Trois ans après le splendide Fix Yourself, Not The World, les Wombats reviennent avec un tout aussi réussi Oh! The Ocean. Un disque pas loin d'atteindre la perfection pop. Entretien avec le fort sympathique Matthew Murphy.
Vous avez été numéro un en Angleterre avec Fix Yourself, Not The World, votre album précédent. Est-ce que cela vous a fait ressentir une quelconque pression au moment d'enregistrer ce nouvel opus ?
C'est évidemment quelque chose de spécial que de devenir numéro un mais, en fait, non. Cela nous a fait très plaisir d'être en tête des charts mais à vrai dire je préfère sortir un disque que les gens vont écouter des dizaines de fois plutôt que d'être numéro un.
Tous vos albums à part le premier ont atteint le Top 10 des ventes en Angleterre. C'est important pour un groupe de cartonner dans les charts ?
C'est super évidemment, mais tu as des tas d'artistes qui vont sortir des albums qui seront top 10 et qui ne resteront pas dans l'histoire de la musique. J'ai envie que l'on continue d'écouter nos disques dans le futur. C'est cela le plus important.
J'avais trouvé Fix Yourself, Not The World positif. Ce nouvel album l'est aussi, il l'est peut-être même encore davantage...
C'est possible. J'ai envie d'écrire des morceaux qui célèbrent la vie. Je peux écrire d'une manière cynique mais c'est cool aussi d'être positif.
Tu exprimes une fois de plus ton anxiété dans nombre de titres de l'album, mais dans le même temps, la musique, elle, est positive...
Oui, c'est comme une balance. Je n'avais jamais fait trop attention à cela mais c'est vrai. Je suis surtout concentré à ne pas répéter les mêmes recettes d'un disque à l'autre.
L'anxiété fait partie de ta vie. Elle a toujours été là. Je sais que ce disque est né de cette sensation de redécouvrir le monde un jour où tu étais face à l'Océan. Tu as ressenti les choses comme dans Like A Virgin de Madonna ? Tu te sentais vierge à nouveau ?
C'est un peu ça, oui. Mon anxiété était liée à ma consommation d'alcool et de drogues qui était elle-même liée au besoin que j'avais de m'échapper du réel. J'ai arrêté l'alcool et les drogues. Quand je me suis retrouvé ce jour-là face à l'océan je me suis rendu compte peut-être pour la première fois de ma vie de la vraie beauté des choses.
On est toujours je pense influencé par son environnement : tu habites Los Angeles et ce disque sonne très américain, je trouve...
Je n'y avais pas pensé mais c'est possible. On a en plus de cela travaillé avec un producteur américain, John Cougleton. C'est vrai que ce disque peut faire penser aux Beach Boys à certains moments. Tu as raison, cet album a un côté californien.
Le disque démarre avec Sorry I'm Late, I Didn't Want To Come, la pop song parfaite. Cela ne te met pas trop de pression d'écrire un tel morceau et de te dire qu'il va falloir sortir des titres aussi forts pour tout le reste du disque ?
Peut-être. En tout cas ce morceau est venu facilement. Il a été facile à écrire. Je suis content que tu l'aimes.
Ce disque est un album qui, même s'il ne ressemble pas à ceux des Jam, fait penser à eux avec des titres qui pourraient chacun être un tube...
J'aime les pop songs. Je suis content que tu cites les Jam parce que cet album est direct comme l'étaient leurs disques. On a voulu aller vers un son chaud et direct.
C'est amusant que les trois premiers titres de l'album soient les trois premiers singles tirés du disque...
J'ai pensé cet album de la même manière que je pense aux setlists des concerts. Tu veux pour les concerts la meilleure setlist possible, j'ai eu envie de titres qui accrochent les gens comme tu peux les accrocher pour les live.
D'ailleurs en concert vous sonnez très rock, moins pop que sur disque...
Oui, nous sonnons différemment live qu'en studio. Pour ce disque j'ai pensé aux ravages de l'IA. J'avais envie d'un disque sur lequel tu puisses entendre les erreurs, les accidents.
Les prises ont été live de ce fait ?
Certains morceaux ont été faits en prise live, oui. John ne voulait pas écouter de demos. Il voulait que ce soit frais et chaleureux. C'est nécessaire après six albums de retrouver cette fraicheur. On a passé six semaines en studio. Pour les disques précédents on travaillait en partie à Los Angeles, en partie en Angleterre. Là on a travaillé au même endroit tous ensemble durant un temps déterminé. Cela amène à plus de spontanéité.
Ce que j'aime chez vous c'est que vous êtes un groupe pop mais avec des paroles complexes que n'ont pas généralement les groupes pop...
Tu as raison. J'ai travaillé avec des artistes pop qui ne veulent parler que de choses simples mais je ne peux pas faire ça.
Pourquoi avez-vous choisi John Congleton pour produire ce disque ?
On avait fait les quatre derniers albums avec Mark Crew. Il a aussi produit mon projet parallèle. J'adore Mark mais on devait prendre des risques et donc prendre un autre producteur. John est super. Il a bossé avec un tas de gens. J'aime son approche. J'ai compris et aimé sa façon de travailler, j'espère qu'on travaillera à nouveau avec lui dans le futur.
Il y a pas mal de morceaux sur l'Amérique dans ce disque. Je pense notamment bien sûr à I Love America And She Hates Me. Tu as une relation ambivalente avec l'Amérique, une relation d'amour/haine ?
Il y a plus de choses que j'aime que je déteste en Amérique. Je me sens encore comme un Alien aux Etats-Unis. C'est tellement différent du nord de l'Angleterre où j'ai grandi... J'aime l'Amérique car c'est un pays qui rend créatif.
Tu habites Los Angeles mais tu as grandi à Liverpool. Même si votre son devient de plus en plus américain est-ce que tu as été marqué par les groupes de Liverpool : les Beatles, Echo And The Bunnymen ou Pale Fountains ?
Je pense. Mon père écoutait les Beatles la moitié du temps et Eagles l'autre moitié. Les Beatles sont définitivement dans ton sang quand tu viens de Liverpool.
Vous allez jouer en Angleterre en mars dans de grandes salles. C'est cool pour vous car je sais que tu n'aimes pas jouer dans les petites salles...
C'est vrai. Je ne me sens jamais trop bien quand je joue dans de petites salles. Dans les grandes salles, tu ne vois rien et c'est cool. Dans une petite salle tu vois le moment où quelqu'un envoie un texto, celui où une autre personne commence à pleurer parce qu'il a reçu une mauvaise nouvelle. J'aime bien jouer dans les grandes salles car je peux me cacher. C'est impossible dans une petite salle. Le pire c'est de jouer en acoustique pour un tout petit événement.
Vous commencez votre tournée européenne par Paris avec un concert au Trabendo. Une salle pas trop petite pour toi ?
Non, mais j'aimerais jouer dans d'autres salles à Paris, car même si je n'ai rien contre le Trabendo, on y a déjà joué quatre fois. J'aimerais bien faire l'Olympia un jour. Cela viendra, je l'espère.
Après toutes ces années vous restez amis dans les Wombats ?
Oui. Nous nous entendons bien. On ne se voit pas énormément vu qu'on habite un peu partout sur le globe, à Los Angeles, Oslo et en Angleterre. Mais on est toujours contents de se retrouver pour aller en studio ou partir en tournée.