement pour ce disque la chanson a enfin trouvé ses habits. Il y a un côté Randy Newman dans ce titre que j'aime bien.

Got To Let The Good Times signifie que tu te sens heureux en ce moment, non ?

Je jouais partout avec mon banjo au pays basque. J'ai fumé un gros pétard et puis ce titre m'est venu direct...

Tu vas te concentrer à nouveau sur la carrière de Razorlight à partir de maintenant ?

J'ai envie de me concentrer sur Razorlight, sortir des singles comme on le faisait dans les années 50, à partir de l'an prochain. J'aimerais aussi sortir un autre disque solo bientôt.


Comment avez-vous eu l'idée de sortir quatre singles simultanément cet été ?

C'était pour épater ma maison de disques. Ils trouvaient que ce n'était pas bien pour le streaming mais je leur ai dit : on a rien sorti depuis dix ans, on ne va pas juste sortir un single ! Du coup on a sorti ces quatre morceaux.

L'album est très dans l'esprit du disque à singles...

Oui, c'est l'une des composantes du groupe. J'avais perdu ça sur notre troisième album, ce format chansons classique. J'étudie Si Je Suis Fou de Daniel Balavoine en ce moment. C'est magique. Il n'y a rien de plus fort que d'évoquer des choses sur un format de trois minutes.

J'ai l'impression que sur ce disque la guitare est plus en avant que sur vos premiers efforts.

C'est vrai. David est un génie. C'est magique pour un compositeur de travailler avec lui. C'est une machine de guerre à riffs.

Vous partez bientôt en tournée ?

Oui, avec Skully avec qui je joue depuis longtemps. On a un nouveau bassiste qui est top.

Vous jouez dans de grandes salles en Angleterre ?

On joue au Forum à Londres qui est une salle de 2000 places. C'est difficile de ne pas rentrer dans le côté business en se disant The Killers ont vendu 12000 places, je dois en vendre plus, mais je trouve que ce n'est pas la bonne façon de penser.

Il y aura des dates françaises ?

Bien sûr. S'il n'y en a pas, je change de tourneurs (rires). J'adore la France. Je me sens tellement bien lorsque je suis dans mon village au Pays Basque.