logo SOV

Travis

Interview publiée par Fab le 17 novembre 2008

Bookmark and Share
Douze mois seulement après The Boy With No Name, Travis effectuaient au mois de septembre dernier un retour inattendu avec leur sixième album studio, Ode To J. Smith. Un disque enregistré avec une rapidité déconcertante et à propos duquel Fran Healy et Doug Payne se montraient élogieux lors de leur récente venue à Paris...

Votre dernière venue en France remonte à un concert dans la salle du Bataclan à Paris, quel souvenir en conservez-vous ?

Doug : C'est exact, c'était un concert incroyable ! Je crois que je n'ai jamais autant sué sur scène que dans cette salle !
Fran : Je m'en souviens très bien, il y avait une flaque d'eau à tes pieds ce soir là tellement tu étais mouillé, j'ai même cru pendant un instant que tu t'étais pissé dessus ! [rires]
Doug : Tout le monde avait chaud et je ne faisais même plus attention à la transpiration... c'était mieux comme ça.

Vous avez depuis joué de nouveau en Europe et une tournée est également prévue au mois de décembre. A quand un concert en France ?

Fran : Nous allons effectivement donner quelques concerts en Europe au mois de décembre mais une véritable tournée suivra au printemps 2009. Il faudra sans doute que le public français attende jusque là pour nous revoir...

Ces concerts sont donnés dans le cadre de la sortie de votre nouvel album, Ode To J. Smith, qui est sorti un an à peine après le précédent. Comment expliquez-vous cette productivité soudaine ?

Fran : Personne ne s'attendait à nous revoir si rapidement mais il nous reste encore beaucoup de choses à prouver en tant que groupe. C'est l'une de mes principales sources de motivation lors que je tente d'écrire des chansons, cela m'aide à me concentrer sur mon travail de musicien. Notre vie au sein de Travis est très saine, il n'existe pas de contraintes et nous enregistrons de nouvelles chansons quand nous en avons réellement envie, pas quand quelqu'un décide que nous devons le faire. Nous travaillons à l'ancienne en quelque sorte.

Votre rapidité pour ce disque était-elle liée à une décision initiale ou tout cela est-il venu naturellement ?

Doug : C'était plus une idée qu'une véritable décision. Nous avons discuté de cet album tous ensemble et nous avons voulu essayer de l'enregistrer rapidement, juste pour voir si nous en étions capables ou non. Par rapport à nos habitudes depuis des années, personne n'a sans doute pensé que nous allions réussir, pas même notre manager ou nos proches... mais les idées pour les nouvelles chansons sont apparues de manière très fluide et notre avancée a été rapide. Nous avons donc écrit toutes les chansons dans un premier temps puis nous avons donné quelques concerts pour tester la réaction du public. C'est à ce moment là que nous avons compris qu'il était possible d'achever ce disque dans les plus brefs délais. Nous sommes allés en studio pour enregistrer les chansons de manière très simple, presque dans des conditions live, et le plus dur était fait.
Fran : Au mois de mars dernier, une fois l'album terminé nous avons eu une discussion avec notre manager pour décider quand et comment le sortir. Il ne semblait pas aimer l'idée de le sortir à la rentrée car c'est une période que beaucoup de groupes, majeurs ou débutants, choisissent pour dévoiler leurs disques. Son argument était juste mais nous avions une telle confiance dans ces nouvelles chansons que nous avons quand même décidé de sortir cet album à cette époque. Peu importe que les ventes soient bonnes ou non, que beaucoup de gens le téléchargent ou pas, nous voulions simplement le sortir et partir à nouveau en tournée. Alors on l'a fait !

N'aurait-il pas été plus sage de consacrer quelques semaines de plus au disque plutôt que de vouloir aller trop vite ?

Fran : Je ne sais pas, le contexte nous a poussé à travailler ainsi. Nous ne voulions pas faire subir une trop longue attente à nos fans comme cela avait été le cas entre 12 Memories et The Boy With No Name... il était hors de question de passer à nouveau deux ans en studio. En cherchant l'immédiateté nous sommes parvenus à conserver une certaine excitation tout au long du processus. Je crois qu'il est préférable pour tout le monde de rester enfermé en studio deux semaines plutôt que deux ans !

Cet album est le premier à paraître sur votre propre maison de disques, Red Telephone Box...

