A peine dix-sept mois après un premier album, le revival 60's de la petite famille des Magic Numbers poursuit sa route au soleil. Rencontre avec un groupe qui garde sa fraicheur et son gout des mélodies pop tout en continuant d'en apprendre sur le métier, dans la joie et la bonne humeur.
Après le large succès de votre premier album, est-ce que vous êtiez nerveux à la sortie du deuxième?
Romeo : Oui évidemment, on a voulu faire au moins aussi bien que le premier, voire mieux. Mais bon on n'a jamais vraiment fonctionné comme ça... à la fin de la journée tu veux juste pouvoir écouter ta musique et t’être éclaté dessus, être heureux de faire ça, sans penser à la suite forcément…
Le fait d’être signés sur une major, qui attend certainement un certain succès, relatif au premier, cela vous influence-t-il pendant votre phase de travail ?
Michele: Non il ne faut pas se laisser influencer par ça. Il faut laisser faire les choses comme elles viennent, sinon ça ne sera plus jamais complètement toi, ça ne correspond plus à l’identité du groupe.
Combien de temps avez-vous pris pour travailler sur ce nouvel album ? Tout semble avoir été très vite avec la sortie du dernier single de votre premier album en février (I See You, You See Me) et celle du premier de votre second en novembre (Take A Chance)...
Romeo : On a passé deux mois et demi sur l’enregistrement à New York. Trois ou quatre des nouveaux titres étaient déjà écrits à l’époque du premier album, mais le temps qu’on les enregistre en studio, elles avaient déjà tellement changé... et, oui, dès janvier, février, nous savions déjà quelles chansons allaient apparaître sur le deuxième opus.
Pourquoi vous êtes vous retrouvés à enregistrer cet album à New York ?
Romeo : Nous avons grandi à New York et nous y étions pour les vacances de Noël, alors nous en avons profité pour visiter ce studio, qui était très bien, et vraiment pas cher. En Angleterre, c’était à peu près deux fois plus onéreux !
Michele : Et puis une fois l’enregistrement terminé on a pu directement partir en tournée là-bas, donc c’était logique.
Romeo : On n’a vraiment jamais vu de notre vie un tel studio, si confortable, c’est vraiment le studio de rêve !
Michele : Oui et ça a vraiment influé sur notre façon de travailler. Le matin au réveil on avait qu’une envie c’était d’y courir pour aller enregistrer, c’était vraiment un plaisir ! Nous y allions détendus et ça nous a vraiment inspirés. C’était vraiment comme de jouer à la maison.
Selon vous, quelle est l’évolution la plus marquante entre vos deux albums ?
Michele : Cn s’est beaucoup plus laissé aller, on a pris confiance à jouer live dans ce studio et je pense que ça s’entend.
Romeo : Cette fois-ci on savait exactement comment on voulait enregistrer le tout, en ajoutant une touche d’excitation à jouer live des beaux morceaux. Je pense que quelqu’un qui n’a entendu que le premier album sera surpris du changement en si peu de temps, certaines chansons sont plus rock, les filles participent plus activement, Angela prend la voix principale pour sur Undecided, et Michele a pratiquement tout fait sur Take Me Or Leave Me.
Comment ces deux chansons sont-elles arrivées dans le projet ? C’est inédit pour le groupe.
Michele : On savait que ça pourrait apporter quelque chose de nouveau à cet album d’ajouter de tels éléments qui n’étaient pas sur le premier. Et puis dans toute la collection de chansons que nous avions, celles-ci marchaient particulièrement bien au cœur de l’ensemble. Et puis c’était bien de se bousculer un peu pour mettre nos personnalités en avant. J’ai moi-même écrit Take Me Or Leave Me, entre autres chansons que je joue comme ça à la guitare, et je suis vraiment tombée amoureuse de celle-ci et elle s’est retrouvée sur le disque. Mais je n’avais pas imaginé au départ qu’elle finirait avec des cordes et ces beaux arrangements. C’est en quelque sorte comme si un rêve s’était réalisé. Et c’était une nouvelle expérience d’affirmer ainsi une nouvelle confiance en moi aussi.
En somme, le nouveau Magic Numbers est plus intime ?
Michele : Oui moi je trouve que beaucoup de chansons sont plus personnelles.
Romeo : Oui ça touche de très près à ce qu’on est. Bon, mais quand on a écrit un texte c’est toujours difficile d’en parler mieux que ce que dit la chanson elle-même. Cela dit, globalement ce que je peux dire, c’est qu’on ressent davantage ce que nous quatre voulions tous ensemble.
Comment des cordes se sont retrouvées dans les arrangements ?
