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Bill Ryder-Jones

Interview publiée par Pierre-Arnaud Jonard le 10 novembre 2018

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Bill Ryder Jones vient de sortir avec Yawn un chef d'oeuvre. Un disque à la mélancolie bouleversante et assurément l'un des meilleurs albums de 2018. Rencontre à Paris à la veille d'une tournée qui le verra assurer la première partie de Gruff Rhys.

Tu as quitté The Coral il y a longtemps déjà. Je suppose qu'on ne t'en parle plus ?

On m'en parle quelques fois encore. Cela ne me dérange pas.

Ton nouveau disque est très mélancolique. Dans quel état d'esprit étais-tu lorsque tu l'as composé ?

Ma musique est lente avec une voix profonde donc j'imagine que le résultat sonne mélancolique. J'essaie d'écrire quelque chose de lumineux. J'ai envie à chaque album de faire mieux que ce que j'ai fait sur le précédent.

Les morceaux du disque sont très longs...

Je trouve qu'il est difficile d'exprimer des choses sur un format de trois minutes. L'album précédent était basé sur des histoires simples. Avec ce disque, j'ai voulu exprimer des choses plus ambiguës et j'avais besoin pour cela d'écrire de longs morceaux. Je ne pense pas que ce soit un disque que l'on comprenne du premier coup. Il faut plusieurs écoutes pour cela.

De quoi parle There Are Worse Things I Could Do ?

C'est un morceau sur la sexualité. Cela parle de l'endroit d'où je viens où il y a encore beaucoup d'homophobie. Je voulais exprimer à travers ce titre la liberté de choix sexuel. Cela devrait n'avoir aucune importance que tu sois hétéro ou homo.

La guitare est très en avant sur le disque...

J'avais envie sur cet album de moments avec une guitare puissante qui fasse contraste avec ma voix susurrée...

Tu es producteur. Est-ce que cela a une quelconque influence sur tes propres productions ?

Mon métier de producteur est d'aider les artistes à trouver leur son. Cela m'a permis d'avoir des groupes avec une grosse énergie rock, comme lorsque tu as seize ans. Cela m'a inspiré, oui.

Le disque se termine par Happy Song pour un disque loin de baigner dans la joie...

Happy Song n'est clairement pas une chanson joyeuse. Je ne suis pas un party guy. J'ai écrit cela car je suis justement incapable d'écrire une « happy song ». Mon manager me dit toujours que les radios anglaises aimeraient jouer ma musique mais qu'ils ne le font pas car mes titres ne sont pas fait pour elles. Je pourrais écrire une pop song pour les radios mais je n'y arrive pas.

Tu fais référence à Michael Head sur l'album...

J'étais et suis toujours un grand fan des Pale Fountains et de Shack. Michael est une figure incontournable de Liverpool.

Tu vis à West Kirby, un village. J'ai l'impression que ton disque n'aurait pas pu être produit ailleurs que dans un village...

Vraiment ? Je ne sais pas. J'ai mon propre studio là-bas. Je vis à West Kirby car ma mère y habite. Je me sentirai mal d'habiter ailleurs. Je n'aime pas les grandes villes et j'ai besoin d'être au bord de la mer.

Ton premier album était inspiré d'un livre d'Italo Calvino. Tu es toujours inspiré par les écrivains ?

Non. Je trouverai cela trop facile d'être influencé par un écrivain. J'avais aimé ce livre d'Italo Calvino que m'avait prêté une ex-copine. Aujourd'hui, je sais qui je suis et je n'ai pas envie d'être influencé par d'autres choses que par moi-même.

Que signifie le titre de l'album, Yawn ?

Aujourd'hui, dans la musique, il n'y a plus d'énigme ni de magie. Les médias veulent savoir ce que tu prends au petit déjeuner. C'est à propos de cela.

Cela exprime bien l'esprit du disque par ailleurs...

Absolument !

Tu as déjà donné des concerts avant la sortie de l'album. Pourquoi ?

Cela a été une erreur. On avait booké la tournée avant de savoir quand sortirait le disque Mais cela a été agréable de jouer de nouveaux morceaux. Après tout, Pink Floyd jouaient des titres de The Dark Side Of The Moon bien avant sa sortie, donc ce n'est pas un problème.

Tu vas bientôt partir en tournée avec Gruff Rhys. Même si ta musique n'est pas exactement la même que la sienne, elle est proche dans l'esprit...

Tout à fait. Il a toujours été l'un de mes héros. Il m'inspire depuis mes seize ans. Je suis fan de Super Furry Animals et de ses albums solos. Nous avons le même agent et lorsqu'on m'a proposé cette tournée avec lui, j'ai dit mille fois oui.

Tu partiras ensuite pour ta propre tournée ?

Oui, à partir de Février.