Fran : Plus personne ne voulait de nous ! Bon ce n'est pas vrai, mais la vie en tant que groupe non signé nous semblait plutôt agréable alors nous avons souhaité prolonger cette expérience. Dans cette configuration plus personne n'avait d'ordres à nous donner, pas même notre manager.
Doug : Nous gardons pourtant un bon souvenir des années passées chez Independiente. Notre contrat s'est terminé lors de la sortie de The Boy With No Name mais nous sommes restés en très bons termes. Il n'y avait aucun problème particulier, juste une envie de prendre un peu de recul et de vivre à notre manière.

Votre besoin de liberté a donc en quelque sorte guidé vos choix ?

Doug : Je pense qu'on peut le dire, mais je tiens à préciser qu'il n'y a jamais eu le moindre problème sur ce point avec vis à vis de Independiente. La vie est ce qu'elle est, et lorsque le moment de prendre une décision est venu nous avons simplement voulu expérimenter un nouveau mode de fonctionnement.

L'évolution musicale majeure de ce disque est votre retour à un son plus lourd que ce à quoi votre public est habitué des années...

Fran : En changeant d'ampli et de guitare ! L'histoire complète est un peu plus compliquée... En revenant de notre dernière tournée aux Etats-Unis, l'ampli que j'utilise depuis des années a été mystérieusement perdu par l'aéroport. En retournant en studio j'étais comme orphelin et j'ai donc été obligé de faire des essais avec un autre ampli mais le résultat avec ma guitare habituelle était vraiment mauvais. J'ai donc dépoussiéré ma vieille guitare jazzmaster et le résultat était tout simplement merveilleux. J'avais l'impression de revivre avec cet instrument. C'est donc avec cette nouvelle configuration que la plupart des chansons ont été composées...
Doug : Je pense que nous n'avons jamais réellement cessé d'être un groupe de rock. C'est ce pour quoi nous avons créé Travis il y a des années, pour jouer des chansons comme All I Wanna Do Is Rock. Je suis conscient que notre évolution nous a menés faire coexister deux personnalités : une première sur scène avec beaucoup d'énergie et une seconde en studio avec un son beaucoup plus soft et pop. Nous avons souvent reçu des témoignages de personnes surprises de nous entendre avec un son plus lourd en concert, alors je suppose que cet album est notre manière de réconcilier nos deux personnalités. L'écriture de Fran a clairement donné le ton, mais Andy et Neil ont eu une influence tout aussi importante lorsque nous étions en studio à Londres et que les chansons commençaient à prendre forme.

L 'écriture et l'enregistrement de cet album ont donc constitué une expérience nouvelle pour vous ?

Fran : Le processus n'a pas été tellement différent de ce qu'il devrait toujours être, nous l'avons simplement suivi sans nous mettre de pression. Les textes ont été écrits, puis les mélodies et les arrangements, et nous sommes finalement allés en studio pour l'enregistrement. Avec le succès je pense que nous avions en quelque sorte perdu de vue la simplicité d'être musicien. Être avec ses amis pour jouer de la musique, c'est cela l'important.

Aviez-vous conscience en enregistrant ces chansons que votre public serait certainement surpris par ce retour aux sources ?

Fran : Je ne suis pas certain de savoir ce que les gens attendent de nous sur un nouvel album. De nombreux groupes très différents sont en activité simultanément et il n'est jamais réellement possible d'anticiper leur évolution. Si une personne écoute Good Feeling puis The Man Who, elle sera certainement surprise par l'orientation que nous avons suivie... le résultat sera le même si l'on compare The Man Who, un disque indie et poignant, à The Invisible Band qui est notre album le plus pop. Et ainsi de suite d'un album à l'autre. Il est bien entendu toujours facile de deviner que ces albums ont été écrits par Travis mais nous cherchons à nous renouveler et à évoluer à chaque fois. Notre musique comporte certaines constantes tout en proposant des nuances. Pour notre public, Ode To J. Smith n'est qu'un album de plus dans notre discographie.

Vous allez prochainement partir en tournée afin de jouer ces nouvelles chansons, à quel type d'accueil vous attendez-vous ?

