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The Pigeon Detectives

Interview publiée par Charlotte Prince le 23 mars 2017

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Après quatre années d'absence, The Pigeon Detectives ont effectué il y a peu un retour remarqué avec un nouvel album studio, Broken Glances, marqué par une évolution dans leur son et la renaissance de leur label Dance To The Radio. Nous les avons rencontrés à l'occasion de leur concert à la Maroquinerie de Paris.

Vous venez tout juste d'arriver en Europe afin de promouvoir votre nouvel album intitulé Broken Glances, album qui a vu le jour quatre ans après la sortie de We Met At Sea. C'est le plus long laps de temps que vous ayez attendu entre deux disques, pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

Oliver : Tout simplement parce qu'on était super fainéants (rires). Non, en fait absolument pas, on voulait vraiment prendre notre temps cette fois-ci, expérimenter quelque chose de radicalement différent. On aurait pu prendre nos instruments et créer ces chansons que nous avions l'habitude de composer auparavant mais on en avait marre et on voulait s'essayer à autre chose. Nous pousser vraiment dans une direction musicale toute autre de ce que nous avions fait auparavant. On a donc décidé de se poser, de bien réfléchir à ce qu'on voulait et donc de passer plus de temps sur nos nouvelles compos.
Ryan : Il y a aussi le fait que nous avions déjà pris pas mal de temps pour réaliser notre album précédent (ndlr : We Met At Sea était sorti trois ans après Emergency) parce qu'il y avait eu bien plus de choses à mettre en place. Et pour Broken Glances je dois admettre que ça nous a pris un peu plus de temps que prévu.

Pourquoi avoir choisi ce titre pour votre nouvel opus ? Les mots sont tirés de la chanson Munro me semble-t-il ?

Ryan : A la base on a de suite aimé ces deux mots, « Broken Glances ». On s'est dit que ça collait parfaitement au ressenti de tout l'album. Je ne sais pas comment ça pourrait se traduire en français mais chez nous les anglais, « Broken Glances » fait référence à deux personnes qui se lancent des regards comme brisés, peinés. Donc on est parti sur cette idée en se disant qu'effectivement ça résumerait parfaitement notre disque.

On a pris surtout beaucoup de temps pour écrire énormément de chansons.

Comment s'est concrètement déroulé tout le processus d'écriture et d'enregistrement ?

Oliver : Globalement ce fut assez compliqué en soi puisque nous partions sur un son complètement différent. C'était au final très intéressant de bosser sur autre chose même si ça nous a pas mal alourdi la tâche, particulièrement pour l'écriture. Côté enregistrement c'était déjà plus simple et ça s'est bien déroulé dans l'ensemble. On a pris surtout beaucoup de temps pour écrire énormément de chansons avant de se décider lesquelles correspondraient le mieux et composeraient le tracklisting de l'album.

Vous avez travaillé avec Richard Formby (Wild Beasts, Ghostpoet, I Like Trains...) sur cet album. Comment s'est passé cette collaboration et y a-t-il quelque chose qu'il vous ait apporté en particulier ?

Ryan : Pour faire simple, Richard n'aurait jamais été le genre de personne que tu aurais vu bosser avec nous à nos débuts. On l'a forcément choisi du fait qu'il était, d'un point de vue musical, complètement différent de ce que nous avions pu créer auparavant. De tout ce qu'il a pu créer, rien n'est proche de nos albums précédents. On s'est lancé de défi de trouver quelqu'un qui n'avait aucune idée pré conçue de ce qu'on a pu faire sur nos albums précédents. On s'est dit qu'il serait parfait pour nous aider à nous lancer dans cette nouvelle direction musicale, il a retravaillé sur nos chansons, a apporté pas mal de touches électroniques. Au final on n'a été plus que ravis qu'il veuille collaborer avec nous, et sans mentir nous sommes pleinement satisfaits du travail qu'il a apporté.

Votre son est en effet radicalement différent de ce que vous aviez pu faire auparavant. Pourquoi avoir choisi cette nouvelle voie et quelles ont été vos principales inspirations ?

