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The Strypes

Interview publiée par Claire le 16 septembre 2013

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C'est à quelques heures de leur concert au Point Ephémère en juillet dernier que nous avons rencontré The Strypes. Détendus, les quatre Irlandais ne semblaient pas stressés à l'idée de jouer devant une salle plus que comble et un parterre de journalistes français prêts à disséquer leur performance. Et pourquoi devraient-ils se stresser ? Avec une tournée sold out, une première partie des Stones Roses en juin qui a fait l'unanimité et bientôt celle des Arctic Monkeys cet automne, les quatre ados de Cavan au look de Eric Burdon époque We Gotta Get Out Of This Place ne craignent absolument plus rien.

La dernière fois que l'on vous a vus à Paris, vous assuriez la première partie des légendaires Stones Roses à La Cigale. Qu'avez-vous ressenti en jouant pour la première fois en France dans une salle aussi grande ?

Josh McClorey : En fait, on a trouvé ça génial. Jouer dans une salle de cette taille, en France, et être la première partie des Stone Roses en même temps, c'était juste incroyable. En plus, nous avons été ravis de l'enthousiasme du public français : nous ne nous attendions pas à être si bien accueillis.

N'avez-vous pas été trop stressés à l'idée d'assurer une telle première partie ? 

Josh McClorey : Pas vraiment en fait. On était tellement contents que l'on n'a pas vraiment stressé. On s'est juste dit qu'il fallait en profiter un maximum : ce n'est pas comme si ce genre de choses arrivaient tous les jours.
Evan Walsh : En même temps, nous sommes tellement habitués à jouer devant divers publics que nous ne craignons plus grand chose. On est constamment sur la route - ça fait presque trois ans qu'on écume l'Angleterre et l'Irlande - et la pression diminue avec le nombre de concerts que l'on assure. Ça devient un peu une routine en fait.

Est-ce que vous pouvez un peu nous raconter comment le groupe s'est formé et comment vous avez trouvé aussi rapidement votre voie dans l'industrie musicale ?

Josh McClorey : On a grandi ensemble et on s'est forgé à peu près les même goûts musicaux. Les Rolling Stones, Dr Feelgood, les Yardbirds, en gros tous les groupes de rythm and blues des années soixante. En plus, nos parents nous ont toujours encouragés à poursuivre dans cette voie ; ils ont toujours montré un intérêt pour la musique et ont toujours voulu que leurs enfants soient musiciens. Ils ont réussi en tout cas.

Mais comment vous est venue cette passion pour un style qui est quand même très daté ? On peut aimer les Stones ou les Yardbirds ou The Animals mais vouloir s'en servir uniquement de base pour faire quelque chose de plus contemporain...

Josh McClorey : C'était vraiment notre centre d'intérêt en commun et nous ne voulions jouer que ce style de musique. Mais pour nous, le rythm and blues façon The Animals reste hyper contemporain : prends des groupes comme The Black Keys ou un gars comme Jack White, pour nous il n'y a aucune différence entre eux et le style des années soixante et pourtant, ce qu'ils disent, la façon dont ils jouent est hyper moderne.
Pete O'Hanlon : C'est vrai que certains trouvent qu'on fait un peu tribute band mais si nous n'avions voulu être qu'un tribute band, on ne pousserait pas notre son ou le jeu de scène de Ross à être aussi moderne.

Pourquoi avoir décidé de vous appeler The Strypes?

Josh McClorey : Ça vient d'un pull...

Un pull ? C'est à dire, est-ce que tu pourrais nous expliquer davantage ?

Josh McClorey : En fait, nous avons joué notre premier concert alors que nous n'étions qu'en primaire et il nous fallait absolument un nom. Et on a vu ce type qui au milieu de tout le monde en uniforme avait un pull à rayures (ndlr : stripes) et on a décidé de s'appeler The Strypes. Et le nom est resté. Nous n'avons jamais pris le temps de savoir si on pouvait en trouver un meilleur.

Comment parvenez-vous à jongler entre la vie sur la route, les concerts, les interviews et votre vie d'ados ?

