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I Like Trains

Interview publiée par Fab le 25 décembre 2010

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Après le départ d'Ashley Dean et la décision de quitter Beggars Banquet, I Like Trains ont sorti en 2010 leur second album, He Who Saw The Deep, via leur propre maison de disques. Rencontre avec Dave Martin, voix du quatuor, lors de sa venue à Paris en cette fin de mois de décembre lors de la soirée Inrocks Indie Club...

Ces deux ou trois dernières années ont été très animées pour I Like Trains, à commencer par le départ de Ashley en 2007. Comment la transition s'est-elle faite ?

Son départ était le fruit d'une décision mutuelle. Ashley n'avait jamais envisagé de faire partie d'un groupe, sa présence à nos cotés était plus le fruit du hasard qu'autre chose. Nos collaborations passées nous ont énormément apporté mais d'un coté nous souhaitions nous impliquer pleinement dans notre musique alors que Ashley avait de nombreux projets auxquels il souhaitait se consacrer. Faire partie d'un groupe lui prenait trop de temps, il voulait se consacrer à sa propre carrière... son départ n'était donc une surprise pour personne, c'était même une évolution logique pour tout le monde. Cela ne remet pas en cause ce que nous avons construit avec lui durant quatre ou cinq ans, mais il était temps d'évoluer et de passer à autre chose.

N'avez-vous jamais craint que ce changement important pourrait nuire à la santé du groupe ?

C'est difficile à dire, cela fait longtemps qu'il n'est plus là désormais... Avec du recul j'ai l'impression que son départ a été plus difficile à vivre pour nos fans que pour nous. Beaucoup de personnes ont été très surprises lorsque cette décision a été annoncée, mais il fallait faire avec... Nous étions à l'époque comme une véritable famille tous les cinq, mais parfois il faut savoir prendre ses distances vis à vis de certaines personnes pour le bien du plus grand nombre. Cela ne nous a pas empêchés d'enregistrer un nouvel album et de continuer à partir en tournée tandis que Ashley poursuit sa carrière dans les visuels et les vidéos avec une belle réussite. Il n'y a donc eu aucune inquiétude, chacune des deux entités poursuit sa route !

Le second fait marquant a été la fin de votre collaboration avec Beggars Banquet... et la création de votre propre maison de disques !

Je ne peux pas dire que nous ayons été surpris lorsque nous avons été poussés à quitter Beggars Banquet, nous l'avions senti venir. Ce n'était pas la fin du monde, il nous a juste fallu entamer des discussions avec d'autres maison de disques... mais le temps nécessaire pour finaliser un nouveau contrat satisfaisant était trop long alors nous avons décidé de prendre les choses en mains lorsque l'album a été terminé. C'est là que nous avons chois d'avoir recours à Pledge Music pour rassembler l'argent nécessaire. Nos fans ont répondu à nos attentes avec une rapidité inattendue, en l'espace d'une journée nous avions déjà atteint notre but alors que nous n'avions aucune idée du type de réponse que nous allions obtenir !

Pourriez-vous à nouveau collaborer avec une maison de disques si l'occasion se présentait ?

C'est une possibilité que nous n'écartons pas, nous n'avons quoiqu'il en soit pas de raisons de nous y opposer. Tout ce que nous avons vécu ces derniers mois me rend très optimiste pour la suite de notre carrière, nous avons pris conscience qu'il était possible de continuer à exister sans le support financier d'une structure. Nous pouvons désormais mieux maîtriser l'aspect financier du groupe et répondre à nos besoins comme nous l'entendons.

Pledge Music, et plus généralement Internet, permettent maintenant à des groupes comme I Like Trains d'obtenir une meilleure exposition et de se développer plus facilement...

Sans le public et ceux qui nous suivent maintenant depuis plusieurs années, nous ne serions rien ! Nous n'avons pas des milliers de fans prêts à nous soutenir, et même si parfois j'apprécierais que ce soit le cas, nous sommes très reconnaissants envers ceux qui nous soutiennent.

La sortie via Pledge Music d'un coffret rassemblant les vinyles de vos disques les plus importants a toutefois été annulée par manque de pré-commandes, qu'en est-il de ce projet ?

Nous aurions aimé le sortir mais ce n'était pas possible financièrement parlant. Nous n'avons pas abandonné l'idée, cela viendra peut-être un jour... le point positif dans tout cela est que si notre carrière dure encore quelques années de plus, il devrait y avoir encore plus de disques dans ce fameux coffret le jour où il sortira (rires) !

Votre nouvel album a pour titre He Who Saw The Deep, peux-tu m'en dire plus sur votre choix ?