Oliver : Parce que quelque part on a toujours eu envie de le faire. On ne s'est pas non plus assis et concertés en se disant « Tiens et si on partait maintenant sur ce style de musique ? ». Tout est venu d'une manière assez naturelle, principalement de notre vécu, de toutes nos sessions d'écriture. Concernant les inspirations...
Jimmi : Notre principale inspiration, je dirai que c'était justement de créer un nouveau son et de partir sur autre chose. Et l'idée n'est pas venue en écoutant d'autres groupes qui partaient eux aussi dans d'autres directions musicales.
Oliver : C'est vrai que beaucoup d'artistes essaient à l'heure actuelle de partir sur autre chose, je pense d'ailleurs au nouvel album de Circa Waves. Mais jamais on ne s'est dit « Tiens tel artisteou groupe s'essaie à autre chose donc on va faire pareil ». Cependant, et ça me concerne personnellement, je suis un grand fan de l'album Blue de Joni Mitchell. Sur ce disque il y a une chanson qui s'appelle A Case Of You et la manière dont elle joue de la guitare sur ce morceau m'a toujours énormément plu. Tellement d'ailleurs que pour le coup je m'en suis inspiré tout en le retravaillant à ma manière et en y ajoutant pas mal de réverb ou d'électronique dessus.

J'ai lu quelque part que vous aviez principalement écrit ce disque pour vos fans et spécialement ceux de longue date. Comment ont-ils réagit face à Broken Glances ?

Oliver : On vient de finir notre tournée UK et ça s'est très bien passé, ce qui était assez surprenant d'ailleurs parce que l'album n'a que quelques semaines. D'autant plus que la majeure partie du public connaissait déjà bien nos chansons et les chantait quasi par coeur à nos concerts. Donc oui, on peut effectivement dire que l'album a plutôt bien été accueilli et c'est le principal.

Il n'y avait absolument rien de prévu ou de planifié à l'avance.

Cet album sonne étonnement pop, alliant balades (Falling In Love et Munro) et chansons plus pêchues et dansantes (Lose Control et Stay With Me). Est-ce un aspect musical sur lequel vous avez travaillé depuis longtemps ou était-ce plus récent ?

Ryan : Comme on a pu le dire précédemment, c'est quelque chose qui est vraiment venu naturellement. Il n'y avait absolument rien de prévu ou de planifié à l'avance. On avait envie de changer radicalement de son et non pas de recréer encore ce qu'on a pu entendre dans nos albums précédents. Sans vouloir me vanter, j'ai toujours considéré qu'on est doués pour ce qui est d'écrire des chansons super « catchy » qui te donnent envie de bouger, et on voulait sortir un peu de tout ça. Mais quand tu écoutes Broken Glances tu entends quand même ce qui est et ce qui restera la « marque de fabrique » des Pigeon Detectives. Tu parlais de Falling In Love qui est simplement du piano avec un peu de réverb et la voix de Matt posée dessus, c'est quelque chose qu'on n'avait jamais fait auparavant et ce qu'on voulait justement avec ce type de chanson, c'est que les gens voient une nouvelle facette du groupe. Au Royaume-Uni, on n'a jamais reçu autant de bonnes critiques depuis qu'on existe. Même notre premier album n'avait pas autant été acclamé par la presse. On est contents de voir que ça paie finalement d'autant plus qu'on s'est vraiment renouvelés musicalement.

J'ai beaucoup aimé la vidéo que vous avez faite pour Enemy Lines. Qui est derrière l'idée principale et que peut-on attendre des prochaines vidéos ?

Oliver : L'idée vient principalement des gens qu'on a pu rencontrer au cours de nos vies. Et nous, dans le groupe, on a pensé à ces fameux yeux en forme de pétales qui finissent par tomber. Et pour tout te dire je ne pense pas qu'on va sortir d'autres vidéos pour cet album... En fait on n'a décidé de ne pas sortir d'autres singles. Tu sais, l'industrie musicale bouge pas mal et de nos jours avec Internet et toutes les plateformes d'écoute, tu as très peu de monde qui se décide à acheter les singles, que ce soit sur CD ou vinyle.

