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These New Puritans

Interview publiée par Pierre-Arnaud Jonard le 10 avril 2019

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Le nouvel album de These New Puritans est sorti fin mars. Inside The Rose est un disque splendide et ambitieux qui explose les frontières de la pop music pour accéder à une musique à nulle autre pareil. Rencontre à Paris avec le charmant Jack Barnett, quelques jours avant le lancement de leur tournée anglaise.

Vous n'aviez pas sorti d'album depuis 2013, qu'avez-vous fait pendant tout ce temps ?

Nous n'avons pas chômé donc nous avons des excuses... Nous avons sorti un album live en 2014, nous avons beaucoup tourné. Nous avons fait différents trucs musicaux, des commandes. J'ai aussi déménagé à Berlin. Nous faisons tous les arrangements pour nos disques donc cela prend du temps.

Vous avez débuté l'écriture de l'album en 2015. Le processus de création a été long...

Oui. Si ce disque avait été créé dans les années 60, nous aurions eu des tas de gens pour l'album, des arrangeurs, des musiciens, des photographes mais puisque nous faisons tout nous-mêmes, c'est long. Faire de la musique est facile à 90%. Ce sont toujours les 10% restants qui sont difficiles.

Tu vis à Berlin. C'est toujours une ville très créative ?

Ça l'est toujours pour la musique électronique. Mais je pourrais faire ce que je fais en vivant dans une autre ville que Berlin. Le lieu en lui-même ne m'influence pas musicalement. Ce sont plutôt les gens que je peux y rencontrer qui peuvent avoir une influence sur ma création.

Est-ce que vous pensez à vos chansons comme des pièces de musique plutôt que des morceaux ?

Je n'y pense pas. Cela reste de la musique. Il y a des éléments qui viennent du classique dans ce que nous faisons et notre musique est complexe. On assimile souvent la musique classique à la musique complexe et pas le rock. Mais je ne fais pas cette distinction.

Le premier morceau de l'album, Infinity Vibraphones, fait très musique répétitive. Es-tu influencé par des compositeurs comme Steve Reich ?

J'aime beaucoup Steve Reich. Enfant, j'aimais beaucoup Captain Beefheart aussi. Même si nos idées ne sont pas purement pop, je ne veux pas faire quelque chose qui soit abstrait. La musique abstraite ne m'intéresse pas.

Vous me faites parfois penser à Japan au niveau du son...

Je ne connais pas bien Japan et David Sylvian. On me l'a souvent dit mais je ne connais pas vraiment. Vu que tu me le dis à ton tour, je vais écouter cela.

Vous citez Bacon, William Blake, Tarkovski... Vous considérez-vous comme un groupe intello ?

Non. Je n'aime pas les élites. Nous n'avons aucunement l'envie de ne faire de la musique que pour un petit groupe de gens. Je suis inspiré par William Blake ou Tarkovski parce que les génies sont toujours inspirants.

Votre musique est contemplative comme le sont les films de Tarkovski...

C'est sûr que notre musique n'est pas celle de la bande originale d' un blockbuster hollywoodien. Je pense que les gens qui aiment ce que nous faisons sont des passionnés de musique. Ce n'est pas de la musique qu'apprécieront les gens qui n'en écoutent que sur Spotify.

Comment avez-vous rencontré Scintii qui assure votre première partie durant votre tournée européenne et qui chante sur trois titres de votre album ?

Elle est incroyable. Elle vient de Taiwan, a un talent extraordinaire. Nous avons un ami commun producteur qui nous a mis en relation. Elle fait la première partie de notre tournée et chante avec nous sur certains de nos morceaux durant notre set.

Que représente ce corps nu sur la pochette du nouvel album ?

Cela représente la beauté, le sexe, la transcendance. Elle a été faite par une amie photographe avec qui nous travaillons depuis des années. C'est une image de la sensualité.

Il y a un morceau sur l'environnement dans l'album, Where The Trees Are On Fire. Vous vous sentez une dimension sociale ?

C'est un morceau que j'ai rêvé. C'est difficile de dire ce que c'est ou ce que cela signifie. En général, lorsque je rêve de musique, c'est de la très mauvaise musique : de la pop 80's sans intérêt. Mais parfois, comme là, je peux rêver d'un beau morceau...

Vous avez un discours assez ambitieux. Voulez-vous marquer l'histoire de la musique ?

C'est difficile à dire. Faire de la musique est la meilleure drogue qui soit. Nous jouons de la musique pour nous-mêmes, même si l'audience reste bien sûr la chose la plus importante. Ce que je sais, c'est que nous voulons proposer la meilleure musique possible.

Les critiques du disque ont été excellentes. Est-ce que cela vous met de la pression ?

Cela fait plaisir. En général, nous avons de bonnes critiques. Pour cet album, nous en avons eu également de très mauvaises. Cela m'intéresse d'avoir également de très mauvaises critiques. Ce qui ne m'intéresse pas, en revanche, c'est d'en avoir de moyennes.