Ce titre m'a été inspiré par un poème antique, The Epic Of Gilgamesh. Avant d'enregistrer l'album, nous avons discuté entre nous de différents événements de l'histoire... en dépit du fait que nous voulions arrêter d'écrire sur les faits du passé comme nous l'avions toujours fait. J'avais besoin de trouver des éléments pour me concentrer sur l'écriture des chansons et je tentais de me projeter vers le futur. Je lisais donc beaucoup de documents sur les changements climatiques, ce qui a eu pour conséquence l'apparition de plusieurs chansons liées au thème de la mer. Je me suis alors intéressé à des écrits plus anciens comme la Bible et le récit de l'Arche de Noé, tout ce qui avait notamment attrait aux inondations qui sont un point commun à de nombreuses religions. J'ai alors voulu pousser mes recherches un peu plus loin et c'est ainsi que j'ai découvert The Epic Of Gilgamesh dont les principaux thèmes s'appliquent à l'être humain et à la conception de notre album. He Who Saw The Deep est la première ligne de ce poème.

L'une des caractéristiques principales du groupe résidait dans le fait que vos chansons sont inspirées par des faits historiques plus ou moins connus. Pourquoi avoir décidé d'abandonner cette orientation pour des textes plus classiques et personnels ?

Je ne dirais pas que cette idée a été définitivement abandonnée... Dans l'optique de composer un album différent du précédent, nous avons voulu exploiter toutes les pistes possibles, et l'écriture en faisait partie. En prenant un peu de recul, nous avons réalisé que nous n'avions pas beaucoup évolué entre PROGRESS, REFORM et Elegies To Lessons Learnt, même si PROGRESS, REFORM n'est pas un album à proprement parler mais une compilation de nos premiers singles. Dans un premier temps nous avons cherché à laisser derrière nous toutes les caractéristiques propres à I Like Trains... mais les chansons sonnaient systématiquement comme les précédentes ! Pour évoluer, nous avons donc renoncé à beaucoup de choses, à commencer par certaines pédales d'effets, nous avons changé la structure des chansons, choisi de nouveaux artworks... Au final, nous sommes toujours I Like Trains et notre public n'a pas été perturbé par notre évolution !

Vos influences post-rock initiales sont en conséquence moins perceptibles qu'auparavant, notamment au niveau de la structure instrumentale des chansons...

Même si notre volonté était de suivre une nouvelle direction, nous n'avons pas volontairement écrit des chansons plus accessibles. Si le résultat peut sembler plus simple à appréhender pour une oreille extérieure, la mise en œuvre est plus compliquée pour nous car plus travaillée qu'auparavant. Cette impression est sans doute amplifiée par la production du disque également. Quoiqu'il en soit, c'est notre volonté de changer qui est la source de cette évolution, nos tâtonnements et expérimentations nous ont amenés là où nous sommes aujourd'hui. Plus de deux ans auront été nécessaires pour y parvenir.

Les titres de certaines chansons telles que Hope Is Not Enough, Sea Of Regrets ou A Divorce Before Marriage sont plutôt sombres. Dirais-tu que cet album est plutôt optimiste ou pessimiste ?

Pessimiste évidemment ! Du point de vue des textes, il est assez évident que l'ensemble est plus pessimiste qu'optimiste, mais la tendance s'inverse ponctuellement du point de vue instrumental. Les zones d'ombre sont alternées avec des passages plus lumineux de manière à obtenir un équilibre, de la même manière qu'il n'est pas possible pour nous d'écrire un album intégralement acoustique ou très rythmé, il faut trouver une bonne alternance.

Sur scène, vous avez désormais recours à un musicien supplémentaire à la guitare et aux claviers. A quel moment ce besoin est-il apparu ?

J'ai toujours pensé qu'un groupe nécessite cinq musiciens pour exprimer tout son potentiel ! En ce sens, j'admire beaucoup les trios qui réussissent (rires) ! Les chansons de notre nouvel album nécessitent un musicien supplémentaire pour être retranscrites intégralement. Nous n'avons pas de violoniste avec nous mais la présence de quelqu'un derrière les claviers peut compenser cette absence sur certains titres.

Au cours des deux dernières années vous avez notamment été amenés à partir en tournée avec Editors ou The Sisters Of Mercy, qu'as-tu retenu de ces expériences ?

Beaucoup de bons souvenirs ! Ce genre d'expérience te permet d'apprendre beaucoup de choses, notamment dans la manière d'appréhender un public qui n'est pas acquis à ta cause à la base. Lorsque nous avons commencé à jouer de la musique nous étions enfermés dans une pièce, et le jour où nous avons fait face à un public a constitué une nouvelle étape. Nous avons l'habitude de jouer devant quelques centaines de personnes mais ces tournées avec une autre tête d'affiche nous ont permis de nous produire devant quelques milliers d'amateurs de musique, ce qui est un grand bond en avant pour nous.

J'ai cru comprendre que l'écriture de votre prochain album avait débuté, quels sont vos projets à plus ou moins court terme ?

Je commence à réfléchir à des idées pour de nouvelles chansons mais durant les deux ou trois mois à venir nous allons principalement nous concentrer sur les concerts avec des tournées en Europe et au Royaume-Uni. Plus globalement, nous avons accumulé suffisamment d'expérience au cours des années pour éviter de trop planifier les choses en détails. La vie d'un groupe est difficile, je préfère apprécier le moment présent et voir le groupe continuer à grandir !