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All We Are

Interview publiée par Pierre-Arnaud Jonard le 21 juin 2017

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Le nouvel album de All We Are, Sunny Hills, est une grande réussite. Un disque influencé tant par le post-punk que le krautrock. Un opus éminemment politique aussi avec une conscience de classe digne des Clash. Une excellente occasion que d'aller à la rencontre des membres du groupe, personnes qui se révèlent aussi intelligentes que charmantes.

Vous avez eu d'excellentes critiques au moment du premier album. Avez-vous du coup ressenti une quelconque pression au moment de composer le nouveau ?

Pas vraiment, si ce n'est une pression personnelle. Nous voulions pour ce disque être les plus honnêtes possible afin de refléter le monde qui nous entoure.

Il y a des éléments post-punk, d'autres krautrock, dans le disque. C'est très très éloigné du son de votre premier album...

Nous sommes différents de ce que nous étions à cette époque. La musique reflète tes émotions et c'est d'ailleurs pour cela que nous en jouons. L'époque dans laquelle nous vivons est dure, spécialement en politique et forcément cela se ressent dans la musique que tu fais. A temps sombres, musique sombre.

Nous avons été influencés par la situation globale du monde pour cet album.

Le disque est à cet égard très noir...

Nous avons été influencés par la situation globale du monde pour cet album. La montée du populisme, le nationalisme qui continue de se développer, le Brexit, l'élection de Trump... Toutes ces choses négatives qui nous entourent. Les influences post-punk sont cohérentes avec cela. Lorsque ce mouvement est né, cela venait de temps difficiles que vivaient les gens. Quant à nos paroles, elles ont toujours été mélancoliques. C'était déjà le cas sur le premier album. Mais aujourd'hui, les temps sont encore plus durs qu'à cette époque.

Votre premier album donnait plutôt dans le lo-fi mélancolique...

C'est intéressant de le qualifier ainsi...

Comment travaillez-vous à l'intérieur du groupe ?

Nous travaillons de façon très démocratique. C'est d'ailleurs parfois difficile pour arriver à un accord commun entre nous. Ce peut être deux d'entre nous contre l'autre mais ce n'est jamais les deux mêmes qui vont s'opposer à l'autre. C'est sans doute plus simple pour un groupe dans lequel il y a un leader qui décide tout, tout seul.

Quand avez-vous enregistré le disque ?

On avait commencé à enregistrer des démos dans le même style que les morceaux du premier album et puis on a tout recommencé car cela ne correspondait plus à ce que nous voulions. On a enregistré tout ça dans un endroit qui s'appelle Sunny Hills, ce qui a donné le nom à l'album et est un clin d'oeil au côté un peu dark du disque.

Le premier album était très soul. Vous vous êtes beaucoup éloignés de ce style musical...

Les gens associent la soul à quelque chose de fun mais la soul est plus sombre que cela. Même si on a voulu quelque chose de plus direct pour cet album, nous continuons d'écouter de la soul. Des choses ont changé musicalement mais nous sommes le même groupe avec les mêmes musiciens. Nous sommes sans doute plus conscients de nous aujourd'hui. C'est sans doute la seule différence.

Vous n'avez pas peur de perdre des fans en changeant radicalement de style ?

Je pense qu'il est important d'accepter que les artistes grandissent. Je pense qu'un artiste se doit de prendre le pouls d'une époque et c'est ce que nous faisons avec cet album. Peut-être que l'on perdra des fans mais on en gagnera d'autres.

Nous n'aimons pas la pop bubblegum, la pop formatée.

En dehors des éléments post-punk, il y a aussi des aspects pop dans votre musique...

Il y a définitivement des éléments pop dans ce que nous faisons. On a bien sûr écouté les Beatles. Nous n'aimons pas la pop bubblegum, la pop formatée, mais toute la pop n'est pas comme cela...

Comment seront vos live avec le mélange des titres du premier et du nouvel album si différents l'un de l'autre ?

Ce disque est intense. En live, on incorporera des morceaux du premier album pour respirer. Cela fonctionnera parfaitement.

Vous n'êtes pas les seuls à être influencés par le post-punk. Il y a une grosse vague post-punk en Angleterre...

C'est cohérent avec les temps que nous vivons. De plus en plus de musiciens prennent conscience et c'est quelque chose de positif.

Pourquoi avoir choisi Burn It All Out comme premier single ?

Ce n'est pas vraiment un single, plutôt une introduction à l'album. C'est un morceau à guitares qui explique bien ce qu'est l'album.

Les vidéos semblent importantes dans votre univers...

Nous sommes très conscients de ce que nous voulons faire. Human, Animal et Dance vont constituer une trilogie comme le serait une trilogie au cinéma. Les trois ont été réalisées par le même réalisateur. Là encore, ce sera très politique.

Vous êtes un groupe multiculturel. Cela influe-t-il sur votre musique ?

Aucun de nous n'est anglais. Lorsque le Brexit est arrivé, nous ne nous sentions plus vraiment bienvenus en Angleterre, nous ressentions comme l'impression de ne plus appartenir ni à nos pays d'origine, ni à ici. Heureusement, Liverpool est une ville ouverte. C'est un port avec toutes les choses positives que tu y trouves, notamment l'ouverture au monde. On se sent bien à Liverpool. La ville nous inspire.

Comment vous sentez-vous à Liverpool ?

Liverpool a une histoire difficile avec le port et ses esclaves. C'est une ville multiculturelle à l'opposée des valeurs développées par le Brexit. On s'y sent super bien. C'est comme un oasis que de vivre ici.

Qu'est-ce qui vous a le plus effrayés dans le Brexit ?

La division entre les gens.

Votre album est très conscient politiquement...

Nous sommes entourés d'aspects sociaux et politique. Tout notre disque ne parle que de ça. Nous essayons d'inviter les gens à voter. Nous ne disons pas aux gens pour qui voter car chacun est libre de penser comme il veut. Mais il est nécessaire de prendre conscience pour agir. Si avec ce disque, nous réussissons à faire réfléchir les gens, ce serait bien. Nous aimerions éveiller les consciences.

All We Are est né avant le Brexit mais c'est le nom de groupe parfait pour temps de Brexit non ?

Tout à fait (rires). All We Are, c'est l'unité. Se sentir unis et combattre l'individualisme.