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Esser

Interview publiée par Hybu le 30 décembre 2009

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Dernier Festival des Inrockuptibless, avec en fond les bruyantes répétitions de Marina & The Diamonds : nous rencontrons Ben Esser peu avant son entrée en scène. Le garçon, très disponible et aimable, nous parle de son premier album, de ses influences, parfois étonnantes, et de ses prochains travaux.

Ben, est-ce que tu peux commencer par nous raconter comment tu es venu à la musique ?

Faire de la musique a véritablement été une chose naturelle, j'adore jouer de la musique. Il y en avait toujours autour de moi dans ma famille. J'ai commencé par jouer de la batterie, c'était une envie vraiment physique que j'ai eue étant enfant. Et après tout est venu de ça.

Comment as-tu commencé avec Ladyfuzz ?

J'ai rencontré Liz, la chanteuse par un ami commun. Et Kele de Bloc Party qui était aussi un ami, nous a poussés à faire un groupe et à écrire nos propres chansons, c'est ainsi que nous avons monté Ladyfuzz.

Quand as-tu commencé à écrire tes propres chansons ?

En fait, j'ai toujours plus ou moins composé mes propres morceaux. Mais ce n'était pas vraiment des pop songs comme on peut l'entendre maintenant, c'était juste des instrumentaux, des bouts de morceaux produits ça et là. Je ne savais pas encore que j'allais les utiliser pour moi-même, cela aurait pu être des productions pour que d'autres gens chantent dessus. Et après, tu sais, j'ai pensé que je pouvais le faire moi-même. Je faisais ça depuis longtemps sur mon ordinateur chez moi. C'est vraiment un outil génial, de nombreuses personnes peuvent ainsi faire leur propre musique à la maison mais après il faut juste être créatif. Il est tellement facile de copier des choses qui ont été faites par d'autres.

Est-ce que tu produis autre chose que de la pop ?

Les choses sur lesquelles je travaille actuellement sont vraiment différentes de ce que tu peux entendre sur cet album. J'ai écrit et produit pour d'autres gens et j'ai aussi fait beaucoup de remixes. Par exemple, j'ai fait des trucs pour Cocknbullkid, un remix pour Speech Debelle... Ces remixes sont vraiment différents, j'adore réinterpréter les morceaux en travaillant de nouvelles voies. Récemment, je me suis mis au DJing et ç'a énormément influencé la manière dont je retravaille les morceaux. Je fais des remixes vraiment plus dance music.

Quels genres de musique préfères-tu mixer ?

En fait, je crois que la première musique dans laquelle je suis vraiment rentré était le UK Garage, le 2-step et d'autres trucs dans le même genre. C'est assez marrant de voir une sorte de résurgence de ces sons auxquels se sont ajoutées des influences rave avec des gens comme Hervé, Sinden, A1 Bassline ou Toddla T qui ont vraiment une vibe garage. J'adore les vieux trucs aussi, comme Wookie (il chante), cette chanson [ndlr : Battle] était fantastique.

C'est toi qui a donc choisi les producteurs qui ont remixé tes morceaux ?

Ça dépend, certains se sont rapprochés de moi pour me proposer de les faire et d'autres, c'est moi qui leur ai demandé.

Quels sont tes influences ?

J'ai aussi grandi en écoutant beaucoup de Hip-Hop, ce qui a énormément contribué à la manière dont je fais mes beats. Notamment, la technique du sampling que j'utilise quasiment tout le temps.

Ce qui est amusant, c'est qu'au final tu as une image très « indie »...

C'est intéressant de savoir dans quel contexte les gens réagissent à ma musique. Aux États-Unis, je suis signé sur un label très différent alors qu'en Angleterre je suis sur Transgressive. Ils ont Foals et d'autres ce qui fait que ça donne une étiquette très indie. Là bas, je suis sur Chocolate Industries qui ont The Cool Kids, Lady Sovereign et je n'ai donc pas exactement le même public, vu que les labels font une promotion différente.

Mais au dessus de tout ça, au final, ton album est vraiment un disque de pop...

Oui définitivement, j'ai toujours voulu créer des pop songs, ça m'intéresse de travailler sur des formats concis, faire un refrain et chanter. Malgré mes influences diverses, j'ai une vraie sensibilité pop.

Justement, comment composes-tu tes morceaux ?

En fait, tout est différent, car tu sais, cet album a été composé à partir de bribes d'anciens instrumentaux que j'avais fait depuis mon adolescence, ainsi que de morceaux beaucoup plus récents composés pour ce disque. Ce qui fait qu'il n'y a pas vraiment eu de méthode générale de composition. Parfois je trouvais un bon refrain, d'autres fois je cherchais des mélodies sur ma guitare, à partir d'un sample ou d'un rythme que j'avais composé sur mon ordinateur. Tous les morceaux ont donc été enregistrés différemment.