Romeo : J’ai toujours voulu travailler avec Robert Kirby, qui a collaboré avec Nick Drake. Il a fait de grandes choses et j’adore les cordes.
Michele : Oui ça donne du relief aux mélodies, et quand on a écrit Boy , c’était évident qu’il fallait une section de cordes dessus...
Romeo : On l’a d’ailleurs appelée la « French Section » !(il commence à fredonner Dadadadaaaaa...) et on avait même un délire là-dessus qui faisait : Tous reprennent en choeur un air : « You are French, she is French, he is French, why is it so French? » (rires)
Michele : Bon mais finalement ce truc n’est pas sur le disque! (rires)
Romeo : Oui mais toujours est-il qu’on a vraiment eu un coup de cœur pour cette section.
Angela : Et puis ça nous a fait aborder un autre monde musical quelque part, et trouver une façon différente de travailler les morceaux.
Puisqu’on parle de « French », je crois que Romeo a travaillé avec Jane Birkin récemment (enfin moitié French plutôt !) ?
Romeo : Elle avait écouté notre premier album et elle l’a beaucoup aimé. Particulièrement des chansons comme I See You, You See Me, et donc elle m’a demandé de lui écrire quelque chose du même genre. C’est difficile de trouver à quelqu’un d’autre comme elle quelque chose qui lui irait bien. Pendant ce temps là, on était en train d’enregistrer nos propres B-sides, et j’avais cette chanson en démo, juste à la guitare. J’avais aussi un texte à côté qu’elle adorait, et ça collait très bien. Mais c’était la première fois que j’offrais une chanson à quelqu’un d’autre et je me demandais ce que ça pourrait donner, j’étais curieux d’entendre ce que ça donnerait. Et bien sûr elle l’a interprété magnifiquement. Elle a totalement saisis le sens et l’atmosphère que j’avais en tête, et vraiment j’adore le résultat. Maintenant j’aimerais bien renouveler cette expérience.
Ca n'a pas été compliqué pour vous de passer derrière quelqu’un comme Gainsbourg ?
Michele : Mais elle est très ouverte...
Romeo : Oui on en a parlé aussi avec elle, parce que j’adore ses chansons, et finalement j’ai écrit ma chanson sans trop y penser, je l’ai faite pour elle comme c’est venu, même si je sais que c’est une icône des 60’s.
Justement, votre son a gardé des sonorités très 60’s
Romeo : Selon moi ce son représente quelque chose de pur, en quelque sorte. C’est beaucoup une affaire d’arrangements je crois. Et nous adorons cette espèce de naïveté dans l’écriture. Les groupes de ces années là sont des pionniers et il est bon aujourd’hui de regarder aussi dans leur direction parce qu’on y trouve l’essentiel de ce qu’on recherche dans la musique pop. D’un côté bien sûr on cherche toujours à créer sa propre originalité, mais finalement c’est en écoutant les anciens qu’on finit par la trouver avec plus de facilité.
Parmi ces influences des années 60 on peut citer les Beach Boys, vous avez fait la première partie de Brian Wilson et je crois que le titre Carl's Song est inspiré par Carl Wilson ?
Angela : Oui les Beach Boys nous obsèdent ! (rires)
Romeo : On a eu le privilège de rencontrer Brian Wilson et de faire cette tournée avec lui, c’est moins une obsession qu’une estime profonde, et c’était cool. Ensuite j’ai fait ce rêve où je voyais Carl Wilson me chanter cette chanson, dont je me suis souvenu en me réveillant.
Angela : On s’est retrouvé avec cette mélodie, la partie de guitare très efficace et la ligne de basse qui collait aux harmonies de l’ensemble, on avait plus qu’à jouer ça marchait tout seul.
Romeo : C’était un peu la chanson idéale avec ce thème évident…
L’an dernier vous aviez été nominés pour le Mercury Music Prize, les Brit Awards, Mojo, est-ce que vous avez l’impression que cela vous a aidé à conquérir un nouveau public ?
Romeo : Oui ça nous a vraiment aidé, finalement. Beaucoup plus que ce que je l’avais pensé à l’époque, car en définitive j’ai réalisé que ça a encouragé un certain public à suivre le groupe. C’est génial la façon dont le premier album a été accueilli.
Le fait de faire la première partie de personnalités aussi différentes que U2 ou Brian Wilson a pu participer à élargir ce public.
Michele : Le public de U2 était tellement massif c’est vrai. Mais ils ont écouté assez attentivement, surtout en Pologne, qui est probablement le meilleur concert que l’on a fait. C’était incroyable. On se rend compte de l’impact après les concerts, quand on signe des autographes et que nos fans viennent à notre rencontre, qu’ils nous parlent de ce qu’ils ont préféré sur le disque.