Evan Walsh : En fait, nous sommes en tournée par période et nous prenons toujours le temps de faire une pause assez longue pour rentrer à Cavan, voir nos familles, nos potes. Nous apprécions d'autant plus le retour chez les parents.
Josh McClorey : Et le truc, c'est qu'on se fait vite remettre à notre place quand on rentre chez nous ; pas question de jouer les rock stars à la maison.
Evan Walsh : En plus, nous vivons dans une toute petite ville. Nous aurions vécu à Londres, je pense qu'il aurait été beaucoup plus difficile d'avoir une vie normale en dehors des tournées car il y a toujours un concert où aller. Au moins, on a un choc culturel en rentrant à la maison !

Que pensent votre famille et vos amis de votre succès et du fait que vous soyez devenus connus si rapidement ?

Josh McClorey : A Cavan, nos amis n'ont pas vraiment été surpris car pour eux, cela faisait déjà six ans que nous jouions. Tout le monde nous a vraiment soutenus et fait très attention à nous. D'ailleurs, notre manager est le père d'Evan.

Et qu'est-ce que ça fait d'être en tournée avec son père ?

Evan Walsh : En fait, c'est génial. Il est vraiment le manager du groupe, il fait attention à ce que tout aille bien pour nous et nous sommes sûrs que l'on peut avoir une totale confiance en au moins une personne.

Et qu'en pense le reste du groupe ?

Josh McClorey : Nous connaissons le père d'Evan depuis qu'on est gamins donc ce n'est pas bizarre de partir en tournée avec. On trainait toujours chez les uns ou les autres à Cavan donc ça ne nous a pas vraiment changé. Et on s'entend bien.

Des tas de groupes de votre âge - et beaucoup plus âgés - rêvent d'avoir votre succès. Selon vous, que faut-il pour qu'un groupe réussisse ?

Evan Walsh : Il faut être hyper concentré, carré, conscient du fait qu'il faut fournir un travail dément. Ce n'est pas qu'une occupation à mi-temps, il faut que ça devienne votre unique but et que vous y consacriez une grosse partie de vos journées.
Ross Farrelly : C'est un boulot à plein temps, il faut répéter tous les jours. Si le succès arrive, il arrive. Sinon, il faut se dire qu'il va bientôt arriver.
Evan Walsh : Je pense que beaucoup de groupes ne réalisent pas qu'il faille bosser autant. Le côté glamour, grosses fêtes, alcool, c'est sur-vendu : les groupes qui réussissent bossent vingt-quatre heures sur vingt-quatre leur musique. C'est leur boulot, ils ne voient plus ça comme un truc glamour. Il faut être prêt à se dire que c'est un job comme un autre. Et être très professionnel.

Votre setlist habituelle est composée de pas mal de reprises. Pourquoi avoir choisi d'en jouer autant ?

Josh McClorey : Nous avons commencé en jouant des reprises et c'est grâce à elles que notre style s'est forgé. Pour nous, elles font autant partie du groupe que notre nom ou qu'un des musiciens. Évidemment, on les réinterprète à notre manière.
Ross Farrelly : Quand on a commencé à jouer, il fallait des titres que beaucoup connaissaient et c'était aussi notre façon de rendre hommage aux groupes qui nous avaient inspirés. Nous avons ajouté pas mal de titres originaux maintenant à notre setlist et ça devient difficile pour nous de nous séparer des reprises qu'on a pris tant de plaisir à jouer. Pourtant, il va bien falloir qu'on opère un tri.

Et qu'en est-il de ce premier album tant attendu ?

Josh McClorey : Il devrait y avoir deux ou trois reprises. Le reste sera entièrement nos chansons. Nous avons décidé de garder celles qui sont les meilleures sur scène et dont on a l'impression qu'elles appartiennent au groupe autant que nos titres à nous.

Comment écrivez-vous les titres ?

Josh McClorey : C'est Ross qui écrit les paroles à l'acoustique et ensuite, on se met tous ensemble au boulot pour donner un côté plus glamour, plus électrique aux chansons.

Et vous avez un titre pour cet album ?

Josh McClorey : Justement, nous avons passé l'après-midi à y réfléchir mais pour l'instant, nous n'avons pas encore réussi à nous décider. En tout cas, il devrait sortir en début d'automne.