Quel a été le rôle de Lexxx dans la production de ton disque ?

Tous les morceaux proviennent de démos que j'ai enregistrées moi-même. Par exemple, Headlock ou I Love You sont quasiment identiques à leurs versions démos. Lexxx lui m'a beaucoup aidé dans le mixage des morceaux, et puis bien sûr il a travaillé avec moi sur d'autres titres en studio, jouant certains instruments. Il a surtout été d'un apport dans la manière de faire fructifier les démos que je lui avais données, pas tellement dans la structure des morceaux mais vraiment dans l'équilibrage des pistes ou la texture même des sons.

Par quoi es-tu influencé dans la composition des morceaux ?

En fait, un peu tout, la musique en elle-même évidemment. Tu te souviens toujours de morceaux qui ont eu un rôle dans ta vie, qui créent une sorte de bande de son de ta propre existence. Cet album est vraiment une sorte de synthèse de ça, de ces sonorités avec lesquelles j'ai grandi, j'ai évolué, de celles sur lesquelles j'ai dansé, je suis tombé amoureux ou j'ai pris des drogues.

Tu sais déjà à quoi devrait ressembler ton prochain album ?

Il sera très différent. J'ai déjà travaillé quelques idées mais j'attends d'avoir un peu plus le temps pour y revenir, je tourne beaucoup en ce moment. Donc je pense que je m'y mettrais plus intensément en janvier, et je commencerais à enregistrer très rapidement. Pour l'instant je ne préfère pas jouer de nouveaux morceaux sur scène, je n'ai pas assez de choses prêtes. Mais à priori, je pense que mes nouvelles chansons auront peut-être une approche un peu plus dance, c'est assez lié à ce dont je te parlais tout à l'heure, les remixes notamment. Je crois que les morceaux ne seront plus aussi concis. Je m'oriente vers des choses un peu plus développées, ça va être drôle, peut-être même que je ferais un morceau 2-step. Tu as entendu le remix fait par les XX pour Florence and The Machine, il est cool non ? Il est carrément 2-step.

Justement, The XX me disait que leur producteur (Jaimie) était vraiment passionné de dubstep, tu aimes aussi ?

Oui, clairement. Tu sais après le Garage, il y a eu le grime, qui était très hip-hop et le dubstep. En Angleterre, c'est vraiment devenu un truc important.

Que penses-tu aujourd'hui du business de la musique ?

Je trouve que la nouvelle manière de se partager la musique est un truc intéressant. Les labels ne vont plus vivre de la même manière. De plus en plus, les artistes ont un contact direct avec leurs fans, ce qui est génial. Le prochain disque sera d'ailleurs distribué d'une manière totalement différente, même si je ne sais pas encore trop quelle forme cela prendra. Les artistes ont les moyens désormais de reprendre le contrôle de leur activité et de s'adresser directement à ceux qui les écoutent sans l'utilisation obligatoire d'un intermédiaire. En plus, ainsi on diminue les coûts, si tu fais ton disque chez toi, ça ne coûte pas grand chose. Évidemment le label est encore utile, son rôle est simplement en train de muter. Si tu comprends ça, tu peux partir dans des directions très intéressantes. Par exemple, j'utilise énormément internet, Facebook ou Myspace, et j'offre des mixtapes à télécharger. C'est un très bon moyen d'avoir les retours immédiats des fans, c'est un outil de promotion beaucoup plus personnel.

Et le téléchargement illégal ?

C'est trop simple de penser que les gens arrêteront de télécharger ta musique. Les gens le feront de toutes façons. Après il faut proposer des alternatives. Évidemment, le public doit se rendre compte que c'est important d'avoir quelque chose de physique, mais ce n'est obligatoirement un CD... regarde ce que nous avons fait avec Headlock et le T-Shirt. J'adore acheter des disques, regarder l'artwork de près, lire les crédits et écouter de la musique chez moi. Et ça a tendance à disparaître avec le téléchargement, ce qui est vraiment dommage. Presque plus personne n'écoute un album en entier, juste des chansons prises ça et là sur leur iPod. Moi aussi j'ai un iPod, mais je me pousse à n'y mettre qu'un seul disque à la fois, comme ça je l'écoute dans sa globalité. D'ailleurs en ce moment, j'ai le dernier disque des Flamming Lips. Alors qu'aujourd'hui, on ne fait presque plus attention qu'aux chansons et aux singles.