Toujours d'un point de vue créatif, qui se cache derrière l'artwork de votre album et quel en est le lien avec le titre ?

Ryan : On a fait appel à un gars qui fait du street art dans Leeds. Il s'appelle TONE, on le trouve juste hyper créatif, il a fait beaucoup de réalisations dans les rues de la ville. C'est également un ami de Matt.
Matt : Il vit même chez moi !
Ryan : Effectivement je n'avais pas précisé qu'il vit chez lui. Et de ce fait c'était relativement simple d'être en contact avec lui et de lui demander de bosser sur la pochette de notre disque.
Matt : On voulait surtout que les gens se fassent leur propre impression de l'artwork. On voulait quelque chose qui puisse intriguer les personnes qui achètent notre album et qu'elles puissent se représenter quelque chose à leur manière. Et on ne cherche même pas à expliquer la vraie signification de la pochette ce qui est d'autant plus drôle et cool. On veut seulement que les gens apprécient une oeuvre d'art en plus de notre album.

Votre album est sorti chez Dance To The Radio, label qui avait disparu quelques temps avant de renaître de ses cendres. Pouvez-vous nous en dire plus, sachant qu'ils vous avaient épaulés depuis vos débuts ?

Ryan : En fait, notre groupe fait partie intégrante du label, j'entends par là qu'on en possède une partie tout simplement. Pour We Met At Sea (ndlr : sorti chez Cookie Vinyl), on avait voulu essayer de travailler avec un autre label parce qu'on voulait tenter quelque chose de nouveau. Et au final ça n'a pas bien fonctionné. C'est un petit label indépendant basé sur Londres mais ça ne les empêche pas d'avoir signé de « gros » groupes. Nous on voulait surtout avoir une certaine liberté et pas mal de contrôle sur notre album, et malheureusement ce ne fut pas le cas. Donc pour Broken Glances on est retournés sur nos pas et chez Dance To The Radio. Forcément il y avait un peu d'émotion à retrouver notre premier label et là au moins on a pu nous même choisir de la date de sortie ce qui n'est pas rien.

Votre tournée UK était quasi sold out. Je sais que vos fans aussi vous ont toujours été d'un grand soutien, j'ai même vu récemment qu'un anglais vous a vus une centaine de fois en concert, ce qui est énorme !

Ryan : Absolument, et ce qui est sympa à voir, c'est toute cette nouvelle génération qui se montre à nos concerts. Les gens ont principalement trente ou quarante ans maintenant, mais on voit aussi beaucoup de jeunes personnes, comme si ces dernières écoutent les albums de leurs grand(e)s frères et soeurs ! Il y a eu comme une transmission entre deux générations, notre premier album a quand même dix ans. De ce fait y a vraiment une mixité au niveau du public avec des foules parfois complètement folles et emmenées par des jeunes de quinze ou seize ans. Comme tu l'as dit, notre tournée s'est quasi jouée partout à guichets fermés et c'était vraiment sympa de voir des têtes qu'on connaissait comme des nouvelles.

Vous étiez habitués à souvent jouer sur Paris, notamment pour vos deux premiers albums. La dernière fois que vous êtes venus, c'était en 2011. Qu'est-ce que ça vous fait de revenir dans une salle où vous avez joué deux fois auparavant ?

Oliver : C'est toujours agréable de revenir ici, et même en Europe, ce malgré le vote pour le Brexit, mais passons... On est toujours bien reçus où qu'on aille. Ce qui reste étrange c'est qu'on est typiquement le petit groupe anglais prisé par notre public anglais, public qui n'hésite pas à venir aussi en Europe pour nous voir. Ça reste quelque chose que les étrangers aiment faire aussi je crois.
Matt : Un concept purement étranger, oui. Ça laisse toujours une sensation un peu spéciale quand tu vois que des gens viennent d'autres pays pour assister à tes concerts, mais ça promet tellement plus de fun !