Vos tenues sur scène rappellent beaucoup celles des groupes des sixties. Est-ce que c'est une façon pour vous de promouvoir visuellement votre groupe ? Ou aviez-vous besoin d'une certaine uniformité pour que le public apprécie la cohésion du groupe ?

Josh McClorey : On aime surtout avoir l'air classe et nous pensons en effet qu'un groupe se doit de montrer une certaine identité. Les groupes que nous aimons se sont toujours habillés de cette façon et nous avons voulu aussi leur rendre un peu hommage comme ça. Et puis, un concert, ce n'est pas la vie de tous les jours, c'est un peu comme un événement important de la vie et il faut avoir une tenue adaptée.

Vous venez de signer un contrat pour cinq albums chez Mercury. Racontez-nous un peu comment cela s'est fait...

Josh McClorey : En fait, ça a été un processus assez long ; ça a tout de même pris neuf mois.
Evan Walsh : Il y a de cela un peu plus d'un an en avril, nous avons sorti notre premier EP. Et tout a pris d'un seul coup : certains magasins de disques en Irlande ont décidé de le mettre en avant, les gens ont suivi et après, ce fut iTunes. Et puis, nous avons joué à Dublin où des gens assez influents dans le monde de la musique sont venus nous voir après nous avoir entendu sur disque. Là-dessus, un type de Cavan qu'on connaissait nous a fait notre premier vidéo clip qui a permis de nous mettre en avant visuellement. Donc du tout début jusqu'à la signature, ça a dû en effet prendre neuf mois.

Vous appréciez les groupes sixties. Y a-t-il cependant des groupes récents qui trouvent grâce à vos yeux ?

Evan Walsh : Oui, il y a les Arctic Monkeys, les Black Keys. Mais on ne fait pas forcément attention aux époques auxquelles certaines musiques font référence ; on aime aussi pas mal de truc des années soixante-dix ou du jazz/blues des années vingt.

Pour terminer, puisque les médias font de nouveau référence à la British Invasion en parlant de vous, voici trois questions posées aux Beatles lors de leur première tournée américaine : quand avez-vous su que vous aviez atteint le succès ? Il a bien dû y avoir une soirée, un concert ?

Evan Walsh : Eh bien, moi je dirais que c'est ce soir. Ce concert, ici à Paris.

Est-ce que vous vous sentez préparés à cette célébrité si soudaine ?

Josh McClorey : On la gère plutôt bien, là, maintenant, non ?
Ross Farrelly : En même temps, je ne dirais pas qu'on a atteint la célébrité. Pas encore. Même si on commence à être un peu connus.
Josh McClorey : Et pas besoin de s'y préparer : n'importe qui peut avoir la grosse tête sans être connu, je ne pense pas que ça dépende du stade de succès d'une personne mais plutôt de son caractère.
Pete O'Hanlon : Je pense que c'est parce qu'on commence à être un peu célèbres qu'on ne se rend pas compte qu'on l'est. On baigne dedans et on n'y fait même pas attention. Mais j'imagine que si je voyais le succès que nous avons arriver à d'autres musiciens, je les appellerais certainement des célébrités.

Est-ce que parfois, vous vous regardez dans le miroir le matin en vous disant « Oh mon dieu, je fais partie des Strypes ! » ?

Josh McClorey : (rires)  Pas du tout, je me regarde et je me dis « Oh mon dieu, mon gars, tu ne ressembles à rien » !
Ross Farrelly : Moi c'est plutôt « oh mon dieu, la tronche, je suis trop moche ».
Evan Walsh : Ou « oh mon dieu, mais qu'est-ce que j'ai fait hier soir ? ».
Josh McClorey : Hé Ross, c'est moi qui te dis que tu es trop moche quand tu te pointes le matin ! (rires)

Et si on devait résumer The Strypes en deux mots, quels seraient-ils ? 

Josh McClorey : Rythm And Blues.
Evan Walsh : Euh, ça fait trois, mon gars ! (rires)
Ross Farrelly : Deux mots ? Fucking brilliant.