Fran : Le public va devenir fou, nous serons les nouveaux Beatles ! [rires]
Doug : Nous n'avons pas de réelle appréhension par rapport à l'accueil réservé à cet album. Nous avons déjà eu l'occasion de le tester devant un public et le résultat s'est avéré très encourageant. Je pense que sur scène les histoires sont mises en valeur différemment car la dynamique est elle-même différente, même pour des titres comme Song To Self ou Before You Were Young. Le fait que nous ne vendions plus autant de disques qu'à une certaine époque nous permet aussi de jouer les chansons que nous choisissons comme nous le voulons, le plus important est de prendre du plaisir avec ces nouvelles chansons même si nous savons qu'elles ne nous permettront pas d'atteindre la tête des charts ou de gagner encore plus d'argent.

Pouvez-vous m'en dire plus sur ce fameux J. Smith qui a inspiré l'un de vos singles et ce nouveau disque ?

Fran : C'est un personnage imaginaire autour duquel tout le disque est articulé. Chaque chanson représente un événement de la dernière journée de sa vie mais il ne le sait pas encore.

L'idée de dédier cet album à ce personnage est donc venue naturellement ?

Fran : Tout a commencé avec la chanson J. Smith qui a été la première écrite. Je l'ai écoutée et je me suis posé la question de savoir qui il est et à quoi pourrait ressembler sa vie.
Doug : Nous avons utilisé le personnage de J. Smith comme un moule pour toutes les chansons de l'album. Parfois, lorsque nous travaillons sur des chansons, nous avons le sentiment d'être face à une page blanche qui attend qu'une histoire se mette en place. J. Smith nous a aidé à créer ces histoires puis à les mettre en musique sur l'album.

Cet album se démarque également des autres par son artwork qui ne ressemble en rien à tout ce que vous aviez pu proposer jusqu'à maintenant, par quoi vous a-t-il été inspiré ?

Doug : Il nous a été inspiré par la couverture d'un vieux recueil d'histoires de Roald Dahl que nous avait offert la personne responsable des pochettes de The Man Who, The Invisible Band et The Boy With No Name. Cette image nous avait beaucoup marquée et nous avions envisagé de l'utiliser pour notre précédent album jusqu'à ce que nous décidions que ce n'était pas cohérent. A contrario, son esprit et sa capacité à attirer l'attention au premier regard nous ont semblés en adéquation avec les chansons de Ode To J. Smith. Je suis très agréablement de l'accueil réservé à cette pochette qui est pourtant très éloignée des précédentes tant dans le fond que dans la forme.

Vous avez récemment interprété une reprise du single I Kissed A Girl de Katy Perry alors que vous n'en aviez plus réalisé depuis quelques années maintenant...

Fran : Nous aimons beaucoup jouer des reprises en concert. Notre but n'est pas de rester fidèle à la version originale mais de croire en notre manière de jouer la chanson. En tant que chanteur je prends beaucoup de plaisir lorsque je tente de me mettre à la place de la personne à qui appartient la chanson, d'une certaine manière je joue un rôle d'acteur. Si un jour nous ne pouvons plus enregistrer de nouveaux albums, nous deviendrons un groupe de reprises ! [rires]
Doug : Et nous jouerons des reprises de nos propres chansons sous le nom de Travish ! [rires]

Après tant d'années passées ensemble votre plaisir de jouer de la musique semble toujours aussi fort, comment l'expliquez-vous ?

Doug : Nous avons beaucoup de chance je suppose ! Nous enregistrons des albums depuis des années et le public est toujours là pour nous écouter, c'est en partie grâce à eux que nous jouons encore de la musique ensemble. J'aime faire partie de Travis plus que tout, c'est une chance incroyable que nous avons de pouvoir encore créer de nouvelles chansons et partir en tournée à travers le monde.

Je me souviens avoir lu un jour que vous aviez prévu dès vos débuts de publier douze albums durant votre carrière, vous n'avez donc parcouru que la moitié de votre chemin en tant que groupe ?

Fran : C'est vrai ! Je me demande parfois combien de temps il nous faudra pour y arriver, personne ne le sait ! Je pense que les chansons pour notre septième album seront prêtes à la fin du mois de décembre, il ne restera plus qu'à trouver quelques semaines pour les enregistrer. Nous gardons cet objectif des douze albums dans un coin de notre tête mais nous ne réfléchissons jamais à ce que nous faisons. A moins d'avoir des contraintes commerciales de la part d'une maison de disques, nous ne savons jamais quand et comment nous allons faire les choses ! [rires]